Gérald Papy

De Block et Valls face aux expulsions ou le dilemme des gouvernants

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

En Belgique comme en France, des cas d’expulsions d’étrangers suscitent de vives critiques. De la difficulté de gouverner sous le pression de l’émotion

D’un côté, Manuel Valls, ministre français de l’Intérieur, socialiste. De l’autre, Maggie De Block, secrétaire d’Etat à l’Asile, à l’Immigration et à l’Intégration sociale dans le gouvernement Di Rupo, libérale. Tous deux sont confrontés depuis quelques jours à des dossiers d’expulsions d’étrangers qui soulèvent un flot de critiques.

Léonarda, une adolescente kosovare, a été expulsée de France après avoir été arrêtée lors d’une sortie scolaire. Quelques jours auparavant, c’est un étudiant arménien, Khatchik, qui avait été reconduit dans son pays suivant un scénario similaire. En Belgique, les cas de Navid Sharifi, le « plombier afghan », et plus récemment, celui d’Aref, tué en Afghanistan après s’être vu refuser le droit d’asile et avoir accepté un rapatriement volontaire, ont interpellé et suscité le débat au-delà des clivages traditionnels entre une droite supposée répressive et une gauche présumée laxiste.

Léonarda, en France, et Navid Sharifi, en Belgique, présentaient tous les signes d’une « intégration réussie » et prometteuse d’une insertion harmonieuse dans la société européenne. C’est cette dimension qui a amplifié les critiques sur leur expulsion, au point qu’en Belgique, même la N-VA a apporté son soutien au « plombier afghan ».

Ces deux histoires illustrent le dilemme éminemment complexe auquel les gouvernants européens, quelle que soit leur couleur politique, doivent faire face, entre les impératifs d’une règle générale censée s’appliquer à tous et la spécificité, éventuelle, d’une situation concrète. Maggie De Block n’a pas tort de rappeler qu’elle « n’est pas une impératrice romaine » qui pourrait juger au cas par cas selon son bon vouloir. Jean-Pierre Chevènement, ancien ténor de la gauche française et soutien circonstanciel de Manuel Valls, a sans doute raison de clamer qu’on ne doit pas gouverner « sous la dictature de l’émotion ». Mais ces arguments souffrent en même temps des réserves. La loi ne peut-elle pas être appliquée de façon plus humaine et plus intelligente qu’elle ne l’a été en France ? L’Afghanistan, pays qui n’est pas encore totalement sorti de la guerre qui le déchire depuis 2001, recèle-t-il des zones suffisamment sûres pour y renvoyer des opposants politiques, comme le Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides, en Belgique, l’assure pour la région de Kaboul, quand on connait la menace que continuent à faire peser les taliban sur tout le pays ?

A situation complexe, pas de réponse simpliste.

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