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Macron et sa coalition près du scénario catastrophe

Le Vif

En n’obtenant dimanche soir qu’une petite majorité relative des sièges à l’Assemblée nationale française, le président Emmanuel Macron et sa coalition sont proches d’un scénario catastrophe, qui va les contraindre à rechercher des alliances lors de la législature qui s’ouvre.

Loin de la majorité absolue (289 sièges) que certains proches d’Emmanuel Macron espéraient toujours obtenir ces derniers jours, le parti présidentiel La République en marche (LREM) et ses alliés (partis MoDem et Horizons) ont enregistré une contre-performance inédite: la plus petite majorité depuis la fondation de la  Ve République en France en 1958 (210 à 260 sièges selon les instituts de sondage). Une majorité si faible qu’elle ouvre des questionnements institutionnels. Comment Emmanuel Macron, réélu le 24 avril, peut-il espérer faire voter les réformes de son programme présidentiel?

La situation de juin 2022 est très loin du scrutin législatif de 2017, lorsque Emmanuel Macron avait réussi à obtenir haut la main une majorité absolue, avec près de 350 sièges. La lame de fond a même failli emporter dimanche sa Première ministre, Elisabeth Borne, mal élue dans une circonscription de l’Ouest en recueillant 52,46% des suffrages. Est-elle sur la sellette ? Personne, dans la majorité, n’imaginait son départ avant dimanche soir, tant la symbolique d’une cheffe du gouvernement débarquée à peine un mois après sa nomination semblait désastreuse.

L’enjeu pour la « macronie » est désormais de constituer une équipe gouvernementale capable de remporter un vote de confiance devant la nouvelle Assemblée. « On composera avec tous ceux qui veulent faire avancer le pays », a déjà commenté la porte-parole du gouvernement Olivia Grégoire.

Les seuls élus divers gauche, divers centre et divers droite, même avec l’appui de parlementaires UDI (centre droit), ne pourraient permettre d’atteindre le seuil des 289, laissant entrevoir une négociation à venir avec le parti Les Républicains (LR, droite), qui se rêvent faiseurs de roi.

Dissolution

Plusieurs autres pays d’Europe ont connu des situations politiques similaires ces dernières années. En Allemagne, après une débâcle historique aux législatives pour le camp conservateur de l’ex-chancelière Angela Merkel, les sociaux-démocrates, les Verts et les libéraux ont conclu en novembre 2011 un accord pour gouverner ensemble la première économie européenne. Mais le pays est coutumier des coalitions.

En Espagne, un gouvernement de coalition – le premier depuis la mort de Franco et le retour de la démocratie – a été formé en 2020 par le socialiste Pedro Sanchez, et n’a pas la majorité absolue. Ce gouvernement doit s’appuyer sur des partis minoritaires pour faire voter ses projets de lois. Si la claque est sévère pour Emmanuel Macron, elle était redoutée par nombre de ses lieutenants, qui avaient mis en garde contre une campagne jugée défensive, sans éléments de programme identifiables, si ce n’est l’impopulaire réforme des retraites.

En retardant la nomination du gouvernement à la mi-mai, trois semaines après sa réélection, M. Macron avait pris le risque de laisser un espace considérable au leader de l’opposition de gauche en France, Jean-Luc Mélenchon, dont la dynamique de campagne n’a cessé de croître jusqu’au jour du scrutin. Si les plus optimistes de la « macronie » pariaient sur un sursaut emmené par le président français, notamment entre les deux-tours, le déplacement d’Emmanuel Macron en Ukraine n’a pas eu l’effet escompté.

La fin de campagne a été électrisée par les invectives et une dramatisation du scrutin. La nouvelle Assemblée nationale s’annonce difficilement gérable, avec un cartel des gauches et le Rassemblement national qui, à eux deux, pourraient représenter la moitié de l’Hémicycle. Et donc voter une motion de censure qui obligerait à la démission du gouvernement. La nouvelle majorité étriquée de la macronie devra rivaliser d’ingéniosité et de conviction pour espérer faire voter ses textes.

A défaut, il reste à Emmanuel Macron une dernière arme, hautement risquée: la dissolution de l’Assemblée nationale, prérogative que lui garantit la Constitution française.

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