Une fresque en hommage au personnel soignant à Mexico City. © AFP

Coronavirus: comment l’Amérique latine est devenue le nouvel épicentre de la pandémie

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Après la Chine, l’Europe et les États-Unis, c’est désormais vers l’Amérique du Sud que les regards sont tournés. La région est devenue le nouvel épicentre de l’épidémie, selon l’OMS.

Après l’épidémie de coronavirus qui a frappé la Chine et une partie du continent asiatique, l’Europe était devenue l’épicentre mondial de l’épidémie. Le coronavirus a tué jusqu’à présent au moins 170.000 personnes sur le Vieux Continent. Mais l’épidémie est désormais dans une phase descendante et presque tous les pays européens sont déjà entrés en phase de déconfinement.

Aujourd’hui, les regards sont tournés vers l’Amérique latine, qui enregistre une progression inexorable de la pandémie. Pour l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), l’Amérique du Sud est devenue un « nouvel épicentre » de la pandémie. « Nous voyons le nombre de cas augmenter dans de nombreux pays sud-américains. L’inquiétude concerne beaucoup de ces pays, mais clairement le plus affecté à ce stade est le Brésil« , a déclaré le responsable des situations d’urgence de l’OMS, Michael Ryan.

Une flambée tardive

Les autorités sanitaires régionales s’inquiètent depuis plusieurs semaines de la forte augmentation des cas dans certains pays. Avec le plafonnement du nombre de nouveaux cas confirmés aux États-Unis et la diminution du nombre de cas signalés dans de nombreux pays européens, l’Amérique latine est petit à petit devenue le nouveau foyer mondial.

Le premier cas confirmé en Amérique latine a été identifié au Brésil le 26 février, bien que des chercheurs aient déclaré que des cas s’y étaient déclarés dès janvier. Depuis, le coronavirus s’est propagé dans tous les pays de la région. S’il semblait y avoir beaucoup moins de cas et de décès qu’en Europe et aux États-Unis, c’est aussi parce que les tests sont loin d’y être aussi répandus et les décès sont probablement sous-déclarés. Le Chili a l’un des taux de dépistage les plus élevés d’Amérique latine – 21 tests pour 1 000 personnes. Mais le taux de dépistage dans la région est nettement inférieur à celui des autres parties du monde. Le Mexique a effectué 1,2 test pour 1 000 personnes, contre près de 36 pour 1 000 aux États-Unis. Le Brésil a également un faible taux de dépistage.

Au Pérou.
Au Pérou.© Belga

Les deux nations les plus peuplées, le Mexique et le Brésil, connaissent pour l’instant le plus grand nombre de décès. Mais les chercheurs affirment que ces deux pays pourraient être à l’origine d’une sous-déclaration des décès, de nombreux cas n’étant pas diagnostiqués.

Deux fois plus de morts

Contrairement aux États-Unis et à la plupart des pays d’Europe, de nombreux pays d’Amérique latine voient encore leurs cas et leurs décès quotidiens augmenter, alors que les premiers cas avérés se sont produits plus ou moins en même temps que sur les autres continents. En comparant les courbes du Brésil, du Mexique et du Pérou aux pays les plus touchés en Europe, on constate que le nombre de décès quotidiens augmente dans les pays d’Amérique latine alors qu’il diminue ailleurs pour le même laps de temps, analyse la BBC.

Le nombre de morts en Amérique latine et aux Caraïbes a doublé en deux semaines. L’épidémie y a fait plus de 40.000 morts depuis son commencement. Derrière le Brésil, on peut compter le Chili, le Mexique et le Pérou. L’Équateur est également fort touché, avec plus de 36.700 cas, dont 3.100 décès. Les autorités font également état d’environ 1.900 décès suspects.

Jair Bolsonaro rencontre ses partisans, en pleine épidémie de coronavirus.
Jair Bolsonaro rencontre ses partisans, en pleine épidémie de coronavirus.© AFP

Le nombre de décès au Brésil, au Mexique et au Pérou double à peu près toutes les deux semaines. Selon les experts, le pic de l’épidémie dans certains pays d’Amérique latine n’est pourtant pas encore atteint.

Le Brésil, épicentre sud-américain

Le Brésil compte près de 363.200 cas et plus de 22.660 morts. Avec ses 210 millions d’habitants, c’est le pays le plus touché par la pandémie en Amérique latine et le deuxième dans le monde derrière les Etats-Unis en nombre de cas confirmés. « La majorité des cas sont recensés dans la région de Sao Paolo (…) mais les taux de prévalence les plus élevés sont (dans l’Etat) d’Amazonas, où environ 490 personnes pour 100.000 habitants sont infectées, ce qui est assez haut », précise Michael Ryan.

Lire aussi : Le Brésil connaît l’une des pires épidémies de coronavirus au monde, surtout pour les jeunes

Selon un collectif de chercheurs brésiliens, les chiffres officiels, déjà élevés par rapport au reste de la région, sous-estiment largement la réalité de la pandémie dans le pays. Selon eux ils sont au moins 15 fois inférieurs à la réalité et le pays compterait plus de 3,6 millions de personnes infectées.

Malgré la catastrophe sanitaire dans le pays, le président brésilien Jair Bolsonaro participe à des rassemblements avec ses partisans, bravant les normes sanitaires et les règles de distanciation sociale. Le chef de l’Etat est opposé aux règles de confinement édictées par la plupart des autorités locales au Brésil.

Des situations très inégales

Confinement imposé, suggéré ou non, les différents pays d’Amérique latine font face à des situations très différentes. Le Mexique et le Brésil ont continué à prendre des mesures de confinement moins sévères que les autres pays d’Amérique latine. Les deux pays ont donné des directives, mais n’ont pas imposé de restrictions nationales. Le président brésilien Jair Bolsonaro a maintes fois minimisé l’importance du virus.

Le Pérou, au contraire, a connu l’un des premiers confinements les plus stricts de la région, mais continue de voir le nombre de cas et de décès augmenter. Comme le nombre de cas augmente rapidement au Chili, le gouvernement a annoncé un confinement obligatoire dans la capitale Santiago. D’autres pays, comme l’Argentine, ont imposé un lockdown obligatoire. Elle fait partie, avec l’Uruguay, des pays de la région capables pour l’instant de gérer la propagation.

Selon l’Organisation internationale du travail (OIT) et la Commission économique pour l’Amérique latine (Cepal), la crise économique découlant de la pandémie devrait faire 11,5 millions de nouveaux chômeurs dans la région cette année.

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