© Reuters

L’ombre de l’affaire Dominici plane sur la tuerie de Chevaline

60 ans d’écart et pourtant de nombreuses similitudes entre les deux affaires. Le meurtre de la famille Al-Hilli la semaine dernière à Chevaline rappelle celui des Drummond, dans les années 1950.

Même mode opératoire, même lieu, même flou autour de l’enquête.

Une famille anglaise assassinée sur le bord d’une route en France. Il n’en fallait pas plus aux médias britanniques pour ressusciter une énigme judiciaire qui défraya la chronique dans les années 50, l’affaire Dominici, et la rapprocher du quadruple meurtre de Chevaline.

Il y a exactement 60 ans, le 5 août 1952, une famille de campeurs anglais -un couple et leur fille- est retrouvée assassinée sur une route près du village de Lurs, dans les Alpes de Haute-Provence. Le corps de Sir Jack Drummond et de sa femme, tués par balles, sont découverts près de leur voiture. Leur fille Elizabeth, 10 ans, a eu le crâne fracassé à coups de crosse.

Un schéma similaire au crime qui a eu lieu mercredi après-midi à Chevaline: Saad al-Hilli, sa femme Iqbal, et sa belle-mère ont été tués de deux balles dans la tête sur un parking désert de Haute-Savoie, sur les hauteurs d’Annecy. Leur fille aînée a survécu, mais a reçu une balle dans l’épaule et a eu le crâne fracturé par un objet encore non identifié. Transportée à l’hôpital entre la vie et la mort, elle s’en est finalement sortie.

Les enquêteurs espèrent une issue différente

Si Lurs et Chevaline sont distants de 300km, les médias britanniques ne s’embarassent guère de la géographie française et associent les deux lieux. « L’assassinat de trois Britanniques dans la même région, les Alpes, il y a 60 ans fait écho à ce multiple meurtre », rappelle The Daily Mirror. D’autant que, outre la similitude des faits, certaines pistes de l’enquête semblent se faire écho. Le Guardian rappelle que dans les deux affaires, le début des investigations a été chaotique. En 1952, les premiers agents arrivés sur les lieux avaient modifié la scène de crime, rendant certains éléments inexploitables. Dans l’affaire de Chevaline, les gendarmes, pour éviter de tomber dans le même écueil, n’ont rien touché… et ont laissé une fillette de 4 ans cachée dans la voiture, sous le corps de sa mère, pendant 8 heures.

Une affaire qui accroît la pression sur les enquêteurs français

Le quotidien évoque aussi « les rumeurs d’implication des services secrets » dans les deux affaires. Dans celle du meurtre de la famille Drummond, le KGB a été soupçonné d’avoir commis ce crime. En effet, Sir Drummond aurait un temps travaillé pour le compte des services secrets de sa Majesté. Une information jamais confirmée.
Si le KGB n’existe plus sous sa forme de l’époque, l’enquête se penche sur le passé du père de famille Saad al-Hilli. Selon le tabloïd Daily Mail, il serait connu des services de renseignement depuis 20 ans et aurait même fait l’objet d’une surveillance accrue en 2003, au moment de la guerre en Irak. Une information démentie par le procureur d’Annecy, Eric Maillaud. Mais lundi matin, des équipes de déminage sont intervenues dans le domicile de la famille car des produits « potentiellement explosifs » avaient été découverts. Il s’agissait en réalité d’une fausse alerte, mais qui laisse à penser que la piste terroriste n’est pas totalement écartée.

Une chose est sûre, les enquêteurs espèrent que les deux affaires n’auront pas la même issue. L’affaire du meurtre du couple Drummond n’a en effet jamais été élucidée. Un paysan de la région -Gaston Dominici- a d’abord été condamné à mort puis gracié quelques années plus tard par le général de Gaulle. Les témoignages ne concordaient pas et la justice ne disposait d’aucune preuve tangible. Un échec qui ne laisse aucune marge d’erreur aux enquêteurs français. « La pression sur les enquêteurs français est accrue par le souvenir de ce massacre similaire », rappelle The Independent.

Par Caroline Politi et Delphine Proust, L’Express

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire