Anne Lagerwall

Tout savoir sur la protection des ambassades et des consulats (chronique)

Anne Lagerwall Professeure de droit international à l'ULB

La frappe israélienne sur le consulat iranien à Damas et l’intervention de la police équatorienne dans l’ambassade du Mexique à Quito mettent en exergue le statut des représentations diplomatiques.

Le 1er avril, des missiles supposément tirés à partir du Golan syrien occupé par Israël ont détruit le consulat iranien à Damas, situé dans le quartier des ambassades et des organisations internationales. Le bombardement a fait seize victimes, y compris huit Gardiens de la révolution. Quatre jours plus tard, la police équatorienne faisait irruption dans l’ambassade mexicaine à Quito pour arrêter l’ancien vice-président Jorge Glas qui y avait trouvé refuge.

En droit international, les locaux diplomatiques et les personnes qui y travaillent sont protégés. Les ambassades sont inviolables et la police locale ne peut y pénétrer sans autorisation. Contrairement à une idée largement répandue, elles relèvent du territoire des Etats qui les accueillent. Mais leur protection ainsi que celle du corps diplomatique se justifient car elles assurent l’intégrité de la représentation de l’Etat à l’étranger.

Ce régime d’exception suscite la curiosité, comme le cinéma permet notamment de l’illustrer.

Ce régime d’exception suscite la curiosité et soulève parfois des interrogations, comme le cinéma permet notamment de l’illustrer. La protection des locaux diplomatiques paraît justifiée lorsqu’elle permet de mettre à l’abri des individus injustement poursuivis ou persécutés. Dans La Déchirure (1984), de Roland Joffé, qui raconte l’avènement et le fonctionnement mortifère du régime de Pol Pot, l’ambassade de France à Phnom Penh accueille temporairement des dizaines de Cambodgiens qu’il importe de protéger contre les Khmers rouges. Dans L’Ambassade (1973) de Chris Marker, des dissidents trouvent refuge dans une ambassade étrangère indéterminée dans le contexte d’un coup d’Etat. Lorsque le chef taliban Alqani prend d’assaut celle des Etats-Unis à Islamabad dans la quatrième saison de Homeland (2014) ou lorsque les agents de la révolution iranienne s’installent dans l’ambassade des Etats-Unis à Téhéran dans le film Argo (2012) de Ben Affleck, directement inspiré de la réalité, on s’inquiète du sort de ceux qui y sont pris au piège, même si on n’est pas forcément acquis à la politique interventionniste de Washington. Dans d’autres films, une incursion dans les locaux diplomatiques s’avère nécessaire pour défendre la sécurité nationale ou internationale. Dans Casino Royale (2006), James Bond entre par effraction dans une ambassade pour y kidnapper un fabricant de bombes qu’il sera finalement contraint de tuer. Si M le rappelle à l’ordre lorsque la nouvelle fuite dans la presse, cet épisode n’entache ni l’admiration ni l’affection qu’on porte à l’agent de sa Majesté. On ne s’offusque pas davantage, dans la quatrième saison de 24 heures chrono (2014), quand Jack Bauer s’en prend au consul chinois à Los Angeles détenant des renseignements au sujet d’une bombe nucléaire sur le point d’être déclenchée.

Loin de constituer des scénarios distincts, ces narrations coexistent plutôt dans la réalité, des réfugiés pour les uns étant fréquemment des criminels pour les autres. Evitant de trancher de délicates questions d’appréciation, la protection des ambassades et des consulats est garantie en tout cas et en toutes circonstances en vertu du droit international, ainsi que l’a d’ailleurs rappelé le porte-parole du Service d’action extérieure de l’Union européenne tant au sujet de l’ambassade mexicaine que du consulat iranien.

Anne Lagerwall est professeure de droit international à l’ULB.

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