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L’emoji

Le Vif

Une culotte blanche tachée de sang. C’est l’emoji que Règles élémentaires voudrait voir ajouter à la longue liste de ceux qu’on utilise quotidiennement pour échanger par textos et sur les réseaux sociaux. L’association française vient donc de lancer une pétition «pour un emoji qui brise enfin le tabou des règles» sur la plateforme internationale change.org, et adressée à Unicode. Ce consortium à but non lucratif, situé à San Francisco, coordonne et valide la bibliothèque d’emojis utilisés dans le monde entier. En 2017, Unicode avait déjà recalé l’emoji proposé par Plan International, un réseau d’ONG luttant pour les droits des enfants et pour l’égalité entre filles et garçons: une culotte avec des gouttes de sang, déjà. Retoqué parce que «trop choquant», selon Unicode. L’association a dû batailler durant deux ans pour décrocher, en 2019, un emoji «règles» en forme de goutte de sang, une très neutre minigoutte de sang. C’est nettement moins explicite qu’une culotte tachée qui incarne une expérience universelle, celle de l’arrivée imprévue des règles, l’accident de la protection qui lâche… Mais, pour Plan International, c’était tout de même une petite victoire, mais une modeste avancée, quand dans la kyrielle d’emojis, tout y passe, du papier toilette au gilet jaune. C’est aussi le reflet d’un tabou qui entoure les règles. Et ce tabou est source de discriminations, de douleurs et de honte sociale. Selon une enquête de iVox, réalisée en décembre 2021 pour le compte d’un fabricant de produits périodiques, une Belge sur quinze n’a pas les moyens de s’acheter des protections. Il y a parmi elles les plus jeunes, les 12-25 ans, qui ne viennent pas en cours tous les mois, parce qu’elles n’ont justement pas accès aux protections: ça représente une Belge sur dix, soit 25 000 jeunes filles. Il y a encore celles qui, durant leurs menstruations, changent leur quotidien, annulent une sortie, renoncent à une activité, parce qu’elles craignent les accidents ou ont trop mal au ventre: ici, c’est un cinquième du millier de sondées par l’enquête. Depuis de nombreuses années, des collectifs féministes réclament la gratuité des produits menstruels. Mais au-delà d’initiatives locales, jusqu’ici, rien. D’où, notamment, cette revendication d’un emoji «règles». Tout phénomène représenté clairement le fait exister ; tout ce qui peut faire reculer la honte, lever les tabous est bon à prendre, estime Règles élémentaires. Ça ne sera pas une mince affaire. L’association y croit: Metoo est passé par là.

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