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Pourquoi Florence Cassez reste en prison

Malgré les doutes sur son procès émis par la Cour suprême, Florence Cassez ne sera pas libérée. Incapables de se mettre d’accord, les juges reflètent la division de la société mexicaine sur le sujet.

Florence Cassez devra attendre des semaines, voire des mois, pour savoir si la justice mexicaine la considère coupable, ou non, des faits qui lui sont reprochés. Pour savoir si sa condamnation pour trois kidnappings et ports d’armes est confirmée ou reléguée au rayon des (très) mauvais souvenirs, pour savoir si elle sera libérée.

Les cinq juges de la première chambre de la Cour suprême mexicaine n’ont pas réussi à se mettre d’accord. Tous ont reconnu que les droits de la jeune femme avaient été violés, mais chacun a exposé une idée très personnelle des conséquences de ces vices de forme sur l’ensemble du jugement. Pour deux d’autres eux, le juge rapporteur et Olga Sanchez, aucun doute: ces violations polluent l’ensemble de la procédure. Toutes les preuves et témoignages doivent être annulés. La culpabilité de Florence Cassez est dès lors impossible à prouver. Elle est donc innocente et doit être libérée immédiatement.

Mais pour deux autres magistrats, c’est loin d’être aussi simple. Les juges Pardo et Ortiz estiment que ces violations n’ont pas de conséquences majeures, qu’en aucun cas elles ne peuvent servir d’argument à une annulation de la procédure, et encore moins à un ordre de libération.

Reste le cinquième juge, José Cossio. L’homme a voté pour le projet du juge rapporteur, mais contre la libération. Il reconnaît les vices de forme et leur « effet corrupteur », mais souhaite un nouveau procès.

Le président Arturo Zaldivar a donc ordonné la rédaction d’un nouveau projet de sentence. L’un de ces cinq juges sera désigné et c’est la même chambre qui devra se pencher de nouveau sur le dossier et se mettre d’accord, a priori d’ici quelques mois.
Ce scénario promet une nouvelle foire d’empoigne au Mexique. Depuis quinze jours, le climat y est extrêmement lourd. Le gouvernement est monté au créneau pour défendre son enquête. Les différents ministères sont allés voir les juges ces dernières semaines et le président lui-même a pris position lundi « pour une justice qui refuse l’impunité et pour que personne ne soit libérée pour des ‘raisons techniques' ». Ils ont été appuyés par la principale association de défense des victimes, dirigée par la candidate du Pan (parti présidentiel) à la mairie de Mexico. Isabel Wallace a été sur tous les fronts, médiatiques, lors de conférences de presse à répétition, ou juridique, à travers un document déposé auprès des juges pour leur demander de ne pas libérer Florence Cassez. Elle a également accompagné les victimes à des rencontres avec les juges.

En face, un bataillon de juristes et de défenseurs des droits de l’homme. Pour Ana-Laura Magaloni, éminente juriste, « l’affaire Cassez est une opportunité de changer les pratiques abusives de notre police et de notre justice ». Pour tous, il s’agissait d’un débat historique. Une libération de Florence Cassez basée sur des abus policiers aurait été un coup d’arrêt à des pratiques d’un autre âge: torture, fabrication de preuve, présentation des suspects aux médias. « L’évolution vers une justice décente et un véritable état de droit. » Hier, la cour n’a pas tranché. Elle le fera dans un autre contexte, plus ou moins sensible que le contexte actuel, avant ou après les élections présidentielles de juillet.

Par notre correspondante Léonore Mahieux, L’Express.fr

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