Défilé du Mouvement flamand pour l'"indépendance" de la Flandre, à Anvers, lors de la Première Guerre mondiale. © Belgaimage

Le 20 janvier 1918: la Flandre se croit indépendante

Vive la guerre, vive la Belgique ! Dès 1914, injustement attaqué, le petit pays se défend de toutes ses forces. Sous la direction de son roi, encouragée par le cardinal Mercier, la Nation prend les armes. Cette population, bâtarde depuis toujours, fait enfin front et s’unit. 14-18, c’est l’heure de gloire du patriotisme à la belge. Mais pas seulement…

Car dans le fond des tranchées, c’est le Vlaamsche Leeuw qui résonne. L’occupant l’entend. Et flaire le bon coup. Malicieusement, il manoeuvre. Son credo : diviser pour mieux régner.

Le Mouvement flamand n’est pas neuf. Il s’est constitué dès le milieu du xixe siècle, tirant sa force des injustices réservées au traitement d’un peuple et de son dialecte. Avant le conflit, il a déjà obtenu des victoires : en matière judiciaire ou d’enseignement, plusieurs lois ont été votées, permettant aux Flamands d’être administrés dans leur propre langue. Mais le temps passe, et le Nord s’impatiente. Arrive la guerre. Et les Allemands, qui perçoivent le différend et en jouent. Leur objectif est clair : il s’agit de déstabiliser l’Etat belge en attirant la Flandre dans leur sphère d’influence. Rapidement, l’occupant s’attaque à un dossier mythique : l’université de Gand. A la veille de la guerre, le gouvernement belge avait accepté l’idée d’y introduire quelques cours en néerlandais ; en mars 1916, la  » néerlandisation  » totale de l’établissement est décidée. En octobre, l’année académique s’ouvre donc en néerlandais. A peine une grosse centaine d’étudiants sont inscrits aux cours. Mais symboliquement, le geste est fort.

Ce n’est pas tout. Les Allemands s’attaquent violemment aux rouages de l’administration. Après avoir scindé le ministère des Sciences et des arts en deux ailes linguistiques, ils proclament la séparation administrative du pays, en mars 1917. Les activistes flamingants boivent du petit lait. Leurs leaders multiplient meetings et harangues. Sous la houlette d’un Conseil de Flandre nouvellement créé, des centaines de réunions sont organisées, qui rassemblent des dizaines de milliers de personnes. Un manifeste circule. Saluant la séparation administrative, le texte réclame une séparation politique, dont on attend  » les meilleurs résultats pour le pays et le peuple « .

Scinder la Belgique ? En décembre 1917, le Conseil de Flandre passe le cap et, le 20 janvier 1918, l’indépendance est publiquement annoncée. Dans la foulée, des élections sont organisées en vue de renforcer la légitimité du fameux Conseil. C’est alors que les choses se compliquent. La campagne se déroule dans un climat de polémiques et de violences. Les patriotes condamnent les activistes, leur reprochant de collaborer avec l’Allemagne pour atteindre leur but. Dans l’administration comme dans la magistrature, des grèves sont déclenchées. L’occupant hésite. Recule. Devant tant d’hostilité, il finit par mettre un terme au processus électoral. A quelques mois de l’armistice, c’est donc lui qui enterre de facto la scission de la Belgique.

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