MONARCHIE - Les partisans d'une république de Flandre voient d'un oeil décontenancé le rapprochement des excellences de la N-VA avec le Palais. © © DIDIER LEBRUN/PHOTO NEWS

La N-VA en voie de belgicisation

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Le Mouvement nationaliste flamand s’inquiète ouvertement de la loyauté affichée par De Wever et les siens à l’égard du système belge. Il met la pression sur des dossiers imminents et réclame une campagne pour l’indépendance de la Flandre en 2019. Voilà pourquoi la N-VA est nerveuse…

Le gouvernement fédéral de Charles Michel doit y être attentif : la température nationaliste remonte d’un cran au nord du pays. Au moment de l’entrée de la N-VA au sein de la majorité, le 11 octobre 2014, le Mouvement flamand s’inquiétait déjà d’un risque de « belgicisation » accélérée du parti qui le représente politiquement. Cinq mois plus tard, son appréhension se confirme : la N-VA s’est loyalement intégrée dans les institutions belges, jouant le jeu voulu par le MR et respectant les bonnes pratiques de la rue de la Loi. Voilà pourquoi les langues radicales se délient désormais, pour mettre la pression sur le parti de Bart De Wever.

« La N-VA se comporte de manière très conventionnelle dans un gouvernement belge, ironise Pieter Bauwens, rédacteur en chef de Doorbraak, le magazine relais du Mouvement flamand. Il est remarquable de voir comment ses ministres se sont coulés rapidement dans le moule. Nous observons avec une certaine circonspection notre parti défendre la monarchie et le système en place. Nous nous demandons comment le chemin actuel nous mènera vers davantage d’autonomie et vers le confédéralisme. Jusqu’où la N-VA va-t-elle s’éloigner de l’article 1 de ses statuts ? »

Pour ceux qui l’auraient oublié, l’article premier de la charte de la N-VA affirme ce qui suit : « Dans sa quête d’une meilleure gestion et d’une meilleure démocratie, la N-VA choisit logiquement une République de Flandre indépendante, Etat membre de l’Union européenne. » « On en arrive à se demander si la N-VA est fiable, prolonge Pieter Bauwens. On a souvent dit d’elle qu’elle avait du caractère et qu’elle refusait le compromis. Ce à quoi l’on assiste aujourd’hui montre que ce n’est pas le cas. Le Mouvement flamand commence à considérer qu’elle va trop loin… »

« Il est encore un peu tôt pour juger définitivement l’attitude de la N-VA, analyse Bart Maddens, politologue à la KUL, inspirateur assumé du mouvement nationaliste. Mais il y a effectivement des signaux montrant qu’elle est très loyale par rapport au système. Siegfried Bracke, par exemple, n’était pas obligé de tenir le discours dans lequel il a défendu la monarchie à l’occasion de la fête du Roi. La N-VA pose très peu de questions communautaires au Parlement. Bart De Wever lui-même n’a parlé que de socio-économique et de sécurité lors de sa réception de Nouvel An. Et lors des négociations, le parti n’avait déjà pas fait de l’article 195 de la Constitution (Ndlr : qui détermine les modalités d’une révision de la Constitution) un point de rupture. »

L’exaspération des nationalistes croît d’autant plus que les libéraux francophones se félicitent chaque jour davantage de la loyauté irréprochable des excellences N-VA. « Si tous les vice-Premiers pouvaient être comme Jan Jambon », dit à qui veut l’entendre le Premier ministre. Hyperactif, le gouvernement fédéral éclipse l’action de son homologue régional flamand, présidé par Geert Bourgeois, renforçant l’image d’une Belgique forte. Quant aux courbettes des pontes nationalistes face à la monarchie, elles se multiplient, depuis la défense de la Belgique à Davos par Geert Bourgeois, saluée par le roi, jusqu’aux déclarations récentes du président de la Chambre Siegfried Bracke affirmant que « le courant passe bien » avec Philippe.

Au sein du Mouvement nationaliste, on s’étrangle. Et on confie ne pas avoir été assez conscient de l’impact de cette participation. « Ce gouvernement fait du mal aux gens, résume Pieter Bauwens. Tout le monde dit que c’est ce qu’il faut faire. Mais bien des électeurs de la N-VA commencent à se demander : est-ce pour cela que nous avons voté ? Un gouvernement sans la N-VA aurait-il pris d’autres décisions ? »

Le dossier dans Le Vif/L’Express de cette semaine. Avec :

– « La stratégie de De Wever est inopérante »

– Le Mouvement flamand attend désormais des gages de confiance

– La pression du Vlaams Belang

– 2019 : le moment de vérité

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