Mélanie Geelkens

La sacrée paire de Mélanie Geelkens: le pape qui n’aimait ni les chats ni les chattes (chronique)

Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

Remplir le ventre des femmes: toutes les religions ont la même obsession. Comme le démontre la récente sortie du pape François, à propos de ceux (mais surtout celles) qui préfèrent se passer d’enfant mais qui adoptent des animaux de compagnie, par « égoïsme », selon lui. Mais l’égoïste n’est-il pas celui ou celle qui procrée pour des raisons peu reluisantes ?

Maman disait toujours: « On ne parle pas sans savoir. » Et les mamans – en particulier celle-là (coucou! ) – ont toujours raison. Alors sa progéniture, par exemple, a pris l’habitude de ne pas disserter, disons, sur l’équitation, n’ayant jamais posé son séant sur un cheval. Ni sur le cours du bitcoin, n’y ayant jamais investi un centime, pas plus que sur la biochimie moléculaire, non enseignée dans les facultés de journalisme.

En tant que nullipare propriétaire d’un (très mignon) petit Vernon (1), toutes les conditions sont par contre remplies pour discuter femmes qui n’ont pas d’enfant mais qui possèdent un chat. Inintéressant? Probablement, mais pas selon ce bon vieux Jorge Mario Bergoglio (aka pape François) qui n’apprécie apparemment ni les unes ni les autres. Et qui s’étend sur des sujets qu’il ne connaît pas: il est, certes, le père de tous les enfants de Dieu mais aucun n’est issu de sa petite graine, aux dernières nouvelles, et réfléchir à Jésus non-stop laisse sans doute peu de temps pour aller promener le chien. Sa mère ne lui a-t-elle donc rien appris?

Car le souverain pontife s’est fendu, le 5 janvier, lors de sa première audience générale de l’année, d’une étonnante digression sur ceux qui refusent de procréer tandis qu’ils s’occupent d’un animal de compagnie. « On constate une forme d’égoïsme. Certains ne veulent pas d’enfant. Ils ont des chiens et des chats qui prennent la place des enfants. […] Nier la paternité et la maternité nous diminue. »

Amen? Ah, mais non. Un peu d’honnêteté, d’abord. Les mecs qui refusent de se reproduire, nul n’en a jamais rien eu à secouer. La liberté de choix leur est acquise, y compris la liberté de se barrer en cas de regret. « Oups, pardon, j’aurais pas dû faire un gosse, désolé c’est pas pour moi, je te le laisse et je vais refaire ma vie ailleurs, OK? Ciao! » Alors qu’une mère qui abandonnerait son rejeton devrait presque changer d’identité pour ne pas être lynchée. Le remord de maternité, l’un des derniers grands tabous de la société.

Donc, c’est bien du ventre des femmes qu’il s’agit. Obsession des religions. Le remplir, le remplir, le remplir, pour assigner la moitié de l’humanité aux tâches exercées depuis des millénaires.

En vérité, avant, les femmes n’avaient probablement rien de mieux à faire. Aucun autre moyen d’épanouissement, d’accomplissement que d’éduquer deux ou trois gosses – récurer les casseroles n’a rien de valorisant. Désormais, malheur!, elles étudient. Font carrière. Aiment voyager à l’autre bout du monde. Faire de l’équitation ou investir dans le bitcoin. Et ne ressentent juste pas le besoin de materner. Besoin qui n’a rien de naturel. Le soi-disant amour puissant d’une maman envers son enfant se construit, il n’a rien d’immanent.

Les trentenaires qui, à leur grand âge, n’ont pas (encore) proliféré, entendent la fameuse question – pourquoi tu ne veux pas d’enfant? – aussi régulièrement que sonnent les cloches des églises. Etrangement, personne ne songe à interroger les parents sur leurs motivations. Par envie, vraiment? Ou par pression sociale? Parce que tout le monde fait ça? Par inconscience? Pour faire plaisir? Pour toucher plus d’allocations familiales? Pour sauver une relation mal en point? Pour mettre le grappin sur son compagnon? Par crainte de vieillir seuls? Adopter un chat est, parfois, un comportement moins égoïste qu’on le croit.

(1) Hommage à la géniale Virginie Despentes, pour celles et ceux qui se poseraient la question.

La phrase

« Même notre hémicycle compte un député qui multiplie, depuis plusieurs années, harcèlement et menaces à l’encontre de son ex-femme », rapportait la députée française Clémentine Autain (France insoumise), le 6 janvier, lors des débats à l’ Assemblée nationale portant sur une loi sur les violences familiales. Elle ciblait, sans le nommer, le député Benoît Simian, qui sera jugé en mars prochain pour des faits de harcèlement, selon Médiapart. En 2020, alors que le magistrat en charge du dossier le réclamait, les députés avaient refusé de lever son immunité.

Lave toi-même!

« Instruction de lavage: donnez ce pull à votre femme, c’est son boulot », « Si le lavage devient tout à fait nécessaire, confiez cette tâche à votre maman ou à votre copine, puis allez faire du skate »… Sur TikTok, la jeune Canadienne Millie Lusson a compilé les messages douteux qu’elle avait découverts sur des étiquettes de vêtements de marques masculines. Certains dataient de plus de six ans, les plus récents de 2018. Même à l’époque, c’était déjà de l’humour sexiste.

8 000

euros d’amende et 10 mois de prison, dont cinq fermes: le chirurgien flamand Jeff Hoeyberghs a été condamné, le 4 janvier, pour avoir tenu, en 2019, des propos sexistes et misogynes alors qu’il était invité à s’exprimer devant les étudiants d’un cercle catholique gantois (lire page 22). « Vous ne pouvez pas considérer une femme comme une égale sans devenir son esclave. […] Les femmes veulent les privilèges de la protection masculine et de l’argent, mais elles ne veulent plus ouvrir les jambes », avait-il déclaré.

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