Notre liberté : une illusion ?

Comment parler de liberté quand tant de déterminisme s’affiche dans la succession de mes actes ?Xavier Pierret, Liège

Dans un premier mouvement, la liberté, pour un grand nombre de gens, consiste à faire ce qu’on veut, même si û après un temps de réflexion û ils admettent qu’il faut, à la fois, tenir compte de ce qui est matériellement possible et de la liberté des autres. Cela fait beaucoup. Certes ! Mais comment procéder autrement qu’en acceptant de se plier aux conditions physiques ? De plus, si la liberté d’autrui limite la mienne, qu’en reste-t-il ? Et elle se trouvera davantage restreinte encore si je m’interroge sur son avènement comme acte de conscience. Est-elle un choix né d’une réflexion ou le produit d’une (im)pulsion ? Dans le premier cas, ma conviction û intellectuelle ou morale û détermine ma décision en se construisant sur des états successifs de connaissances. Dans le second, mes passions sont le moteur de ma liberté. Mais peut-on confondre celle-ci avec celles-là ?

Le philosophe Spinoza (1632-1677), lui, a clairement tranché. Etre libre signifie prendre lucidement conscience des déterminations (la nature-Dieu) et des passions (désirs) que les premières génèrent en nous. Autrement dit, il faut nous libérer de l’illusion d’un libre arbitre existant a priori pour chercher et trouver ce qui nous détermine afin d’accroître notre  » capacité d’agir « , seule façon d’être que nous ayons en propre. Nous sommes au sein de la nature et pas du surnaturel. A la philosophie de nous apprendre à surmonter, grâce au savoir rationnel, la tentation de sublimer nos passions en imageries pieuses… ou scientifiques. En effet, comment concilier la croyance morale dans une liberté métaphysique et le déterminisme qui se confond avec la nature en tant qu’ordre de toutes choses ? Comment parler de liberté û c’est-à-dire de notre capacité individuelle de choisir û et demander aux sciences, dites humaines, d’expliquer nos comportements comme phénomènes déterminés. (Sinon à quoi bon parler de science ?)

Si la position spinoziste a l’avantage d’offrir une solution claire, elle reste tributaire d’une contradiction qu’on doit souligner à défaut d’y répondre de manière satisfaisante. Comment maîtriser des passions, logées au c£ur de notre psychisme, par la seule raison ? Socrate déjà affirmait que nul ne fait le mal consciemment. Et Victor Hugo, en écho, proclamait : ouvrez une école, vous fermerez une prison. Nous savons qu’il n’en est rien… sauf qu’en rendant la société plus fraternelle, plus solidaire, l’exercice d’une liberté bonne se déploie toujours davantage.

Isabelle Sweerts, Falisolle

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