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Trump positif au coronavirus: zone de turbulences pour la présidence et la campagne

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Coup de tonnerre dans la présidentielle américaine : Donald Trump a annoncé que son épouse Melania et lui avaient été testés positifs au Covid-19 et qu’ils se mettaient en quarantaine. À un mois de l’élection, où il briguera un second mandat face à Joe Biden, cette annonce pose de nombreuses questions.

Si le président est positif, il ne présente pour l’instant que des symptômes bénins du coronavirus, selon le New York Times . Il s’agirait de symptômes similaires à ceux d’un rhume. Jeudi, le président a pris part à un événement de collecte de fonds dans le New Jersey. Selon le journal, il y serait apparu comme « apathique ».

« Le président et la Première dame vont tous les deux bien à cette heure, et ils prévoient de rester chez eux durant leur convalescence. L’équipe médicale de la Maison Blanche et moi-même allons maintenir une surveillance étroite, et j’apprécie le soutien apporté par certains des plus grands professionnels médicaux et institutions du pays », a indiqué Sean Conley, médecin de la Maison Blanche.

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Les collaborateurs qui travaillent au sein de la West Wing sont testés quotidiennement, comme les journalistes qui se rendent sur place ou voyagent avec le président. Plus tôt dans la soirée, Hope Hicks, proche conseillère du président qui était notamment du voyage, à bord d’Air Force One, pour le débat à Cleveland, puis le lendemain dans le Minnesota pour un meeting de campagne, a annoncée être infectée. « Elle porte souvent un masque mais elle a été testée positive », avait indiqué Trump dans la soirée, précisant que Melanie et lui passent « beaucoup de temps » avec elle. Il a laissé entendre que sa conseillère pourrait avoir contracté le coronavirus au contact de soldats ou de membres des forces de l’ordre.

Hope Hicks, proche conseillère du président Trump.
Hope Hicks, proche conseillère du président Trump.© AFP

Menace sur la santé d’un président en exercice

Le diagnostic représente la plus grave menace connue pour la santé d’un président américain en exercice depuis des décennies, indique CNN. À 74 ans et en surpoids, Donald Trump appartient à la catégorie la plus à risque de complications graves du coronavirus. Son administration doit donc traiter son infection comme une crise potentielle. Le vice-Président Mike Pence a reçu le résultat de son test: il est négatif. Mais que se passerait-il s’il devait contracter le virus avant que Trump soit rétabli ? Le 25e amendement des Etats-Unis accorde à l’administration le pouvoir de transférer temporairement l’autorité au vice-président si le président est médicalement empêché. Trump pourrait alors reprendre le pouvoir de la présidence quand bon lui semble.

Si les deux hommes tombaient gravement malade en même temps, cela créerait une crise constitutionnelle sans précédent. Depuis que l’amendement a été ratifié en 1967, cela n’est arrivé que trois fois, précise le New York Times. En 1985, le président Ronald Reagan a subi une coloscopie et a brièvement cédé le pouvoir au vice-président George Bush, bien qu’il n’ait pas explicitement cité l’amendement en le faisant. Le président George W. Bush a invoqué l’amendement à deux reprises en remettant temporairement le pouvoir au vice-président Dick Cheney lors de coloscopies en 2002 et 2007.

En vertu de la loi, si Trump et Pence ne pouvaient pas exercer leurs fonctions en même temps, cela reviendrait à la présidente de la Chambre des représentants, la démocrate Nancy Pelosi, grande rivale du président. Au printemps, la Maison Blanche a déclaré qu’elle n’avait pas de plan pour une telle éventualité.

Présidents malades : plus rare de nos jours

Durant l’histoire, de nombreux présidents sont tombés gravement malades pendant leur mandat, y compris lors d’épidémies. George Washington a frôlé la mort lors d’une épidémie de grippe au cours de sa deuxième année à la présidence, tandis que Woodrow Wilson est tombé malade lors des pourparlers de paix après la Première Guerre mondiale.

Quatre présidents sont morts en fonction de causes naturelles : William Henry Harrison, Zachary Taylor, Warren G. Harding et Franklin D. Roosevelt, tandis que Wilson a subi un grave AVC et que Dwight Eisenhower a eu une crise cardiaque lors de son premier mandat et une attaque lors de son second. Quatre autres personnes ont été assassinées pendant leur mandat : Abraham Lincoln, James A. Garfield, William McKinley et John F. Kennedy.

Mais de telles crises sanitaires à la Maison Blanche sont plus rares ces derniers temps. Aucun président n’a été confronté à une évènement potentiellement mortel (maladie, tentative d’assassinat…) pendant son mandat depuis 1981.

Remous dans la campagne… et dans le pays

Il ne reste plus qu’un mois avant l’élection et, à moins que le président n’ignore les procédures de quarantaine recommandées par le Centre pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), il passera les deux prochaines semaines en isolement. Cela signifie que le prochain débat pourrait être annulé, ainsi que tous ses rassemblements pendant cette période.

Trump positif au coronavirus: zone de turbulences pour la présidence et la campagne
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Le test positif de Trump fait également craindre que Joe Biden, qui a également un profil à risque, n’ait également été exposé lors du débat mardi soir. Cleveland.com indique que, si des précautions sanitaires ont été mises en place pour le débat, certains participants ne les ont pas respectées tout au long de l’événement.

Peu après l’annonce, la Maison Blanche annulé déplacement en Floride prévu pour un meeting de campagne et une collecte de fonds à Washington. Donald Trump devrait pouvoir continuer à exercer ses fonctions présidentielles « sans perturbations », indique le médecin de la Maison Blanche. Mais son infection pourrait s’avérer déstabilisante dans un climat politique déjà tendu. Les marchés boursiers ont d’ailleurs chuté dès l’annonce de son test positif.

Parfum d’ironie

Certains n’ont pas tardé à pointer l’ironie. La gestion de l’épidémie, qui a fait à ce jour plus de 207.000 morts aux Etats-Unis, vaut à Donald Trump de très vives critiques, de la part de ses adversaires mais aussi de scientifiques et de certains élus de son propre camp. Il est accusé d’avoir envoyé des signaux contradictoires et confus, mais aussi d’avoir manqué de compassion face aux ravages provoqués par le virus. Sondage après sondage, une très large majorité d’Américains jugent sévèrement son action sur ce front.

Donald Trump minimise les dangers du coronavirus et se moque même depuis le début de la campagne de la prudence de Joe Biden sur le sujet. Lors de leur premier débat, il a notamment dit : « Je ne porte pas de masque comme lui. A chaque fois que vous le voyez, il porte un masque. Il pourrait parler à 60 mètres de moi, il se montrerait avec le plus grand masque que j’ai jamais vu. »

Le président a par ailleurs affirmé plusieurs fois ces dernières semaines que la maladie était « en train de disparaitre », bien que même les experts de la santé au sein de sa propre administration aient déclaré que ces affirmations ne reflétaient pas la réalité. Sa propre infection met en doute sa parole et sa connaissance du sujet, et va notamment saper sa pression pour que les États rouvrent les écoles et les entreprises. Cependant, si le président reste asymptomatique ou presque, alors qu’il présente un profil à risque, cela pourrait bien renforcer son discours minimisant le coronavirus.

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