Albert Ier, ici immortalisé dans les tranchées, à Anvers, en 1914, se révélera aussi un allié du Mouvement flamand. © GETTY IMAGES

Le 1er février 1918, Albert Ier prend le parti des flamingants

En pleine Première Guerre mondiale, le roi des Belges incarne le patriotisme. Mais il se montre aussi sensible aux revendications du Mouvement flamand. Comment? Pourquoi? Avec quels effets?

En 14 – 18, il est au top. Jamais le patriotisme belge n’a atteint de tels sommets. Sa figure de proue n’est autre que le roi. « Vive la Belgique indépendante », lance le souverain à l’aube de la bataille. Il se glisse ensuite dans son costume militaire et devient le Roi-Chevalier, véritable gloire nationale. Mais dans l’ombre, un autre mouvement monte en grade. Il se nourrit de l’amertume des tranchées comme de la stratégie de l’ennemi. Le Mouvement flamand connaît une radicalisation inédite durant la guerre. Il va aussi se trouver un allié étonnant: le roi Albert Ier!

Nous serons tous d’accord pour considérer la question flamande comme une affaire de famille.

Le contentieux linguistique est pratiquement aussi vieux que la Belgique. Au moment de sa création, le nouvel Etat se dote d’une (seule) langue officielle: le français. Logique, car au nord comme au sud, c’est la langue des élites. Mais la grogne va rapidement monter. De moins en moins, le peuple flamand va accepter de ne pouvoir communiquer en néerlandais dans les guichets d’administration, les tribunaux et les universités.

Lorsque les Allemands arrivent, ils jouent ouvertement la carte de la division. Leur conquête ne se justifie-t-elle d’ailleurs pas, en un sens, par le caractère artificiel de la victime? Et lorsqu’il apparaît que la bataille sera plus dure qu’espéré, c’est l’arme du cynisme qui est dégainée: « Nous devrons sans doute renoncer à la Belgique mais nous pouvons la détruire par l’entremise des Flamands », conspire le gouverneur général von Bissing. Se présentant comme les protecteurs des opprimés de l’Etat belge, les Allemands « néerlandisent » l’université de Gand, dédoublent les ministères et proclament la séparation administrative du pays.

Albert Ier, dans tout ça? Même auprès des flamingants, il conserve une certaine popularité. « Vous êtes le seul, ô roi, en qui nous croyons encore », lui écrivent-ils d’ailleurs dans une lettre ouverte rédigée en 1917. Le souverain semble voir dans les demandes flamandes des revendications démocratiques légitimes. Il sait aussi que leur non-prise en compte pourrait affaiblir l’Etat belge. Alors, il sort la plume. Le 1er février 1918, il écrit à ses ministres. « Nous serons tous d’accord pour considérer la question flamande comme une affaire de famille« , débute-t-il. « J’ai la conviction que l’heure est venue d’affirmer, d’une façon claire et non par des formules intentionnellement vagues, que le gouvernement est décidé à accorder au peuple flamand les satisfactions qui peuvent être jugées raisonnables. »

Quelques mois plus tard, de retour au Parlement, le roi se montre à nouveau favorable au vent du Nord. Mais il est alors peu applaudi par les parlementaires, et sera peu suivi par les ministres. Dans les années qui viennent, les revendications flamandes ne seront pas entendues. C’est aussi la raison pour laquelle elles se radicaliseront.

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