Rajae Maouane, coprésidente d'Ecolo. © Belga

Rajae Maouane (Ecolo), la jeunesse rebelle au pouvoir

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Dans Wilfried, la coprésidente des verts, figure montante de la politique, ne désapprouve pas « des actions militantes plus radicales », en condamnant la violence, et s’explique sur ses expressions parfois « borderline ».

« Que ce soit dans le langage ou les actes, on voit clairement se développer de nouvelles formes d’expression, en rupture avec les formats politiques traditionnels. On constate que les anciennes méthodes ne fonctionnent pas, qu’il faut inventer des nouveaux outils, et ce regard neuf, c’est principalement la jeunesse qui peut l’apporter. » Voilà ce que Rajae Maouane, coprésidente d’Ecolo, exprime dans un portrait publié par le magazine Wilfried, dont le seizième numéro – spécialement consacré au « nouveau féminisme », sous toutes ses forms – sort en librairie ce vendredi 18 juin.

La coprésidente verte exprime sa façon de faire de la politique autrement. Après des débuts discrets, suite à son élection à la coprésidence du parti en compagnie de Jean-Marc Nollet, le 15 novembre 2019, la jeune femme de Molenbeek a pris ses marques et multiplie désormais les saillies et les coups d’éclat médiatique. Sur le voile à la STIN, sur la diversité, sur le féminisme, elle ne mâche pas ses mots.

« Pas un un bouche-trou! »

Féministe, Rajae Maouane l’est, jusqu’au bout des ongles. « Je n’ai pas vocation à être l’appoint « femme », je ne suis pas un bouche-trou!, insiste-t-elle. On compte souvent sur Ecolo pour ramener les quotas, mais il est temps que les autres partis prennent aussi leurs responsabilités. Qu’on réfléchisse aux raisons pour lesquelles il y a si peu de diversité à ce niveau de pouvoir. »

Sur son tee-shirt, décrit la journaliste de Wilfried qui l’a rencontrée, un « not your habibti », soigneusement choisi parmi sa large collection de tee-shirts à messages. « Ça veut dire ‘Je suis pas ta chérie’ en arabe-anglais, lui explique Rajae Maouane. C’est une jeune créatrice palestinienne qui a développé ça pour lutter contre le harcèlement de rue, et une partie des bénéfices est reversée à des associations féministes locales. » « Indice, s’il en fallait encore, du courant féministe dans lequel elle s’inscrit: décolonial, antiraciste, plus globalement intersectionnel — soit intégrant l’ensemble des oppressions cumulables que peuvent vivre les femmes et personnes LGBTQIA+ », analyse le magazine.

Rajae Maouane est une très jeune présidente de parti – 31 ans- mais elle se nourrit de plus jeunes aspirations encore. « Quand je vois les 15-20 ans, ça me donne de l’espoir, je me dis « waouh, ça va être le feu »! On voit bouillonner une créativité, une force, une volonté d’en finir avec les oppressions, et c’est très beau. » Elle prend pour exemple Les nouvelles guérillères, récent documentaire sur les « collectives » militantes féministes bruxelloises, « qui font un super taf », précise le magazine.

« Des actions plus radicales »

Un penchant pour la désobéissance civile ? « Tout n’est pas acceptable, c’est clair, mais je pense que des actions militantes plus radicales ne sont pas forcément regrettables, tant qu’on n’en arrive pas à la violence, explique-t-elle. Si l’on prend les collages, je pense que ça peut aider à déconstruire et à sensibiliser, de manière beaucoup plus accessible que de longues études sociologiques. C’est aussi une façon de remettre un coup de pied dans la fourmilière pour forcer la visibilité. »

Les modes de comùunication modernes et les réseaux sociaux, Rajae Maouane connaît. Jean-Marc Nollet reconnaît aisément qu’elle apporte cette « touche » au parti.

Parfois, le « backlash » n’est pas loin. En juin 2020, Rajae Maouane publie une vidéo sur Twitter dans laquelle elle reprend une élection des shitstorms qui arrivent quotidiennement dans sa messagerie : « Retourne au bled », « Marre à Kech, c’est vous la pollution de la Belgique ! », « Tu vas finir ta vie dans une banlieue bien pourrie et tu l’auras bien mérité », et autres joyeusetés. « Publiquement, elle condamne fermement, souligne le magazine Personnellement, elle prend, digère, se déleste et plane au-dessus ».

Il arrive aussi qu’elle soit à l’origine de ces polémiques, avec des messages maladroits, voire volontairement borderline. A l’image de ce cliché en story d’un militant palestinien doublé d’un chant d’une chanteuse libanaise réputée proche du Hezbollah. « Ce sont des communications populistes, qui ratissent large et qui font du bien à ceux qui ne connaissent rien à la politique, estime une mandataire socialiste.

« Rajae Maouane hausse les épaules, conclut Wilfried. Elle survole. Elle dit tenir cette attitude de ses parents, qui à la force de leurs poignets ont surmonté les obstacles, parvenant à s’élever à la classe moyenne. « Quoi qu’il arrive, y a pas mort d’homme. Il t’arrive une bricole, prends le temps de digérer, apprends de tes erreurs, puis tu te remets en selle et t’avances. »

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null© Wilfried

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