Homme studio

Julien Bordier Journaliste

Il élabore dans l’ombre le son des disques d’Alain Souchon, de Manu Chao ou de Jean-Louis Aubert. Portrait d’un des producteurs français les plus en vogue : Renaud Letang.

Si vous dansez comme un malade sur Louxor j’adore, de Philippe Katerine, c’est un peu la faute de Renaud Letang. Ce quadra décontracté aux cheveux mi-longs, jean baggy et baskets blanches, est l’un des producteurs français les plus demandés de la planète musique. A son palmarès : Feist, Manu Chao, Gonzales, Luz Casal, Mathieu Boogaerts, Jean-Louis Aubert ou Saul Williams. L’homme est un talent précoce. A 22 ans, il était aux manettes de C’est déjà ça, de Souchon.  » Quand Alain m’a vu derrière la console, il a demandé où était passé le producteur. J’ai répondu que c’était moi. Il est reparti en disant que ça n’allait pas être possible. J’avais l’âge de son fils.  » Bon prince, Souchon l’a tout de même laissé faire. Résultat, l’album s’est vendu à 1 million d’exemplaires et Foule sentimentale a reçu, en 2005, la Victoire de la chanson originale des vingt dernières années. Mais ça sert à quoi, un producteur ?

Sur les pochettes, leurs noms sont souvent écrits en lettres minuscules. Bien sûr, tout le monde a déjà entendu parler du fameux  » mur de son  » de Phil Spector ou connaît quelques associations célèbres : George Martin et les Beatles, Tony Visconti et David Bowie, les Red Hot Chili Peppers et Rick Rubin, Amy Winehouse et Mark Ronson, Nigel Godrich et Radiohead, sans oublier Brian Eno, qui a transformé les trajectoires de Talking Heads, U2 et Coldplay.  » A travers eux, c’est l’histoire souterraine de la musique qui se dessine « , pointe Nicolas Dupuy, auteur d’un livre qui leur est consacré (Take One. Les producteurs du rock, Le Castor astral Music). Leur rôle étant souvent obscur, rien ne vaut une visite sur les lieux du crime, stylo à la main et oreilles tendues.

Sacrifiés sur l’autel de l’Audimat

Dans son studio B des studios Ferber, Renaud Letang vient de réaliser trois morceaux de la compilation Génération Goldman, avec Zaz, Jenifer et Christophe Willem. Pas vraiment sa tasse de thé.  » Mais je voulais montrer que l’on pouvait faire de la variété qui ne rimait pas forcément avec pauvreté « , justifie-t-il. Les enceintes bombardent alors Pas l’indifférence, repris par Zaz. L’impression d’entendre Véronique Sanson accompagnée par Air. La jeune gouailleuse de Je veux s’est transformée en princesse. On appelle ça l’effet Cendrillon.

 » On peut faire du populaire de qualité « , lance Letang. C’est son credo. Avec lui, le confidentiel Katerine devient grand public et Zaz plaît aux branchés. Le rôle du producteur, véritable alchimiste des sons, est donc primordial. Pourtant, Letang et ses collègues sont cantonnés aux coulisses.

JULIEN BORDIER

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