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Coronavirus: pourquoi autant de morts en Italie ?

Caroline Lallemand
Caroline Lallemand Journaliste

L’Italie est le pays d’Europe le plus touché par le nouveau coronavirus. Depuis le début de l’épidémie, la péninsule a enregistré plus de 9 000 cas positifs, dont plus de 460 décès. Une question se pose, comment se fait-il que la Botte soit aussi touchée et compte autant de victimes ?

L’Italie vit une situation jamais vue dans le monde : tout le pays est mis en quarantaine pour éviter la propagation du nouveau coronavirus. 60 millions de citoyens sont confinés jusqu’au 3 avril. Depuis le début de l’épidémie, les nombres de personnes contaminées se sont multipliés à grande vitesse. L’Italie compte de nombreux morts suite au virus (plus de 460) . Il existe plusieurs explications à ce tableau peu réjouissant.

Une population âgée

La moyenne d’âge de la population italienne est assez élevée. Elle est la plus âgée d’Europe, et la deuxième plus âgée de la planète, derrière le Japon, indiquent les dernières données publiées par l’ONU. Près d’un Italien sur quatre est âgé de 65 ans ou plus, relève le New York Times. Quant à l’âge médian, il est de plus de 47 ans (contre 42 en Belgique).

La maladie est bénigne dans l’écrasante majorité des cas (plus de 80%), mais elle s’avère particulièrement dangereuse, voire mortelle, pour les personnes âgées déjà fragilisées par d’autres pathologies. Selon les premières études effectuées par les autorités sanitaires chinoises, les patients déjà atteints de maladies cardiovasculaires sont les plus menacés par le virus, devant les diabétiques ou les personnes souffrant de maladies respiratoires chroniques ou d’hypertension, rapporte Franceinfo. Nulle part ailleurs dans le monde, le taux d’infection et de mortalité n’a augmenté aussi vite qu’en Italie.

Le taux de mortalité du Covid-19 augmente avec l’âge, et atteint 14,8% chez les personnes contaminées de plus de 80 ans. Le taux de mortalité en Italie se situe aux alentours des 4% alors que le Covid-19 a pour sa part une mortalité évaluée entre 1 et 3%, selon les sources. Le Center for Disease Control (CDC) chinois rapporte une mortalité de 2,3%, qui varie beaucoup entre le foyer épidémique du Hubei (2,9%) et le reste de la Chine (0,4%).

quarantaine coronavirus
quarantaine coronavirus© Reuters

Une gestion de crise défaillante

L’Italie a connu de graves manquements dans sa procédure de détection du premier cas de coronavirus en Lombardie, et plus précisément à Codogno, la ville d’où est partie l’épidémie. Le premier cas, dit le « patient zéro », n’a pas été repéré et isolé, ce qui a mené à des contaminations en série pendant de nombreux jours sans qu’aucune mesure ne soit prise par les autorités.

En plus de ce retard dans la prise de mesures contre la propagation du virus, la gestion sanitaire de la crise est remise en cause. De nombreux observateurs critiquent le manque de coordination entre les régions (notamment la Lombardie et la Vénétie), du personnel soignant infecté (au nord, jusqu’à 10% de l’ensemble des malades en font partie).

Ce retard s’explique par le système italien régionalisé, est d’avis Frédéric Bizard, économiste de la santé interviewé sur RTL. « Le virus, lui, ne connaît pas les frontières régionales (…). Ces deux régions sont dirigées par la Ligue du Nord, et il y a eu une volonté de gérer [l’épidémie] à l’échelle régionale sans un transfert immédiat des informations », explique-t-il.

Des hôpitaux saturés

De nombreux médecins à travers le pays rapportent que le système de santé est à ce jour saturé, avec des choix éthiques très difficiles à faire pour le personnel soignant, à cause du manque de place et de matériel dans les hôpitaux. Le docteur Christian Salaroli, anesthésiste-réanimateur dans un hôpital de Bergame en Lombardie explique dans un entretien au quotidien Il Corriere della Sera que les médecins doivent aujourd’hui choisir qui soigner « en fonction de l’âge et de l’état de santé, comme dans les situations de guerre« .

Le médecin précise que l’urgence est telle face au coronavirus que lui et ses collègues doivent à présent sélectionner, parmi les malades les plus graves, ceux qui pourront ou non accéder à une réanimation mécanique (par intubation). Les patients atteints d’une pneumonie virale, en insuffisance respiratoire aiguë, sont d’abord placés sous ventilation non invasive (VNI), à l’aide d’un masque à oxygène. « C’est une première étape, mais après quelques jours, nous sommes obligés de choisir. Comme il y a malheureusement une disproportion entre les ressources hospitalières, les lits en réanimation et les malades en stade critique, tout le monde ne peut pas être intubé« , reconnaît le médecin. « On décide en fonction de l’âge et l’état de santé. Si une personne entre 80 et 95 ans a une grave insuffisance respiratoire, il est vraisemblable qu’on ne poursuivra pas. Si elle a une insuffisance multi-organique, de plus de deux ou trois organes vitaux, cela signifie que son taux de mortalité est de 100%. C’est perdu« , poursuit-il.

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