Mélanie Geelkens

La sacrée paire de Mélanie Geelkens | Vieilles filles ! (Ou pourquoi tout le monde déteste les femmes célibataires)

Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

Depuis le 17ème siècle, elles sont surnommées « vieilles filles ». Et personne ne les aime, les femmes célibataires: elles subissent, davantage que les hommes, les discriminations et clichés liés à ce statut.

Entre la Journée mondiale de la plomberie (11 mars) et du «Kiss a ginger day» (le 12 janvier) se glisse la Journée mondiale des célibataires. Qui sont, après tout, plus de 2,55 millions en Belgique, selon le dernier décompte de Statbel. Assurément davantage que les pros des tuyaux et que les roux. Bref, c’était donc le 11 novembre dernier, un jour férié traditionnellement un peu moche, un peu déprimant, souvent gris. Merci aux Chinois qui, dans les années 1990, ont choisi ce jour à cause de sa symbolique numérique (11/11).

Mais il est finalement un peu moche, déprimant et gris, ce statut de solo. Ou, du moins, c’est généralement ainsi qu’il est socialement présenté. Légèrement honteux, peu enviable. Surtout pour les femmes. Ça tombe bien, vu qu’elles sont statistiquement majoritaires à vivre seules (ne fût-ce que parce qu’elles sont plus nombreuses et qu’elles vivent plus longtemps). Vieilles filles, va!

Ok, ok: l’équivalent masculin existe, mais il faut reconnaître que l’oxymore «vieux jeune homme» n’induit pas l’image mentale d’un être acariâtre, frustré, moche et frigide, qui finira dévoré par ses nombreux chats. Tout au plus celle d’un type qui n’a jamais vraiment quitté les jupes de sa mère (mais quel homme s’en distancie réellement? )

Vieilles filles: un statut enviable ?

«Vieille fille», cette expression forgée au XVIIe siècle, est aussi le titre d’un récent ouvrage (La Découverte, 220 p.), signé Marie Kock, journaliste française de 44 ans, sans mari ni enfant. Tout ce que la société déteste, en somme. L’indépendance et l’autonomie ne sont pas censées s’accorder au féminin. Un célibataire, on l’invite: le pauvre, va falloir maintenant qu’il se fasse chaque soir à bouffer et qu’il se mette à nettoyer! Une célibataire, on l’évite: sait-on jamais, qu’elle se mettrait à draguer René lors du dîner.

« Vieilles filles »: et si c’était un statut enviable ?

Elle est une anomalie, surtout si elle n’a guère enfanté, suprême crime de lèse-société (en Chine, d’ailleurs, elle serait surnommée l’«excédentaire», au Japon, la «parasite»). Elle effraie d’autant plus qu’elle est généralement instruite (une réalité statistique, alors que les hommes seuls le sont majoritairement peu). Et elle subit pleinement ce que Marie Kock appelle «la pression immense de l’amour»: ne pas y céder est forcément dû à un dysfonctionnement, auquel il faudrait à tout prix mettre fin, quitte à accepter les comportements toxiques. En France, en 2020, un rapport de l’Institut national d’études démographiques révélait que les femmes subissaient et vivaient plus difficilement le célibat que les hommes, en raison de la pression de l’âge ainsi que du regard des autres.

Or, «décider de ne plus attendre l’amour, c’est d’abord se reposséder. Reprendre possession de son corps, de son cerveau, de son temps», assure Marie Kock dans Libération. La journaliste revendique un «droit à la friche», soit celui de vivre seule et sans enfant. Un statut désirable, selon elle.

Et selon la «science»: en 2019, Paul Dolan, professeur en science du comportement à la London School of Economics, affirmait que les femmes célibataires sans enfant (ou ayant des enfants qui n’habitent plus sous leur toit) vivent plus longtemps, plus heureuses et en meilleure santé. «Si vous êtes un homme, concluait-il, mariez-vous.» Ne fût-ce que pour bénéficier d’une bonniche à domicile, d’alléger vos tâches au quotidien et de vivre librement sans aucune charge mentale (ajout personnel). «Mais si vous êtes une femme, ne vous donnez pas cette peine.»

Lundi rose?

Bien que le concept ait été abondamment remis en cause, le 16 janvier prochain est censé être le jour le plus déprimant de l’année, le fameux/fumeux «blue Monday». Pink Ribbon, l’asbl qui sensibilise au cancer du sein, aimerait le transformer en «pink Monday» et invite les entreprises à en faire un sujet de conversation au travail.

440

euros de différence par an entre la pension minimale d’une femme et celle d’un homme: selon un calcul du Centre d’expertise des pensions, la réforme promise par le gouvernement fédéral pénaliserait financièrement une femme sur sept. A cause du «travail effectif» durant vingt ans. Si les congés de maternité et d’allaitement sont intégrés à cette période, ce n’est pas le cas des congés parentaux ni du crédit-temps. «Un mépris total des réalités et des conditions de travail des femmes», selon les syndicats, qui appellent le gouvernement à «rectifier le tir».

Malte: IVG bientôt autorisée?

En juin dernier, une Américaine faisait une fausse couche à Malte. Bien que le fœtus n’eût aucune chance de survie, les médecins lui avaient refusé l’avortement. Ce qui avait provoqué de vifs débats sur l’île, dont la loi en matière d’IVG est la plus restrictive d’Europe. Cela pourrait changer: le Premier ministre, Robert Abela, a annoncé vouloir amender cette loi, autorisant, par exemple, un médecin à interrompre une grossesse si la vie de la femme est en danger. Actuellement, malgré l’interdiction, près de quatre cents femmes par an avorteraient à l’aide de comprimés achetés à l’étranger.

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