Maxime Prévot

Les communes et l’emploi selon Maxime Prévot (Les Engagés): « On préfère toujours que ses propres habitants soient les premiers bénéficiaires des emplois, mais… »

Nicolas De Decker
Nicolas De Decker Journaliste au Vif

Bourgmestre (Les Engagés) de Namur, Maxime Prévot assume les coûts et les bénéfices du statut métropolitain de la capitale wallonne. Mais il souhaite que les grandes villes soient plus soutenues.

Namur affiche un Ratio d’emploi intérieur communal (REC) parmi les plus élevés de Belgique, supérieur par exemple à celui d’Anvers. Mais le taux d’emploi de la capitale wallonne est le plus faible de toutes les communes situées dans l’arrondissement de Namur. Avez-vous l’impression de créer des emplois qui profitent aux échevins des finances des communes voisines?

Il faut avoir l’honnêteté et l’humilité de reconnaître que les leviers au niveau communal pour la création directe d’emplois sont relativement limités. En fait, on crée de l’emploi de manière indirecte essentiellement par les zones d’activité économique que l’on active, par les permis que l’on délivre pour des espaces de bureaux, etc., qui seront occupés par des travailleurs, et par la dynamique commerciale que l’on soutient. Mais c’est surtout en fait la dynamique urbaine qui dans son ensemble génère un phénomène d’attractivité et d’emploi. On n’a pas de levier direct pour dire « à cet endroit, je vais créer x emplois ». On sait acceuillir une entreprise qui va en créer.

Mais est-ce que l’entreprise qui va s’installer sur votre territoire va rapporter quelque chose à la recette communale?
Ah non, pas nécessairement. Et surtout pas si on ne regarde ça que sous l’angle de la contribution à nos rentrées en Impôt des personnes physiques. Par contre, si on regarde ça sur les dépenses que ces mêmes travailleurs peuvent réaliser dans notre tissu socio-économique, au bénéfice de l’horeca ou des choses pareilles, oui il y a des retombées. Tous ceux qui aujourd’hui travaillent dans les administrations wallonnes, au sein de la capitale que nous sommes, n’habitent pas tous Namur. Mais par contre ils participent tous à la dynamique du coeur de ville, du secteur horeca, de nos commerces…

Mais ils vous coûtent aussi de l’argent pour, par exemple, la sécurité, la mobilité…

C’est évident…

Si un travailleur ne vit pas dans la commune, il lui coûte donc plus qu’il ne lui rapporte, non?

Ca me parait très réducteur comme approche. C’est oublier qu’une ville est un corps vivant qui a besoin d’un dynamique urbaine pour pouvoir générer de l’attractivité. Et ça dépend ce qu’on cherche; simplement d’alimenter les rentrées fiscales, ou de contribuer à cette dynamique urbaine. Certains vous diront, il faut taxer les bureaux, etc. Aujourd’hui, ma logique n’est pas de maximiser la fiscalité sur ceux qui travaillent ici mais, au contraire, de voir comment on peut attirer des entreprises et de l’activité ici, sur le territoire parce que ça va participer à cette dynamique, et que cette dynamique aura un effet boule de neige vertueux. Ca veut dire que ça sera plus vite une ville qu’on va choisir pour venir s’y établir et y vivre, ça sera plus vite une ville qu’on va choisir pour venir y faire ses achats, ça sera plus vite une ville qu’on va choisir pour y étudier, et donc on a finalement une dynamique économique vertueuse, qui ne peut pas se limiter uniquement à l’apport de fiscalité pour le pouvoir communal.

L’existence ou la création de logements sociaux, mécaniquement, diminue le taux d’emploi d’une commune…

C’est vrai. Et c’est une des réalités des pôles urbains par rapport aux communes rurales. Et c’est bien pour ça que je pense qu’il est essentiel qu’on ait une politique des villes qui soit beaucoup plus soutenante. Je ne renie rien des réalités du monde rural, mais je pense qu’on prend insuffisamment en compte jusqu’à présent, y compris dans le Fonds des Communes, la concentration des difficultés dans les milieux urbains, puisque c’est là que se concentrent les problèmes de pauvreté, les problèmes de sécurité, les problèmes de mobilité, les problèmes de propreté. Si le dix-neuvième a été l’âge des Empires, le vingtième celui des Etats-nations, le vingt-et-unième est celui des métropoles. Et donc c’est un phénomène nouveau qui doit être mieux appréhendé.

Au niveau communal, vaut-il mieux travailler à améliorer son taux d’emploi ou son ratio d’emploi intérieur communal (REC)?
Les deux ont un intérêt. Mais ils participent à des logiques différentes. C’est aussi important de créer de l’activité, même si c’est pour des gens qui habitent hors de la commune, parce que ça alimente le cercle vertueux. Mais il est évident qu’on préfère toujours que ce soit ses propres habitants qui soient les premiers bénéficiaires des emplois.

A cet égard, êtes-vous favorable à la réintroduction d’une espèce de clause de préférence communale pour les emplois publics locaux?

Je n’ai pas envie de tomber dans ce conservatisme qui réserverait les emplois communaux aux seuls habitants de la commune. Surtout à une époque où il y a une grande mobilité sur le marché du travail, une grande mobilité des familles. Ce serait petit esprit.

Et cette idée de DeFI de taxer sur le lieu de travail plutôt que sur le domicile du travailleur?

C’est une approche très bruxelloise des choses, ce qui ne m’étonne pas de la part de DeFI.

Mais ça serait avantageux pour la ville de Namur, à l’échelle de l’arrondissement, de la Province, et même de la Région…

Oui, mais je m’autorise à essayer de porter une vision politique qui ne soit pas limitée aux frontières de ma commune…

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