Un dico en or

Enfermer Mozart dans un seul livre relève de la gageure. C’est pourquoi les 13 auteurs du Dictionnaire Mozart, placés sous la direction de Bertrand Dermoncourt, rédacteur en chef de Classica-Répertoire, ont choisi la modestie. Fine équipe dont l’âge moyen, précise Dermoncourt,  » est celui de Mozart au moment de la création de La Flûte enchantée « . En 750 entrées ou mots clefs, ils proposent une initiation savante qui a pour but de répondre à la curiosité des amateurs de tout niveau. Néophytes ou mozartiens confirmés trouveront ici l’essentiel et pourront aisément aussi bien se faire une culture toute fraîche, qui ne requiert pas l’agrégation, que se perfectionner sur des points précis. Agréable vade-mecum, cet ouvrage très facile à compulser est le compagnon de l’honnête homme qui aime la musique sans risque de méningite. Il est également, pour celui qui en veut davantage, un excellent moyen d’aller plus loin, de viser plus haut. La force de ce dictionnaire ? Permettre à plusieurs publics de se rassasier, les moins lettrés se voyant honorés de disposer d’un instrument un rien flatteur, tandis que les aficionados ne se sentiront pas offensés d’en apprendre tant et plus alors qu’ils sont déjà bien informés.

Pourvu que l’on aime Mozart ! Se cultiver pour le plaisir, par le plaisir, tel est le but qu’atteint ce doux lexique. Ainsi, prenez l’article Don Giovanni. Pas une ligne gratuite ni inutile. Saviez-vous que le sous-titre de l’opéra était Il dissoluto punito (Le débauché châtié), ce qui dit tout ? Ou bien que, durant la seule année 1787, où Wolfgang Amadeus créa cette £uvre, trois autres Don Giovanni, dus à trois autres compositeurs, furent donnés mais aussitôt oubliés, ce qui donne une idée du phénomène Mozart ?

Ceux qui recherchent un instrument pédagogique et se demandent, par exemple, pourquoi les £uvres de Mozart sont souvent précédées des lettres  » K.  » ou  » K. V. « , suivies d’un chiffre, seront affranchis. Le bon Ludwig Alois Ferdinand Ritter von Köchel publie, en 1862, un catalogue chronologique et thématique qui répertorie, en 23 groupes, toute la production du maître, de 1 à 621. Ce n’est qu’un des catalogues mozartiens, mais celui qui fait le plus autorité. Bertrand Dermoncourt a donc eu la bonne idée de le publier in extenso.

Les plus cérébraux, enfin, ne seront pas déçus. Ils se pencheront avec intérêt sur l’entrée Génie. Beau développement, dû à la plume réfléchie de Timothée Picard, où l’on apprend que Mozart fut parfois considéré en son temps comme une véritable distraction foraine, façon Elephant Man. Lors de son passage à Londres, l’enfant est tenu pour une  » bête de foire « , à tel point que l’on soupçonne une supercherie ou – qui sait ? – un tour de magie particulièrement adroit. André Tubeuf, quant à lui, invite à une approche plus approfondie de l’être. Il souligne toute la distance existant entre le prodige et le génie.  » Le vrai miracle de Mozart, écrit le musicologue, c’est qu’en lui, ce que l’homme vient de trouver, le musicien déjà savait le dire. A cela Mozart a été préparé.  » La musique l’a fait homme. Cela valait bien un Dictionnaire.

C.M.

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