Investir dans le Bitcoin ? Les conseils de trois économistes.

Bitcoin, le bon moment pour investir? Les conseils de 3 économistes

Nathan Scheirlinckx
Nathan Scheirlinckx Journaliste au Vif

La valeur du Bitcoin atteint chaque jour un nouveau record. La cryptomonnaie profite de la défiance envers les monnaies traditionnelles. Et entraine « un mouvement moutonnier » de consommateurs pas toujours informés, qui veulent « surfer sur la vague ». Mais est-ce le bon moment pour investir ? La réponse de trois économistes.

Après une longue période de creux, le Bitcoin surfe de nouveau sur la vague des marchés financiers. Cette semaine, la valeur de la cryptomonnaie star a atteint de nouveaux sommets, au-delà du record historique de 70.000 dollars. L’engouement pour le Bitcoin, créé en 2009 par la ou les personnes connues sous le pseudonyme de Satoshi Nakamoto, connait un fort regain de popularité.

Bitcoin : comment ça marche ?

Présenté comme une alternative aux dérives des marchés après la crise de 2008, le Bitcoin voulait incarner une monnaie indépendante de toute autorité. Qui s’affranchirait des lois économiques de l’offre et de la demande. « Alors qu’en fait, la valeur de cette cryptomonnaie fluctue en fonction des marchés financiers, indique Bernard Keppenne, Chief economist chez CBC Banque et Assurance. De ce point de vue-là, le Bitcoin est un actif financier comme un autre ». Un paramètre différencie tout de même la plus célèbre des cryptomonnaies par rapport aux actions et obligations. « Il s’agit de la volatilité du Bitcoin, qui est une monnaie décentralisée, sans valeur réelle », précise l’économiste Betrand Candelon (UCLouvain). « La valeur du Bitcoin est liée à la croyance qui l’entoure, complète Philippe Ledent, senior economist à la banque ING. Je compare souvent cette cryptomonnaie à un diamant, dont le prix élevé se justifie par le luxe et la beauté qu’on lui attribue. La valeur du Bitcoin augmente lorsqu’un élément extérieur laisse à croire qu’une masse importante d’investisseurs désirent en acheter ».

“Je compare souvent cette cryptomonnaie à un diamant

Philippe Ledent, senior economist à la banque ING”

Le bon moment pour investir ? Les conseils de trois économistes

Alors que le prix du Bitcoin tutoie des sommets, est-il intelligent d’investir maintenant ? « Comme pour l’or ou pour toute action et obligation, acheter lorsque le prix est élevé n’est pas idéal, argue Betrand Candelon. Actuellement, il serait plus intelligent de vendre des bitcoins que d’en acquérir. Sa valeur risque plus de continuer à augmenter que de descendre ». Philippe Ledent pense de son côté qu’il n’y a pas de bon ou de mauvais moment pour investir dans la star des cryptos. « Tout le mécanisme repose sur des croyances, qui sont abstraites. Peu importe quand vous achetez des bitcoins, il y aura toujours une part de risque. Du jour au lendemain, une simple rumeur peut ruiner la confiance en cette monnaie virtuelle, faire douter le marché et considérablement diminuer les prix ».

Actuellement, le Bitcoin se trouve dans une bulle spéculative, qui n’en finit plus de gonfler. « Au vu de sa volatilité, il faut être prudent lorsqu’on en achète », prévient Bernard Keppenne. L’économiste en chef de CBC Banque et Assurance adresse trois conseils : « Choisir une plateforme sécurisée, réserver une part limitée de votre portefeuille d’actifs à cette cryptomonnaie et ne pas oublier que les plus-values sur les bitcoins sont soumises à une taxe ».

“Au vu de la volatilité du Bitcoin, il faut être prudent lorsqu’on en achète”

Bernard Keppenne

Pourquoi le Bitcoin est aussi cher ?

La flambée du prix du Bitcoin est partie des Etats-Unis. © Getty Images

Fin 2021, le prix du Bitcoin atteignait le record de 50.000 dollars. S’ensuivait un passage à vide, à l’issue duquel la plus célèbre des cryptomonnaies redescendait sous la barre des 20.000 dollars. Ce mois de mars marque une série de records historiques, avec une valeur qui dépasse désormais les 70.000 dollars. Comment l’expliquer ?

« Début 2024, les Etats-Unis ont autorisé des fonds à investir uniquement dans le Bitcoin », rappelle Bernard Keppenne. « Cette manœuvre facilite l’accès à la cryptomonnaie de Monsieur et Madame tout le monde, qui n’ont plus qu’à confier leur argent à ces fonds d’investissement, développe Philippe Ledent. Avant, les démarches étaient plus contraignantes ». En prévision d’un afflux potentiel d’acheteurs, ces fonds acquièrent une réserve importante de Bitcoins. Comme ces derniers ne sont pas illimités – 19 millions ont déjà été produits sur un maximum de 21 millions – leur prix augmente par effet boule de neige.

Plus largement, le Bitcoin possède la particularité d’être populaire auprès de personnes qui, en temps normal, ne s’intéressent pas au monde de la spéculation financière. « On constate un fort engouement chez les jeunes, estime Betrand Candelon. Investir dans les cryptomonnaies est à la mode ».

Troisième explication : ce qu’on appelle le halving, « C’est un phénomène périodique lié à la production de bitcoins, qui est ralentie. L’offre de cette monnaie virtuelle est divisée par deux. Comme on s’attend à ce qu’il y en ait moins, le prix augmente ».

Plusieurs éléments périphériques expliquent enfin la hausse des prix du Bitcoin. « La baisse des taux d’intérêts à venir rend cette cryptomonnaie ainsi que d’autres actifs financiers plus intéressants », reprend Bernard Keppenne. Enfin, le contexte dans lequel évoluent les marchés impacte la valeur de la monnaie virtuelle. « Inflation, géopolitique et méfiance de la population vis-à-vis de la politique monétaire des autorités sont des paramètres à prendre en compte », résume Betrand Candelon.

“Il est difficile de savoir quand le Bitcoin arrêtera sa course folle

Betrand Candelon”

Comment va évoluer la valeur du Bitcoin ?

Selon Philippe Ledent, le prix du Bitcoin continuera d’augmenter jusqu’au halving, prévu aux alentours du 20 avril. « Il est difficile de savoir quand le Bitcoin arrêtera sa course folle, prévient Betrand Candelon. Quand ça va bien, la bulle spéculative grossit, mais jusqu’à quand ? Toute bulle explose à un moment ». L’économiste de l’UCLouvain y voit en tout cas un signal pour les autorités monétaires qu’il faut rétablir la confiance dans les monnais traditionnelles. « Imprimer des billets garantit un pouvoir d’achat, ce qui n’est pas le cas des bitcoins, qui ne reposent sur aucune matière première. On surfe sur la vague, jusqu’au moment où elle s’arrête ».

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