Mélanie Geelkens

La sacrée paire de Mélanie Geelkens | La charge sexuelle, ou pourquoi les femmes pensent à tout au lit aussi

Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

La charge sexuelle, c’est le même concept que la charge mentale. Mais au lit. Ou comment les femmes s’appliquent à faire en sorte que leur vie sexuelle se passe au mieux… souvent dans l’indifférence masculine.

Noël et Nouvel An: célébrés. Galette des rois: mangée. Prochaine échéance dans le calendrier des fêtes: la Saint-Valentin. Ahhhh… Les roses rouges à quatre euros la pièce, les pralines en forme de cœur et les menus (aux prix) spéciaux au resto! Toutes les femmes le savent, que c’est une fête commerciale, créée pour vendre plus de fleurs, de chocolats et de bijoux. Mais beaucoup d’entre elles continuent à l’espérer, ce regain de romantisme.

Ce mardi soir-là, elles rêveront de pétales étalés sur l’oreiller et de bougies dans la pénombre (elles se seront même épilées, tiens). Mais elles mangeront finalement un poulet-compote en tirant la tronche, engoncées dans leurs nouveaux bas autoportants. Parce qu’évidemment, Monsieur aura totalement oublié qu’il y a un 14 février dans le calendrier.

La Saint-Valentin, c’est pas la fête des amoureux, en fait. C’est en réalité l’unique jour de l’année où les maris, les conjoints, les concubins sont censés se comporter comme leurs dames aimeraient qu’ils soient toute l’année. Dans une interview accordée en 2021 au magazine Geo, Jean-Claude Kaufmann, auteur de Saint-Valentin, mon amour! (éditions Les Liens qui libèrent), retrace son origine et la façon dont les Américains l’ont ravivée dans les années 1950. Cette fête, historiquement subversive, est alors devenue une célébration du couple bourgeois normatif, «où le désir de romantisme des femmes est souvent rapidement déçu par le fonctionnement conjugal. La Saint-Valentin va alors fonctionner comme un rattrapage symbolique: il s’agira du seul jour de l’année où l’homme doit exprimer son affection.» Et même ça, apparemment, c’est souvent trop demander.

Parce que les 364 autres jours du calendrier, qui s’occupe de réserver le petit resto aux lumières tamisées ou le week-end champêtre censé raviver la flamme? Puis il y a ces fortunes dépensées en lingerie ; souvent pour ne recueillir qu’un bref coup d’œil au mieux poli, au pire désintéressé. «A poil!», comme dirait l’autre. Et, de préférence, sans poils: un rencard se prépare souvent à coups de rasoir. Alors que l’élu pourra tout à fait s’y pointer la broussaille empaquetée dans un slip porté trois jours d’affilée (et peut-être même troué).

Etre désirable: une obsession féminine. Garantir le fonctionnement de son couple, jusque sous la couette: un devoir qui repose généralement sur les épaules des femmes. La «charge sexuelle», que ça s’appelle. Même concept que pour la charge mentale, mais au pieu. Penser à tout, pour deux, pour que tout roule. Donc aussi à la contraception, bien sûr: au mieux le gars apporte, au début, une boîte de capotes puis se rassure de la présence d’un stérilet ou de la prise d’une pilule, persuadé d’avoir fait sa part du job.

La charge sexuelle côtoie par ailleurs de près le fossé orgasmique, soit cette inégalité dans la jouissance: selon une étude américaine publiée en 2017 dans la revue Archives of Sexual Behavior, 95% des hommes hétéros affirment terminer un rapport sexuel par un happy end, contre 65% des femmes hétéros. Probablement parce qu’elles sont moins égoïstes, elles. Parce que ce «care», inculqué dès l’enfance, déborde naturellement sur leur vie sexuelle. Reconnaître ça, ne pas le prendre pour acquis: voilà un beau cadeau, pour la Saint-Valentin. Moins cher qu’un bouquet de roses à quatre euros la pièce , en plus.

La charge sexuelle, le même concept que la charge mentale, mais au lit. © National

Les miches, c’est pas drôle

C’est pas pour critiquer les confrères, mais bon… Ainsi, la DH titrait, le 12 janvier: «Six mois de prison pour le boulanger de Rebecq qui aime (trop) les miches.» Six mois de prison pour harcèlement sexuel et violence morale sexuelle, en fait. Le patron s’était masturbé devant l’une de ses stagiaires, avait demandé à une autre de lui toucher le pénis, avait appelé une troisième alors qu’il se trouvait sous la douche. Le titre a finalement été modifié. Les violences sexuelles n’ont rien de risible.

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témoignages de violences auraient été récoltés depuis le début de l’affaire Emile Daraï, en France. Ce gynécologue a été mis en examen pour violences volontaires sur 32 patientes. Pourtant, il continue à organiser des consultations publiques. Une pétition a été lancée début janvier pour obtenir sa suspension totale. En trois jours, elle avait récolté 16 000 signatures.

Emprisonnée pour avoir aidé à avorter?

2020, confinement. Anna est enceinte d’environ douze semaines. Victime de violences conjugales, elle ne veut pas garder l’enfant, mais les pilules abortives commandées à l’étranger tardent. La Polonaise contacte alors Justyna Wydrzynska, membre du collectif Dream Team, qui lutte pour le droit à l’avortement en Pologne. Celle-ci lui fournit des médicaments, mais le mari d’Anna surveille ses communications et les dénonce. La féministe est poursuivie et risque jusqu’à trois ans de prison pour «aide illégale à l’avortement». Audiences prévues les 6 février et 14 mars prochains.

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