La céramique dans ses murs

Barbara Witkowska Journaliste

A la fois musée et espace d’art et de création, le flambant neuf Centre Keramis à La Louvière est le premier centre d’art belge dédié à la céramique contemporaine. Spectaculaire !

En 2011, la célèbre faïencerie Royal Boch à La Louvière, l’un des fleurons de l’industrie wallonne, fermait définitivement ses portes. Sur l’immense site, il ne restait plus rien, excepté un édifice ancien abritant trois fours-bouteilles du XIXe siècle, classés en 2003. Un peu plus tard, lorsque l’idée de protéger le patrimoine de la faïencerie a émergé, il a été finalement décidé d’associer l’histoire du site à la création contemporaine.

La maîtrise de l’ouvrage a été confiée à l’Institut du patrimoine wallon, dont la mission consiste à réhabiliter les bâtiments classés inscrits sur une liste de sauvegarde, pour le compte de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Conçu par une association momentanée des architectes Gauthier Coton, Michel De Visscher, Xavier Lelion, Anne-Sophie Nottebaert et Antoine Vincentelli (Codenolevi), l’ensemble a une allure superbe. Les architectes ont choisi d’entourer le bâtiment historique de deux extensions ultramodernes qui doublent la surface utile. Leurs murs extérieurs évoquent un ruban de terre souple avant la cuisson. Les formes organiques déroulent des courbes et volutes sensuelles qui contrastent avec la volumétrie existante. Ces envolées de béton lyriques, percées de larges ouvertures vitrées, jouent avec la perception des visiteurs, les touchent et les impressionnent. A l’extérieur, le bâtiment s’habille de grands motifs évoquant l’émail  » craquelé « , imaginés par l’artiste Jean Glibert.

Le début de la visite est saisissant. Dans une légère pénombre se détachent les trois cônes des fours-bouteilles aux formes parfaites et aux dimensions imposantes. Leurs fonctions ont changé. Le premier est destiné aux enfants, le deuxième accueille des installations d’artistes, le troisième, préservé  » dans son jus « , rend compréhensible le processus de cuisson. L’espace voisin est réservé à l’Histoire. Pour commencer, on s’installe dans la salle de projection pour regarder le film qui raconte la naissance de la manufacture en 1841, sa réussite internationale, les Trente Glorieuses (1945-1973), le déclin, les luttes sociales, les cinq faillites…  » Il ne faut pas oublier que le musée est né sur un chaos social « , souligne Ludovic Recchia, directeur du Centre Keramis. Puis, on s’attarde longuement devant les nombreuses vitrines. La Communauté française est très riche en oeuvres de céramique. Jusqu’ici, ces pièces ont été trop rarement présentées et toujours de façon fragmentaire. Joliment mise en scène, la collection promet donc d’être une révélation sur une activité céramique effervescente tout au long du XXe siècle.

A l’étage, on suit un parcours design de la céramique utilitaire. Cafetières, théières, tasses et assiettes, créés entre 1870 et 2010, sont présentés d’une façon très originale : sous cloches de verre. A côté, un espace est dédié aux plus belles pièces de la collection Boch. Parmi les pièces phares : le vase monumental réalisé par Charles Catteau pour l’Exposition de Liège de 1930 et Le Feu, composition murale de Raymond-Henri Chevallier. Enfin, dans un vaste espace inondé de lumière, la partie contemporaine déploie des oeuvres souvent démesurées de Marc Alberghina, Tony Cragg, Claudi Casanovas, Florence Lenain et Hervé Rousseau.

www.keramis.be

Barbara Witkowska

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