Pierre Havaux

Vent du Nord de Pierre Havaux : un gouvernement flamand qui prend son temps face à l’urgence énergétique (chronique)

Pierre Havaux Journaliste au Vif

La flambée des prix de l’énergie qui touche de plein fouet le portefeuille des ménages et des entreprises en Flandre fait aussi grimper la température au sein du gouvernement Jambon I. Là où Open VLD et CD&V s’impatientent et réclament une réponse d’urgence à la détresse ambiante, le partenaire N-VA a su imposer son tempo et la marche à suivre : pas de mesures de soutien sans un budget flamand maintenu sur les rails, histoire de se démarquer d’un relâchement budgétaire aux niveaux fédéral et wallon.

Avant l’heure, c’est pas l’heure. Certes, les factures d’énergie flambent en Flandre comme ailleurs, une panique s’installe durablement dans les foyers et gagne le monde de l’entreprise. Mais voilà, le gouvernement flamand (N-VA – Open VLD – CD&V) attend, l’arme au pied, avant de s’ébrouer pour tenter de calmer l’incendie qui fait plus que menacer. Encore quelques jours de patience, rendez-vous ce 26 septembre, jour de la traditionnelle déclaration du ministre- président Jan Jambon (N-VA) devant le parlement flamand. C’est alors, au coup d’envoi de la nouvelle année politique, que viendra enfin le moment de dévoiler les formes de soutien aux ménages et aux patrons mitonnées par Jambon I. Dans un même souffle seront annoncées les mesures qui devront impérativement maintenir sur les rails un budget en déficit de 450 millions. «Un budget, un paquet», telle est la devise de l’exécutif flamand en ces temps de grosse crise.

Le «quoi qu’il en coûte» n’est et ne sera pas flamand.

Coupable lenteur, s’indignent les impatients qui, jusqu’au sein même du gouvernement, pressent d’agir, libéraux et chrétiens-démocrates mus par un même sens de l’urgence et par le souci de répondre sans tarder à la détresse ambiante. Les mêmes qui ont pu s’agacer du voyage officiel en Irlande que s’est permis le ministre-président, alors que la maison brûle en Flandre.

Mais le partenaire N-VA l’a emporté, a imposé son calendrier et son approche qui se prétend raisonnée. L’ homme qui porte ses couleurs à la tête du portefeuille des Finances et du Budget, Matthias Diependaele, s’est parfaitement glissé dans le rôle que son parti attend de lui: «Je comprends l’urgence, mais nous ne pouvons pas agir comme si notre bourse était sans limite. A tout qui prétend qu’il y a des moyens, qu’il me montre où les trouver.» Une dernière considération du même tonneau, pour la route: «On ne comble pas un trou en en creusant un autre lorsqu’on est dans le même jardin.»

Pas de panique, tout sera mis en œuvre pour que la Flandre passe l’hiver au chaud, attendu que tout soutien à la crise énergétique devrait être compensé par la mise en sourdine d’autres efforts financiers réclamés, par exemple en faveur de l’accueil de la petite enfance si cher au CD&V. Le «quoi qu’il en coûte» n’est et ne sera pas flamand.

Au risque de paraître insensible même au désarroi du patronat qui lui tient pourtant à cœur, la N-VA sera donc gardienne de l’orthodoxie budgétaire, gestionnaire avisée des deniers publics de la Flandre, décidée à se présenter comme telle devant l’électeur en 2024, n’en déplaise à ses rivaux libéraux ulcérés par cette non-assistance. «La belle affaire que de fanfaronner avec un budget en équilibre mais une économie au tapis et des centaines de milliers de citoyens plongés dans la pauvreté!», a rétorqué leur chef de file au gouvernement, Bart Somers, ministre des Affaires intérieures. Sans doute, sauf qu’à la N-VA, les priorités seraient ailleurs. Où l’on préfère d’abord regarder le gouvernement fédéral se déboutonner pour épauler ménages et entreprises, y compris wallons, qui ne peuvent pas trop compter sur un coup de pouce de leur Région fauchée comme les blés. Pour laisser ensuite l’indiscipline budgétaire se parer des seules couleurs fédérales ou wallonnes.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire