Gérald Papy

Comment Jean-Luc Mélenchon électrise la campagne des européennes par ses outrances

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Les positions de La France insoumise sur le massacre du 7 octobre isolent son chef et creusent le fossé avec ses alliés potentiels à gauche.

Les campagnes électorales pour le scrutin européen sont souvent dévoyées par des préoccupations nationales, étrangères aux débats des assemblées siégeant à Strasbourg et à Bruxelles. Il s’agit alors de sanctionner un exécutif pour sa politique dans ce qui apparaît comme une opportunité d’affaiblir l’adversaire entre deux rendez-vous nationaux avec les citoyens. Qu’il l’ait délibérément orchestré ou non, le leader de La France insoumise (LFI), Jean-Luc Mélenchon, approfondit l’expérience en exploitant un thème de politique internationale qui intéresse tous les eurodéputés pour régler ses comptes avec un de ses alliés putatifs.

Jean-Luc Mélenchon a focalisé ses dernières apparitions et déclarations publiques dans le cadre de la campagne pour les élections européennes du 9 juin sur la guerre dévastatrice à Gaza, le calvaire de la population palestinienne et la complaisance présumée des responsables politiques français à l’égard d’Israël. Ces préoccupations sont légitimes. Toutefois, le refus de LFI de qualifier de terroriste l’attaque du Hamas qui a fait près de 1.200 morts le 7 octobre dernier pose question. Défendre les habitants de Gaza est une chose, défendre le Hamas en est une autre. La place de choix, sur sa liste pour les européennes (la 7e) et dans les débats de la campagne, accordée par le parti de gauche radicale à Rima Hassan, avocate franco-palestinienne prompte à défendre la position du Hamas, entretient la polémique.

Désireux de participer à une manifestation à Saint-Etienne à l’occasion du 1er mai, le candidat tête de liste du Parti socialiste et du mouvement Place publique, Raphaël Glucksmann, a été obligé d’y renoncer après avoir été houspillé par des militants des Jeunessess communistes et au moins un de La France insoumise. «Toute notre campagne est conçue comme un antidote à cette brutalisation permanente du débat public», a répliqué l’eurodéputé dont le propos ne visait ostensiblement pas que ces manifestants. Il est vrai qu’en matière d’excès de langage, le dirigeant de La France insoumise avait mis la barre très haut quelques jours plus tôt en comparant le président de l’université de Lille, qui avait interdit le 18 avril un de ses meetings prévu avec Rima Hassan, au criminel de guerre nazi Adolf Eichmann… La radicalité du chef et les mensonges de LFI (qui a affirmé que Raphaël Glucksmann n’avait pas réclamé un cessez-le-feu à Gaza) libèrent-ils la violence des militants, dans la rue et sur les réseaux sociaux, sur lesquels Glucksmann a été assailli de messages à caractère antisémite?

Jean-Luc Mélenchon sait le préjudice, observé en d’autres circonstances similaires, que pareille attitude cause à l’image de La France insoumise. Il persiste et signe. Il escompte faire le plein des électeurs d’origine immigrée, légitimement bouleversés par le drame de Gaza, au prix d’un accroissement du fossé creusé avec ses alliés de feu la Nouvelle union populaire, écologique et sociale (Nupes), une initiative couronnée de succès lors des législatives de 2022. Cherchez l’erreur, sachant que LFI figure, depuis longtemps et bien avant la nouvelle guerre à Gaza, comme le principal soutien de la communauté d’origine maghrébine. Irresponsable, vous avez dit irresponsable?

Défendre les habitants de Gaza est une chose, défendre le Hamas en est une autre.

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