Ferdinand Schirren, la quiétude du quotidien

Premier  » fauve  » belge et maître incontesté de l’aquarelle, Ferdinand Schirren resta – malgré sa production prolifique – dans l’ombre de son contemporain, Rik Wouters. Promenade à travers ses jardins imaginaires aux Musées royaux des beaux-arts.

Ferdinand Schirren (1872-1944) débute comme sculpteur. Un premier apprentissage, vers l’âge de 14 ans, auprès de Jean-Baptiste De Keyser l’encourage à poursuivre sa vocation sur les bancs de l’Académie de Bruxelles. Il suit les cours de Joseph Stallaert et de Charles Van der Stappen, travaille avec Jef Lambeaux, se lie d’amitié avec Philippe Wolfers… Un environnement d’emblée des plus féconds.

De sa production sculpturale, l’£uvre maitresse est sans conteste le buste d’Héléna P. Blavatsky (1898), grande dame de la théosophie décédée sept ans plus tôt. Ce portrait – initiative personnelle du jeune sculpteur – confirme sa fascination et son engouement pour ce mouvement qui tente alors d’unir les religions et de capter les forces mystérieuses de la nature. Cette représentation féminine, audacieuse et étonnante, est d’autant plus exceptionnelle que Schirren détruisit une grande partie de ses £uvres sculptées. Le cataclysme survient en 1904. Atteint d’une profonde dépression nerveuse, l’artiste se met à démolir ou mutiler la plupart des pièces qu’il a produites.

Dompter la couleur

Retiré à Linkebeek, il délaisse sa technique initiale pour se consacrer à d’autres pratiques artistiques, notamment la peinture et le dessin. Une orientation sagement suggérée par son médecin. Mais c’est véritablement dans l’aquarelle que l’artiste se révèle. Dès le début, il fait preuve d’une aisance certaine et d’une originalité de conception des plus marquantes. Il découvre aussi son leitmotiv – la couleur pure comme moyen de construction de la forme – et s’impose comme l’un des premiers peintres coloristes du XXe siècle. Son emploi des tonalités pures et vives – parfois trop véhémentes – lui vaut d’ailleurs le titre de  » premier fauve belge « , au sens chronologique du terme. Sa production, qui exclut tout recours à des contours, stimula celle de Rik Wouters, personnalité fulgurante qui représente à elle seule le fauvisme brabançon.

Si Ferdinand Schirren excelle presque instantanément à l’aquarelle, une dizaine d’années devront s’écouler pour que cette adresse se retrouve dans ses peintures à l’huile. Chef-d’£uvre de cette technique : La Femme au piano, un sujet typique de l’artiste réalisé vers 1915-1917 mettant en relief ses talents de coloriste.

Artiste complet, Ferdinand Schirren n’eut de cesse de faire évoluer ses techniques… Vers 1920, sa production apparaît davantage cérébrale, plus construite et laisse même percevoir quelques relents d’un cubisme tardif. Quant aux thèmes abordés, l’artiste semble presque invariablement recycler ceux qui tournent autour de l’intimité du quotidien : des hommes et des femmes tranquilles, des natures mortes fragiles ou encore la nature, avec toujours cette sensibilité et cette douce expression qui le caractérisent.

Ferdinand Schirren, Musées royaux des beaux-arts de Belgique, 3, rue de la Régence, à 1000 Bruxelles. Jusqu’au 4 mars. www.fine-arts-museum.be

GWENNAËLLE GRIBAUMONT

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire