Philippe Maystadt

Europe : Londres n’a que le choix entre stop ou encore

Philippe Maystadt Ex-président de la BEI

Il n’y a pas de troisième voie crédible pour le Royaume-Uni.

Pendant les Jeux olympiques à Londres, un athlète sud-africain ou néo-zélandais était toujours plus applaudi qu’un athlète allemand ou français. Interrogeant mes voisins dans le stade, je reçus plusieurs fois la même réponse : « Pour nous, le Commonwealth a plus de signification que l’Europe. » Ce petit fait témoigne d’une réalité : pour beaucoup d’Anglais, l’Union européenne ne peut être qu’un accord de libre-échange parmi d’autres ; ce qui va au-delà est vu avec suspicion, voire hostilité. D’où un débat de plus en plus intense sur le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne, d’abord à Londres puis, par ricochet, dans les autres capitales. Il y a trois pistes.

1. Le Royaume-Uni quitte l’Union européenne. Scenario prôné par les « eurosceptiques ». Mais la plupart des économistes pensent qu’il comporte de sérieux risques. La Grande-Bretagne attire des investissements étrangers parce qu’elle est perçue comme une porte d’entrée vers le marché unique européen. Si le Royaume-Uni quittait l’UE, il se verrait confronté au rétablissement de droits d’entrée et d’autres barrières. Le ministre des Finances suédois prédit même que la City pourrait ne plus être le centre financier de l’Europe. De leur côté, les Etats-Unis ont cru bon d’avertir le Premier ministre britannique, David Cameron, que, si le Royaume-Uni sortait de l’Union européenne, il perdrait aussi de son influence à Washington.

2. Le Royaume-Uni reste membre de l’Union européenne, mais avec un statut adapté. Scenario préféré de M. Cameron. Les adaptations qu’il souhaite devraient rendre son pays « plus confortable » dans l’Union. Il n’a pas encore spécifié les exceptions et concessions qu’il veut obtenir mais il existe une liste de 130 mesures auxquelles le gouvernement britannique a un jour donné son accord et dont il voudrait être exempté aujourd’hui. Le Royaume-Uni a déjà obtenu de rester à l’écart de certaines avancées européennes (Schengen, union monétaire, pacte budgétaire). Si le prix exigé par M. Cameron pour rester dans l’Union est aujourd’hui de faire marche arrière et de revenir sur des accords du passé, c’est probablement un prix trop élevé. Certes, il pourrait y avoir quelques concessions symboliques (par exemple sur le temps de travail) mais le détricotage de l’ « acquis communautaire » est « un pont trop loin » ; même les meilleurs amis du Royaume-Uni sur le continent ne sont pas désireux de le franchir.

3. Le Royaume-Uni quitte l’Union européenne mais devient membre de l’Espace économique européen, qui associe à l’UE quatre autre pays : la Norvège, l’Islande, la Suisse et le Liechtenstein. Selon les partisans de ce scenario, le Royaume-Uni se libérerait du carcan législatif de l’UE mais continuerait à avoir librement accès au grand marché continental. C’est une vue simpliste. La Norvège bénéficie de cet accès à une condition : elle ne participe pas aux délibérations sur les directives relatives au marché unique mais elle doit les transposer dans sa propre législation. Comme le dit un ministre norvégien, « nous sommes de facto dans l’Union européenne, mais sans droit de vote. » Si un tel statut est plus ou moins accepté en Norvège, il est évident qu’il ne le serait pas au Royaume-Uni ; il serait considéré comme pire que la situation actuelle. Les partisans de ce scenario répliquent qu’ils ne songent pas au statut de la Norvège mais bien à celui de la Suisse. La relation de la Suisse avec l’UE est régie par 120 accords bilatéraux différents. Mais le Conseil européen a déjà décidé qu’il était exclu de suivre cette approche compliquée avec un autre pays.

Le Royaume-Uni devra donc choisir : rester membre à part entière ou quitter.

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