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Afghanistan: le mouvement des talibans

Le Vif

Les talibans ont gouverné l’Afghanistan entre 1996 et 2001 imposant une interprétation radicale de la charia avant d’être chassés du pouvoir puis de reprendre les armes. Après 18 ans d’insurrection, ils ont entamé depuis près d’un an des pourparlers de paix avec les Etats-unis.

– Etudiants en religion –

A l’automne 1994, le mouvement des talibans (« étudiants en religion ») fait irruption sur la scène afghane dans un pays dévasté par la guerre contre les Soviétiques (1979-89) et en proie à une lutte fratricide entre moudjahidines depuis la chute en avril 1992 du régime communiste à Kaboul.

Formés dans des madrassas (écoles coraniques) au Pakistan voisin où ces islamistes sunnites ont trouvé refuge durant le conflit avec les soviétiques, les talibans ont alors à leur tête le mystérieux mollah Mohammad Omar, décédé en 2003. Le Mollah Akhtar Mansour lui succèdera et sera tué en mai 2016 par un drone américain au Pakistan. Les talibans sont aujourd’hui dirigés par Haibatullah Akhundzada, alors que le co-fondateur du mouvement aux côtés du Mollah Omar, le Mollah Baradar, dirige l’aile politique du mouvement.

Comme la majorité de la population afghane, les talibans sont essentiellement Pachtounes, l’ethnie qui a dominé le pays quasi-continuellement depuis deux siècles.

– Ascension fulgurante –

Promettant de restaurer l’ordre et la justice là où règnent le chaos et la corruption, les talibans connaissent une ascension fulgurante avec le soutien du Pakistan et l’approbation tacite des Etats-Unis.

En octobre 1994, ils s’emparent presque sans combat de Kandahar, l’ancienne capitale royale dans le Sud.

Dotés d’un arsenal de chars, artillerie lourde et avions de combat et d’un important trésor de guerre qui leur permet d’acheter les commandants locaux, ils enchaînent les conquêtes territoriales jusqu’à lancer l’assaut final sur Kaboul, dont ils s’emparent le 27 septembre 1996.

Ils chassent du pouvoir le président Burhanuddin Rabbani et exécutent en public l’ex-président communiste Najibullah.

Le commandant Ahmed Shah Massoud, héros de la résistance antisoviétique, se replie dans la vallée du Panchir, au nord de Kaboul, où il organise l’opposition armée. Il sera assassiné par le réseau islamiste Al-Qaïda le 9 septembre 2001.

– Régime de terreur –

Au pouvoir, les talibans imposent la loi islamique la plus stricte, interdisant jeux, musique, photographies, télévision… Les femmes n’ont plus le droit de travailler et les écoles pour filles sont fermées.

Mains des voleurs coupées, meurtriers exécutés en public, homosexuels écrasés sous un mur de briques, femmes adultères lapidées à mort: leurs châtiments sont dénoncés et le dynamitage en mars 2001 des bouddhas géants de Bamiyan (centre) provoque un tollé international.

Le siège du pouvoir politique et religieux se déplace de Kaboul à Kandahar où le mollah Omar vit reclus dans une maison construite par son « hôte d’honneur », le chef milliardaire d’Al-Qaïda Oussama ben Laden.

Le territoire des talibans (qui contrôleront jusqu’à 90% de l’Afghanistan) est devenu un sanctuaire pour les jihadistes du monde entier qui viennent s’y entraîner, notamment Al-Qaïda.

En mars 2001, ils ont dynamité les statues géantes des Bouddha de Bamiyan, vieilles de 1.500 ans, qu’ils considéraient anti-islamique.

– Capitulation –

Les attentats du 11-Septembre aux Etats-Unis, perpétrés par Al-Qaïda, vont tout changer: le 7 octobre 2001, Washington et ses alliés de l’Otan lancent une vaste opération militaire après le refus du régime taliban de livrer ben Laden.

Le 6 décembre, le régime capitule. Ses chefs s’enfuient avec ceux d’Al-Qaïda, dans leurs bastions du sud et de l’est du pays mais aussi dans les zones tribales pakistanaises où ils reconstituent leurs forces pour « chasser les croisés » d’Afghanistan.

– Rébellion sanglante

Attentats et embuscades vont se multiplier contre les forces armées occidentales, qualifiées de « croisés », déployées dans le cadre de l’Otan, sous-commandement américain.

La Mission de combat de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) de l’Otan, terminée fin 2014, a été remplacée par celle de formation, de conseil et d’assistance, baptisée Resolute Support.

Depuis, les forces de sécurité afghanes combattent seules contre les talibans et autres groupes insurgés, soutenues dans les airs par l’aviation américaine.

En juillet 2015, le Pakistan accueille les premiers pourparlers directs, soutenus par Washington et Pékin, entre Kaboul et les talibans. Mais le dialogue tourne court après la révélation que le mollah Omar est mort deux ans plus tôt, les insurgés ayant caché son décès.

Sous la direction du mollah Akhtar Mansour, les talibans enregistrent leurs plus grandes avancées militaires depuis 2001.

La branche afghane du groupe Etat islamique, rivale des talibans, apparait en 2015 et revendique une série d’attentats sanglants notamment à Kaboul.

Selon l’ONU, l’année 2018 a été la plus meurtrière pour les civils afghans, avec 3.804 morts, dont 927 enfants.

Des pourparlers directs entre les Etats-Unis et les talibans ont débuté l’année dernière. L’émissaire américain Zalmay Khalilzad, ancien ambassadeur à Kaboul nommé en septembre par le président Trump, dirige l’équipe de négociation américaine.

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