Le délicat choix des armes

Laurence Van Ruymbeke
Laurence Van Ruymbeke Journaliste au Vif

Moins imbuvable, mais toujours imbuvable : le plan sur les fins de carrière, ficelé par le gouvernement, ne passe pas la rampe dans les syndicats. Ils tenteront d’obtenir mieux. Mais en douceur

Vous voulez savoir une chose ? Nous n’avons reçu que la veille le document final du contrat de solidarité entre les générations sur lequel nous devions nous prononcer le lendemain. Dans ces conditions, comment voulez-vous que l’on consulte sérieusement nos troupes ? Le gouvernement ne s’arrête pas à ça. Nous, nous devons rendre des comptes, tous les jours. Parce que nous, nous sommes des démocrates !  » Luc Cortebeeck, le président de la CSC, fulmine. Devant toutes les caméras du royaume, il doit achever sans tomber son périlleux numéro d’équilibriste.

Pourtant, sur ce texte gouvernemental largement consacré aux fins de carrière, les syndicats sont unanimes : il reste inacceptable, malgré les dernières retouches apportées. Le sort réservé aux salariés à temps partiel et les efforts exigés de la part de chômeurs âgés victimes de restructurations suscitent toujours le tollé. Mais le malaise est plus large : la menace du Premier ministre Guy Verhofstadt de ne pas appliquer la dernière version du texte si les syndicats ne l’avalisent pas fait hurler. Comme l' » arrogance  » patronale, ressentie par la base.

Mais que faire de ce malaise ? Après une première grève observée par la seule FGTB, le 7 octobre, et une grève générale en front commun qui a rassemblé entre 80 000 et 100 000 manifestants dans les rues de Bruxelles, le 28 octobre, comment les syndicats peuvent-ils canaliser la grogne de leurs ouailles ? Une nouvelle grève générale de 24 heures ? Elle n’est pas exclue. Mais la CSC et la CGSLB ne sont pas demandeuses, contrairement à la FGTB. Les syndicats ne veulent pas non plus jouer avec la survie du gouvernement : en cas d’élections, les socialistes francophones, empêtrés dans les  » affaires « , boiraient sans doute la tasse et la nouvelle coalition appelée au pouvoir ne défendrait pas davantage leur cause. Au contraire. Négocier ? L’exécutif fédéral ne changera plus un iota au texte. Son aile gauche est allée jusqu’au bout de ce qu’elle pouvait obtenir et les syndicats le savent.

Il faut pourtant atterrir, comme on dit dans le jargon social. C’est-à-dire trouver une issue au conflit, honorable pour tous. Voilà pourquoi la situation est délicate. Et sibylline, la communication commune des états-majors syndicaux. Le vendredi 25 novembre, une journée de sensibilisation et d’information sur les enjeux du contrat entre générations sera organisée auprès des salariés. Seront ensuite approchés, dans le même esprit, les employeurs, les gouvernements régionaux, les parlementaires fédéraux, l’Onem, le Conseil national du travail, tous susceptibles d’influencer, à leur niveau, l’application du Pacte.  » Ces actions ne sont pas à prendre à la légère « , insiste Jean-Claude Vandermeeren, chef de file wallon de la FGTB

Si rien ne bouge, des débrayages par secteurs pourraient intervenir. Au pire, l’arme ultime de la grève générale pourrait une nouvelle fois être dégainée. Au risque de tout perdre…

Laurence van Ruymbeke

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