Benjamin Hermann

Le lieu commun de Benjamin Hermann | Reconnaître la Palestine, tout un symbole

Benjamin Hermann Journaliste au Vif

Que la Belgique reconnaisse l’Etat de Palestine ne serait jamais qu’un symbole, arguent plusieurs responsables politiques. Un symbole important, mais jamais qu’un symbole. Pourtant, l’origine du terme se révèle assez inspirante.

«Nous opterons toujours pour le camp de la paix», ont écrit, dans leur accord de gouvernement, les cinq partis de l’Arizona. Un paragraphe y est consacré au conflit israélo-palestinien. Il comporte, sans grande ambiguïté, mais avec suffisamment de conditions pour que chacun puisse défendre sa ligne, le principe de la reconnaissance de la Palestine. C’est l’accord –tout l’accord, rien que l’accord- que Bart De Wever (N-VA) a défendu lorsqu’il a été interrogé sur le sujet, par les chaînes de télévision du pays, à l’occasion des 100 jours de l’exécutif fédéral.

L’épineuse question de la reconnaissance de la Palestine s’est imposée à la suite de l’annonce, par Emmanuel Macron, de la tenue d’une conférence internationale, en juin, pour une solution à deux Etats. Le gouvernement s’est entendu le mardi 13 mai en soirée pour soutenir l’initiative de la France.

Face à l’urgence et au désastre humanitaire, le poids du symbole est discuté. Il est notable d’observer que le caractère très symbolique, précisément, d’une telle reconnaissance était mis en avant par plusieurs autorités politiques. Quelquefois pour appuyer son caractère impérieux, mais le plus souvent pour en relativiser la portée réelle.

Une reconnaissance à terme, personne ne s’y oppose. Les débats des derniers jours ont surtout porté sur l’opportunité d’y accéder immédiatement.

«Faire des gestes symboliques, ça peut être très intéressant pour l’opinion publique ici, mais ça ne va pas aider sur le terrain», a déclaré Bart De Wever. Le président du MR, Georges-Louis Bouchez, redoute le «geste symbolique dramatique» qui conduirait à une forme de légitimation du Hamas. Le ministre des Affaires étrangères, Maxime Prévot (Les Engagés), estime que «l’urgence, malgré la puissance symbolique que ça peut offrir, n’est pas tant de reconnaître dans les 24 heures l’Etat palestinien. L’urgence est d’empêcher que des gens continuent de mourir de faim et de soif parce que l’aide humanitaire est bloquée.» Comment lui donner tort?

L’idée qui transparaît est, d’une certaine façon, que les symboles s’opposeraient aux actes. Qu’ils seraient presque vains, ou contreproductifs, qu’ils ne seraient guère pragmatiques, qu’ils serviraient surtout à satisfaire l’opinion, sans résoudre quoi que ce soit. Comme si la politique n’était pas faite de symboles, comme si l’on ne se souciait guère de l’opinion par ailleurs, comme si seuls des arguments de raison s’opposaient à ce symbole-là. Comme si, alors que le sujet est sur la table, ne pas accéder aujourd’hui à cette reconnaissance n’était pas aussi symbolique qu’y accéder.

«Faire des gestes symboliques, ça peut être très intéressant pour l’opinion publique ici, mais ça ne va pas aider sur le terrain.»

Le symbole, si on s’en tient à la définition, n’est pas la chose désignée. Il la représente, l’incarne. Symboliser, ce n’est jamais qu’évoquer.

Symboliquement, on notera aussi que l’étymologie du terme provient du grec. Syn, c’est «avec», c’est un ensemble, comme dans «sympathie», «symphonie» ou «synergie». Ballein, c’est «jeter» ou «lancer». Sumbolon est, à l’origine, un signe de reconnaissance entre deux parties, comme un objet découpé dont chacune détient une part, dans un pacte de reconnaissance mutuelle. Parfois connoté négativement, le terme n’est peut-être pas si mal choisi, en définitive.

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