Charles de Broqueville, Premier ministre du gouvernement catholique-libéral à l'initiative de la loi de séparation bancaire. © DR

Le 22 août 1934, les banques belges ont été coupées en deux

Petit séisme dans notre petit pays : voilà nos banques scindées ! Jusqu’alors, elles pouvaient être banques de dépôt et holdings. A présent, elles vont devoir choisir : les enseignes qui acueillent l’épargne du grand public ne pourront plus posséder d’actions industrielles et les sociétés à portefeuille n’investiront plus l’argent des particuliers.

C’est la fin des banques mixtes. C’est aussi le début d’une nouvelle ère, où l’Etat commence à se mêler des affaires bancaires. Depuis des décennies, les banques belges portent à bout de bras le développement du pays. Les années 1920 sont des années folles : alors que la croissance paraît sans limites, les banques multiplient les participations industrielles. Au passage, elles s’en mettent plein les poches. Mais 1929 arrive. En peu de temps, le krach new-yorkais enflamme les Bourses du monde entier. Très vite, la crise boursière devient économique et sociale. Croissance du chômage, fermeture des entreprises… Pour les leaders populistes, les banquiers sont de parfaits coupables. Si Léon Degrelle tape dur sur l’establishment politique, il condamne aussi les « banksters », qu’il accuse de piller l’épargne des Belges.

Coupables, les banquiers ? Ils sont en tout cas victimes. Car la santé de nombreuses banques est directement liée à celle des entreprises. Et la santé de nombreuses entreprises est très mauvaise. En 1934, la faillite de la Banque belge du travail crée un séisme dans les milieux francophones et de gauche. La même année, la chute de la Middenkredietkas bouleverse les milieux catholiques flamands. Le gouvernement catholique- libéral ne peut laisser l’épargne des citoyens en péril. Surtout que l’opposition gronde. Conçu par Henri De Man, le « plan du travail » du POB prévoit rien moins que la nationalisation des banques.

Sous l’autorité du Premier ministre Charles de Broqueville, le gouvernement réagit.Le 22 août 1934 est signé le fameux arrêté royal scindant les banques mixtes. Ce n’est qu’un début. En mars 1935, le gouvernement dévalue le franc belge. Quelques mois plus tard, de nouvelles mesures sont prises, visant à mieux contrôler le système bancaire. Des règles de transparence sont établies, tandis qu’une Commission bancaire voit le jour. La mainmise du politique sur les banques ? Ce n’est pas ainsi qu’il faut interpréter ces réformes. Dans leur majorité, les milieux bancaires soutiennent celles-ci – ils ont d’ailleurs rédigé eux-mêmes certaines lois. Les banquiers espèrent ainsi que le comportement risqué de quelques-uns ne déteindra plus sur l’ensemble du secteur.

Reste un défi : puisqu’elles ne peuvent plus le placer dans des actions ou obligations, que feront les banques de l’argent des épargnants ? La guerre leur offrira bientôt la réponse. Pour affronter le conflit, les pouvoirs publics doivent disposer d’énormes financements. C’est auprès des banques qu’ils vont les trouver. En quelques années, l’Etat belge devient le principal débiteur des banques. Provoquant au passage une explosion de la dette publique.

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