Crise de l’accueil: un collectif d’ONG autorisé à saisir près de 3 millions d’euros sur les comptes de Fedasil

Un collectif d’ONG a reçu le feu vert de la justice pour saisir jusqu’à 3 millions d’euros sur les comptes de Fedasil, accusée de manquer à sa mission d’accueil des demandeurs d’asile.

Un collectif d’ONG belges a été autorisé à saisir jusqu’à 2,9 millions d’euros sur les comptes de Fedasil après que l’agence fédérale n’a pas rempli « sa mission d’accueillir les demandeurs d’asile », a annoncé le collectif dans un communiqué. Depuis le début de la crise de l’accueil à l’automne 2021, « Fedasil a été condamné plus de 8.800 fois par la justice belge pour ne pas avoir offert aux personnes en demande d’asile l’accueil auquel elles ont droit en vertu du droit européen et de la loi belge », expliquent les ONG. Elles ajoutent que ces multiples condamnations sont demeurées sans effet, à l’instar des astreintes imposées par la justice qui n’ont jamais été payées par l’agence fédérale.

Selon une décision de justice émise par la cour d’appel le 23 janvier dernier, les associations à l’initiative de ce recours collectif en justice sont effectivement en droit de recouvrer l’entièreté des astreintes imposées à Fedasil pour « chaque jour où un accueil n’était pas offert aux personnes en demande d’asile ». Une somme accumulée qui s’élève à 2,9 millions d’euros. « Cet argent sera utilisé sur le terrain pour combler l’inaction gouvernementale observée depuis plus de deux ans », précise le collectif.

Cette décision fait suite à l’introduction par les ONG concernées d’une « requête unilatérale », à savoir une procédure judiciaire rare qui implique notamment que la partie adverse (Fedasil dans ce cas) ne soit pas informée de l’action en cours. Dans le collectif, on retrouve le CIRÉ, BelRefugees, Vluchtelingenwerk Vlanderen, Médecins du Monde, la Ligue des droits humains, l’Ordre des barreaux francophones et germanophones, l’Association pour le droit des étrangers (ADDE), SAAMO Bruxelles, ainsi que l’organisation belge spécialisée en droit des réfugiés NANSEN. « Dans l’optique de faire respecter ces décisions de justice et pour faire face à cette situation de déni d’accueil persistante, reconnue par la justice belge, nous avons obtenu l’autorisation de saisir une somme d’argent qui sera concrètement réutilisée pour venir en aide aux victimes de cette crise« , explique le collectif.

En premier lieu, les organisations se concentreront sur l’extension de l’aide offerte par la société civile au travers d’un soutien opérationnel sur le terrain (comprenant le financement de matériel de couchage, de distributions alimentaires, ainsi que de soutien juridique et psychologique). Ensuite, en fonction des sommes réellement perçues, les ONG réfléchiront à lancer une coordination de l’accueil d’urgence en hôtel, éventuellement en coopération avec des partenaires externes.  Au-delà de pallier « l’inaction gouvernementale » en termes d’accueil des personnes demandeuses d’asile, le collectif d’ONG rappelle l’importance de respecter le principe de l’État de droit selon lequel l’exécutif ne peut pas « tout simplement » ignorer les décisions de justice qui lui sont imposées. Ce déni de justice par les autorités belges représente, selon le collectif, « un danger pour les fondements de notre démocratie ». 

« La crise de l’accueil n’est pas une fatalité. Ne pas régler cette situation est un choix politique qui va à l’encontre des droits fondamentaux et qui a été condamné de trop nombreuses fois par la justice », a déclaré la directrice générale du CIRÉ Sotieta Ngo. « Une autre politique d’accueil est non seulement possible, mais elle est urgente« , a-t-elle conclu.

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