Élections en Espagne, jour J: voici le scénario le plus probable
Après les élections anticipées du 23 juillet, le pays pourrait bien se retrouver dans une impasse si le Parti populaire refuse de gouverner avec l’extrême droite…
L’Espagne va voter aujourd’hui, à l’occasion d’élections législatives anticipées. Au soir des élections locales et régionales du 28 mai, le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez n’a guère d’alternative. Pour éviter que son gouvernement, déjà minoritaire, se délite un peu plus au cours des cinq derniers mois de la législature après la sanction que viennent de subir ses composantes, mieux vaut anticiper le scrutin. Une façon, peut-être, de contenir l’hémorragie, d’autant que ce n’est pas le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), formation du chef de gouvernement, mais bien son allié de la gauche radicale, Unidas Podemos, qui a subi le plus lourd revers électoral. Le résultat des élections législatives du 23 juillet dira s’il a pu «limiter la casse».
Une majorité forte, sans nécessité de gouverner avec les extrêmes, est fondamentale pour avancer.
1. Pedro Sanchez peut-il gagner son pari?
S’il visait une réduction de l’ampleur de la défaite, oui. S’il ambitionnait une reconduction au pouvoir, non. Les sondages concordent: la victoire semble acquise au Parti populaire, grand gagnant des scrutins régionaux (il dirige onze des 17 régions espagnoles, le PSOE n’en contrôle plus que deux, les Asturies et la Castille-La Manche). Selon une étude Ipsos réalisée pour le média La Vanguardia et publiée le 9 juillet, avec 35% des voix, le parti de droite remporterait entre 138 et 147 des 350 sièges du Congrès des députés. Les socialistes, avec 28% des voix, en récolteraient entre 102 et 112. Suivraient la coalition de la gauche radicale Sumar, qui comprend Podemos, avec 13% des suffrages et entre 31 et 39 sièges, et ensuite l’extrême droite Vox, avec 12,6% et entre 32 et 39 élus. Il reste que Pedro Sanchez a mené une campagne sur le thème du «vote utile» censé lui assurer une assise électorale honorable et pomper des voix aux autres formations de gauche, de quoi compliquer l’objectif éventuel de former un gouvernement progressiste.
2. Un boulevard pour Alberto Nuñez Feijoo?
Les succès du Parti populaire lors des scrutins régionaux de ces derniers mois garantissent à son leader Alberto Nuñez Feijoo une voie royale vers la victoire et, si celle-ci allait jusqu’à déjouer les prévisions des sondages, vers la formation du gouvernement. Si près du but, ne va-t-il pas déchanter? A la faveur d’un débat télévisé avec son principal rival Pedro Sanchez, le 10 juillet, Alberto Nuñez Feijoo a rappelé qu’il ne gouvernerait pas avec le parti d’extrême droite Vox. «Une majorité forte, sans nécessité de gouverner avec les extrêmes, est fondamentale pour avancer. Les extrêmes savent bloquer, mais ils ne savent ni gouverner ni gérer les affaires», a soutenu le leader du PP. Soit son intention était de jouer son va-tout pour attirer un maximum d’électeurs dans la dernière ligne droite et il expliquera, s’il n’obtient pas la majorité absolue, qu’au vu des circonstances, il est contraint de se dédire pour exercer le pouvoir. Soit il se tient à sa promesse, et il ne pourra pas former le gouvernement. La disparition de la scène politique du parti de centre-droit Ciudadanos ne lui laisse pas d’alternative d’alliance à droite.
C’est pourquoi, au regard des scénarios qui se dessinent pour le Parti Populaire et le PSOE, la perspective d’une impossibilité de gouverner, et donc d’un retour aux urnes, est grande au soir du 23 juillet.
3. Un coup d’arrêt pour Vox?
Lors du précédent scrutin législatif, en 2019, le parti d’extrême droite Vox, vieux d’un peu plus de cinq ans, avait récolté 15,8% des voix et 52 élus au Congrès des députés. Les 12,6% des voix et la trentaine de sièges qui lui sont promis le 23 juillet consacreraient donc un reflux. La «faute» à ce Parti populaire qui ne cesse de développer son audience, gouverne avec Vox à l’occasion aux niveaux régional et local, mais refuserait de s’allier avec lui au plan national, si l’on en croit Alberto Nuñez Feijoo. En réalité, l’évolution des résultats de Vox au plan national occulte les progrès de son implantation dans les territoires, que les élections régionales et locales du 28 mai ont confirmés. Le parti est désormais représenté dans tous les parlements régionaux du pays à l’exception de celui de la communauté autonome de Galice, dont l’exécutif était dirigé, jusqu’à ce qu’il prenne les rênes du PP le 13 mai 2022, par… Alberto Nuñez Feijoo.
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