Enquête sur les subsides: pourquoi cathos et laïques reçoivent le plus
Les confessions reconnues (surtout catholique) et la laïcité organisée reçoivent, à travers certaines associations qu’elles patronnent, d’importants subsides facultatifs de la part des ministres de la Région wallonne et de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
La Belgique, contrairement à la France, n’a pas fait sa loi de 1905 et, contrairement à la République, elle subsidie et finance profusément les cultes reconnus ainsi que sa très spécifique laïcité organisée. Le fédéral paie les ministres des cultes et les communes ou les provinces entretiennent et rénovent leurs bâtiments. Mais parce que la Belgique est la Belgique, le financement des cultes en régime de liberté subsidiée ne s’arrête pas là.
Il a depuis longtemps quitté les lieux sacrés pour embrasser la vie profane. De nombreuses associations dont l’arrière-plan est religieux, très majoritairement catholique, mènent dans la société civile un travail qui n’est pas, ou pas prioritairement, religieux. Beaucoup ont abandonné l’étiquette confessionnelle et seuls les historiens savent que telle association à la dénomination générique (dans le genre «L’espoir pour l’enfance», ou «La maison de tous») puise dans des racines chrétiennes.
Le financement des cultes a depuis longtemps quitté les lieux sacrés pour embrasser la vie profane.
Les répertoires des subsides versés par la Région wallonne et, surtout, par la Fédération Wallonie-Bruxelles, en portent néanmoins encore un témoignage explicite, où les bénéficiaires de subventions facultatives dont le nom contient une référence religieuse se dénombrent par milliers. On y trouve, tout d’abord, des milliers et des milliers d’écoles, et d’hôpitaux, qui, prenant le nom d’un saint catholique, s’inscrivent explicitement dans la confession historiquement majoritaire. L’enseignement à tous les niveaux et les hôpitaux dans toutes les sous-régions, confessionnels ou pas, sont financés de longue date par la collectivité pour exercer ce qu’il est convenu d’appeler un service public fonctionnel. Nous épargnerons au lecteur tous les saints du calendrier. Mais même en en faisant abstraction, l’immense majorité des 756 subventions facultatives (752 en FWB, quatre en Région wallonne) adressées à des bénéficiaires dont le nom contient le terme «catholique» concerne des écoles ou des pouvoirs organisateurs, tout comme ceux – ils sont 101 – dont «chrétien» figure dans la dénomination.
ULB contre UCLouvain
Parmi ceux-ci, l’UCLouvain apparaît 218 fois et a perçu, depuis 2019, pour autant de subsides, un montant total de 14 690 000 euros de subventions facultatives de la Fédération Wallonie-Bruxelles et 614 000 euros en deux subsides de la Région wallonne. Elle battrait là sa vieille rivale laïque, l’ULB, si l’on ne s’attardait que sur ces occurrences puisque l’ULB, elle, n’est citée que 217 fois dans le cadastre de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Mais la penne l’emporte en réalité sur la calotte puisque l’ULB et les bénéficiaires, comme certains cercles étudiants par exemple, qui y réfèrent dans leur appellation, reçoivent un montant plus élevé que sa concurrente séculaire: 16 853 000 euros, auquel il faut ajouter un tout petit subside facultatif régional wallon de 5 025 euros.
Mais l’imprégnation religieuse, majoritairement chrétienne et particulièrement catholique, ne se limite pas au terrain des antiques guerres scolaires. D’autres secteurs de la société civile voient opérer des organisations à référence religieuse, et les ministres décernant des subventions facultatives, surtout en Fédération Wallonie-Bruxelles, ne peuvent ignorer cette très active foison associative.
Dans le secteur des médias, par exemple, deux stations, la Radio chrétienne francophone (RCF) de Bruxelles et la Radio chrétienne francophone de Liège émettent, notamment, grâce à de l’argent public francophone (chacune un peu plus de 10 000 euros du cabinet de la ministre Bénédicte Linard), tout comme le périodique L’Appel, magazine chrétien de l’événement, a reçu à trois reprises autour de 70 000 euros au titre d’aide à la presse. Entre appels à projets et frais de fonctionnement, la librairie auderghemoise Union et Orientation de Promotion chrétienne (UOPC) a encaissé 30 000 euros.
L’Islam marginal
L’autre segment philosophique ostensiblement perceptible dans nos répertoires est le vieil adversaire libre-penseur. En Belgique , la laïcité organisée s’est beaucoup appuyée sur des financements publics, auxquels elle émarge comme les autres cultes reconnus désormais. Ses centres de planning familial, ses associations d’aide sociale aux justiciables et aux victimes figurent à 138 reprises dans le cadastre de la FWB et reçoivent plusieurs centaines de milliers d’euros. Quant à la Fédération des amis de la morale laïque, elle a répondu fructueusement, en quatre exercices budgétaires, à deux appels à projets (de ministres socialistes).
Le Service protestant de la jeunesse a reçu un peu plus de 4 000 euros de subventions facultatives de la ministre Valérie Glatigny (MR) et le Service protestant d’éducation permanente un peu plus de 18 000 euros. Mais ce sont surtout ses centres résidentiels ou pas, pour jeunes, en difficulté ou pas, à Amougies, à Warfaaz et à Nessonvaux qui prennent, avec plus de 224 000 euros, la majeure partie de l’argent public francophone attribué à l’associatif protestant.
La relative fragmentation de la communauté juive se traduit aussi dans le cadastre, entre l’Union des progressistes juifs de Belgique (trois subsides, 2 400 euros) et le Centre communautaire laïc juif David Susskind (quatorze subventions facultatives, 204 000 euros).
Enfin, les quinze occurrences du terme islam témoignent de la relative nouveauté, dans un paysage toujours, quoi qu’on en dise, «pilarisé», de l’associatif musulman: le Collectif contre l’islamophobie (un peu plus de 30 000 euros au total) et le pouvoir organisateur de l’Enseignement confessionnel islamique en Belgique (un peu plus de 19 000 euros) en sont de rares traces. L’absence de subvention facultative à la Fédération de la jeunesse musulmane, affiliée à la fédération pluraliste Relie-F, en est un autre signal.
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