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Repenser l’enseignement: ces leçons pour l’école qu’il ne faut pas oublier (analyse)

Soraya Ghali
Soraya Ghali Journaliste au Vif

La crise du Covid sera-t-elle une parenthèse ou un tournant dans l’histoire de l’enseignement ? Nul ne peut encore le dire. Face aux consignes sanitaires, l’école va pourtant devoir se réinventer à court et moyen terme. Le coronavirus a mis en lumière et exacerbé des problèmes qui lui préexistaient. Mais il peut aussi être une occasion de se débarrasser de ce qui est devenu obsolète.

Après quatre mois d’école en pointillés, c’est une rentrée « en vrai », placée sous le code jaune, soit le niveau 2 sur une échelle de 4, correspondant à une transmission du virus limitée, qui arrive. Tous les élèves reprennent les cours de façon obligatoire, à temps plein et en classe entière. Ils ne seront donc plus présents par roulements dans la semaine, ni regroupés par « bulle ». Et à partir de 12 ans, chacun doit être muni de l’accessoire anti-Covid, le masque, dans les espaces clos, les salles de classe, les couloirs. Le mot d’ordre du protocole sanitaire, redéfini mi-août dans une circulaire de 27 pages, est clair : « Accorder la priorité aux enjeux psychosociaux et éducatifs et permettre aux enfants et aux adolescents la fréquentation de l’école », indique Caroline Désir (PS), ministre de l’Enseignement.

Avec la classe inversée, « l’enseignant devient le coach d’une communauté d’apprenants. Il n’est pas un répétiteur, il est un propagateur de savoirs.

Drôle d’école, tout de même. Parce que s’il s’agit d’un retour en tout présentiel de la maternelle à la rhéto, ce n’est quand même pas une rentrée normale, comme les autres. Mais ce qui s’est produit au cours de ces mois inédits devrait forcer à imaginer l’école postconfinée, knock-out, à panser les plaies là où elles apparaissent, aujourd’hui, les plus profondes, à oser traiter le mal à la racine tant pour les élèves que pour les enseignants.

Bien sûr, la crise sanitaire a révélé de multiples failles, que Le Vif/L’Express passe en revue ci-après. Or, de l’avis de tous, il y aura un avant et un après. Benoît Galand, professeur à la Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation à l’UCLouvain, le constate aussi : « On sent un bouillonnement d’idées. » Ainsi, alors que la plupart des professeurs n’avaient jamais enseigné en ligne, d’un coup, tout le monde est désormais sensibilisé, en particulier ceux qui y étaient indifférents. Et ce n’est pas rien. Cette irruption massive du numérique dans l’enseignement n’est sans doute pas le seul effet à long terme de la crise.

Le Covid-19 a aussi montré cyniquement des inégalités entre les familles, et pas seulement numériques. Au point que personne ne peut plus faire semblant de ne pas les avoir vues. Résumer le décrochage des élèves de milieu populaire – on avance un taux de 25% de décrocheurs – au manque d’équipement numérique, c’est oublier d’autres problématiques, économique, sociale, culturelle, qui touchent ces populations et qui expliquent, en grande partie, leur éloignement de l’institution scolaire. Autrement dit, pointent les experts, on pouvait s’attendre à ce que ces élèves décrochent.

La crise a enfin mis en évidence que la classe d’aujourd’hui et sa configuration demeurent un modèle d’un autre temps. Seules des considérations économiques justifient encore de maintenir des classes de 25, 26, 28 élèves. Mais, « si l’on recommence exactement comme avant, on aura une école qui enseigne mais qui n’aura rien appris », alerte Bruno Humbeeck, psychopédagogue et chercheur à l’UMons, auteur de Les Leçons de la pandémie. Réinventer l’école ? (éd. De Boeck), à paraître en septembre.

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Aucun professeur n’est formé à l’enseignement à distance

« Soyons honnêtes : aucun prof n’était prêt à vivre ça, assure, sous couvert d’anonymat, une enseignante bruxelloise. A un moment ou un autre, on s’est tous retrouvés en difficulté. Mais dire qu’on n’y arrive pas reste un tabou. »

Un constat, sûr et partagé : la communauté éducative n’était pas préparée à l’enseignement à distance. Comment transmettre sans être face aux élèves, sans les voir en chair et en os ? Quelle quantité de travail envoyer pour ne pas les noyer ? Faut-il privilégier les cours en visioconférence, les vidéos mises en ligne ou bien les cours en PDF pour qu’ils aient une trace écrite ? Autant de questions auxquelles les enseignants ont dû faire face seuls et sans aucun entraînement.

Parce que, jusqu’alors, l’école et les professeurs estimaient tout simplement qu’ils n’en avaient pas besoin. L’institution scolaire privilégie toujours les cours en présentiel, magistraux, avec un enseignant face à un groupe d’élèves, tels qu’ils existent depuis des décennies. « Ce modèle date en réalité de la fin du XVIIe siècle, héritier des écoles chrétiennes de Jean-Baptiste de La Salle, note Bruno Humbeeck. Il est trop souvent devenu, pour des raisons historiques et de rentabilité économique, la norme pédagogique. « En clair, il s’est systématisé pour se donner les moyens de « prêcher » devant le plus grand nombre possible d’élèves.

Or, donner cours à distance, ça ne s’improvise pas. Cet enseignement oblige à repenser, à scénariser complètement le cours et sa progression, en concevant des activités que l’apprenant peut faire à distance, tout en préservant des moments d’échange en direct et de retours sur ces exercices. A distance, il faut aussi anticiper les difficultés des élèves afin de ne pas les bloquer dans leur apprentissage, le temps d’obtenir une réponse ou une aide de l’enseignant. Tout en gardant à l’esprit que les enfants doivent travailler sans les contraintes scolaires, c’est-à-dire un horaire, une salle de classe, un prof… Ce qui exige de les y préparer eux aussi.

Ainsi, sauf dans quelques cas expérimentaux, rien n’était prêt et la « continuité pédagogique » a plus tenu à des bricolages. Finalement, les profs qui concevaient déjà leurs cours en mode « classe inversée » sont sans doute ceux qui possèdent une culture de l’enseignement à distance et qui s’en sont bien tirés. Un modèle qui pourrait rapidement se développer, tant il suscite actuellement un intérêt accru.

Le principe, en bref : l’enseignant met les leçons à disposition sur des espaces numériques de travail (ENT) – des textes, des images, des capsules vidéo, des quizz, ou n’importe quel support de connaissances (un livre, par exemple). Avant le cours, chez lui (ou à l’école s’il ne dispose pas de matériel à la maison), l’élève visionne ou consulte le contenu des documents et intègre la théorie. L’intérêt du dispositif réside dans le temps d’échange libéré, avec un enseignant disponible, pour les travaux et les exercices. Ainsi, selon les résultats aux questionnaires, le professeur forme les groupes d’élèves qui vont travailler ensemble en classe.

Diriger les devoirs à l’école ? Au fond, les élèves sont rarement en activité durant le cours et les enseignants se privent d’interactions réelles reflétant le niveau des élèves puisqu’ils ne les voient pas travailler… « L’enseignant devient le coach d’une communauté d’apprenants. Il ne débite plus son cours à un bloc d’élèves, expose Bruno Humbeeck. L’enseignant n’est pas un répétiteur, il est un propagateur de savoirs. Il n’est pas en classe pour « dire » des leçons, mais bien pour faire en sorte que les apprentissages se réalisent chez chaque élève à travers ce qu’il les invite à faire, entre eux, sous son regard qui les guide, et, avec lui, en s’appuyant sur son expertise. » Pour le chercheur, une pédagogie inversée bien pensée permet même de réduire les heures de transmission, pour ne faire en classe que des activités significatives.

On sent un bouillonnement d’idées.

Les études, bien que peu nombreuses, montrent des résultats positifs sur les élèves en difficulté. Sans être un remède miracle : celui qui ne fait pas ses devoirs chez lui n’aura pas plus envie de visionner un cours sur Internet. Et en classe, il ne profitera pas de la disponibilité de son enseignant puisqu’il devra d’abord regarder le cours.

Face au Covid-19, l’enseignement pas très Net

Aux professeurs mal préparés à enseigner à distance s’ajoutent des fragilités numériques et technologiques. Ce n’est pas une surprise, elles préexistaient. Ainsi, le très faible usage pédagogique des espaces numériques de travail (ENT) en est un bon révélateur. ENT, sites Web des établissements, messagerie et plateforme du logiciel Pronote, etc. : les infrastructures simples permettant d’hybrider présentiel et distanciel sont à disposition dans une grande majorité des établissements, mais ne sont pas utilisées à leur plein potentiel en cours d’année.

Malgré la succession de plans numériques, la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) accuse un sérieux retard par rapport à d’autres pays et d’autres régions, comme la Flandre. La crise sanitaire l’a brutalement mis en lumière. Elèves ne disposant pas d’ordinateurs (ou, pour seul outil, un smartphone) ni d’une connexion de bonne qualité, enseignants tout autant dépourvus, ne maîtrisant pas les compétences numériques ou tâtonnant pour faire au mieux – beaucoup ont dû s’appuyer sur les compétences et les conseils de collègues déjà mobilisés sur le numérique. Ces plans numériques continuent, jusqu’ici, à privilégier l’installation de salles informatiques dans les écoles. D’après les estimations de la FWB, on compte environ un ordinateur pour neuf élèves en Wallonie, et un pour onze à Bruxelles

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Mais l’enjeu n’est pas qu’informatique. Il touche aussi la pédagogie, sa consistance, son contenu. Confrontés à une multitude d’offres numériques, les enseignants s’avouent parfois perdus. Or, une réflexion qualitative sur les usages pédagogiques du numérique devrait primer, en se demandant si et comment on hybride présentiel et distanciel en fonction des disciplines, des objectifs, des localités, du profil des élèves, du niveau de maîtrise des enseignants, etc.

On sait aussi que ce sont surtout des acteurs privés d’Internet qui ont suppléé à une partie des carences des plateformes d’enseignement. Il n’y a rien de « virtuel » à utiliser Zoom, Teams, WhatsApp ou Google Classroom. Personne n’ignore que ces services ne respectent pas la neutralité commerciale de l’éducation et, surtout, la protection des données personnelles des élèves et des familles. Ces choix, autant technologiques que politiques, ne peuvent être laissés qu’aux enseignants et aux directions d’établissement, auxquels d’ailleurs nul ne songe à demander des comptes.

Pour que l’école ose le numérique, il faut que l’évaluation des élèves change.

Jusqu’à présent, en tout cas, la FWB ne propose aucune stratégie d’éducation numérique. Depuis la mise sur pied du nouveau gouvernement, il y a un an, le dossier n’a guère progressé. Les membres du Comité interréseaux numérique éducatif (Ciné) prévu dans le Pacte d’excellence n’ont pas encore été désignés, aucune réunion n’a encore eu lieu.

Dans l’urgence, son ministre-président, Pierre-Yves Jeholet (MR), et la ministre de l’Enseignement ont annoncé, en mai dernier, le lancement d’un groupe de travail dédié au numérique à l’école, qui planche sans experts, au sein des cabinets compétents, parce qu’il faut aller vite. Peu d’avancées, pourtant. En juin, ils ont invité l’équipe d’Educit, une asbl active dans l’enseignement numérique et dont l’expérience pourrait servir de source d’inspiration et être déployée à l’échelle de la FWB. Son approche : équiper en priorité tous les élèves (et non l’école) d’ordinateurs portables à un prix abordable (un Chromebook de 300 euros). Comment ? Par un modèle de cofinancement où les parents paient une location de 20 euros par trimestre durant trois ans et une contribution des pouvoirs publics comprise entre 25 et 30 euros par élève et par an.

La stratégie, elle, repose sur trois piliers : une mise à disposition d’un ordinateur identique à chaque élève d’une même classe selon un financement public-privé, une formation et un accompagnement individuels des enseignants, et la mise en place d’une plateforme commune de communication entre enseignants et élèves, pour éviter un éparpillement où des profs envoient leurs travaux sur le site de l’école, sur Whats-App, d’autres via un mail. En juillet, Willy Borsu (MR), ministre wallon chargé du numérique, a donné son accord pour financer les Chromebook. On attend encore celui de la FWB…

Pour que l’école ose le numérique, il faut d’abord revoir l’évaluation

« Le numérique casse les frontières disciplinaires, la verticalité de la classe, relativise certains savoirs qu’on peut retrouver en trois clics, observe John Rizzo, spécialiste de l’apprentissage par l’informatique et de l’enseignement mutuel, auteur de Sauver l’école ? (Ker éditions, 2015). Pour que l’école ose le numérique, il faut que l’évaluation des élèves change. » Selon lui, une fois qu’on aura dépassé une évaluation qui, trop souvent, veut que l’élève restitue des savoirs, on pourra passer au travail collaboratif, la recherche sera valorisée et la pédagogie pourra changer.

Les élèves ne vont pas être moins intelligents parce qu’ils seront restés plusieurs mois à la maison. Ils risquent simplement d’être moins instruits.

Une vision que partage Bruno Humbeeck, soucieux de promouvoir une évaluation formative, c’est-à-dire non sanctionnée par une note, au lieu de l’actuelle évaluation « normative », qui mesure une performance en référence à un niveau fixé pour tous. Cela implique que les professeurs soient formés à la pratique d’une évaluation formative (mettant en évidence la capacité à manier les savoirs et à progresser), qui, aujourd’hui dans les classes, dérive trop souvent vers une simple interro écrite blanche.

Ainsi, à la veille de la rentrée, les enseignants sont incités à établir un diagnostic des compétences et des lacunes de leurs élèves. Mais il ne s’agira ni de tests ni d’évaluations sommatives. Par exemple, dans l’enseignement secondaire libre catholique, les établissements devront mettre en place, d’ici au 15 octobre, des dispositifs de différenciation et d’adaptation des apprentissages.

« Il est indispensable que chaque élève soit en mesure d’effectuer le bilan de ce qu’il connaît, de ce qui, dans ses connaissances, reste flottant et de ce qu’il ne maîtrise pas du tout parce qu’il ne le comprend pas ou ne parvient pas à l’assimiler », analyse Bruno Humbeeck. Et ce, pour « éviter de faire des remédiations « à la grosse louche ». Ces remédiations, médiocres dans la forme, superficielles dans le fond, ne font jamais que profiter aux enfants qui vivent dans un environnement plus favorable. Quant aux autres, ils feront comme ils le pourront… Et si la remédiation, mal calibrée, échoue, ils seront coupables deux fois : coupables d’avoir pris du retard sur les autres et coupables, en plus, de ne pas être en mesure de profiter du dispositif d’accompagnement qui a été mis à leur disposition…  »

Repenser l'enseignement: ces leçons pour l'école qu'il ne faut pas oublier (analyse)
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Par ailleurs, la FWB a prévu dix-sept millions d’euros pour financer des heures de cours supplémentaires dans les écoles à faible indice socio- économique. Les autres devront se débrouiller…

… et alléger les programmes

Avec la pandémie, on a assisté à un allégement spectaculaire des programmes. « Par la force des choses, il ne s’agissait plus de boucler le programme mais d’avancer comme je le pouvais avec mes élèves en alternant découvertes et consolidations de notions », témoigne un enseignant de sciences. Ce professeur et nombre de ses collègues ont constaté qu’il n’est pas besoin de « tout » voir dans le programme, en survolant donc des chapitres, pour que l’enseignement soit utile dans la poursuite des études.

Pas d’illusion, toutefois, la matière non vue restera non vue. Tout n’est pas rattrapable. « Les élèves ne vont pas être moins intelligents parce qu’ils seront restés plusieurs mois à la maison. Ils risquent simplement d’être moins instruits », rassure le chercheur Bruno Humbeeck. Interrogée, la ministre suggère de « redéfinir les essentiels » et de faire l’impasse sur des « points non fondamentaux des programmes ». C’est le travail mené actuellement dans les établissements scolaires : dégager les notions essentielles à maîtriser pour chaque année d’études, dans chaque discipline.

Travailler par « bulles » de douze et revoir la configuration de la classe

Cette consigne sanitaire, en vigueur lors de la réouverture partielle des écoles en mai dernier, rejoint parfaitement les recommandations pédagogiques – à commencer par celles du terrain. « Douze, c’est le chiffre magique, et travailler en bulle se révèle profitable en milieu scolaire », répond Bruno Humbeeck. Simplement, parce que ce nombre permet à un groupe de fonctionner efficacement et confortablement. Un effectif moindre en classe conduit à une hausse des scores de réussite pour tous les élèves. Un effet garanti au primaire, particulièrement pour les élèves de milieux modestes et en difficulté scolaire. Durable, aussi, pour peu que les enfants restent dans une classe à effectif réduit au moins deux à trois ans.

Sur la question « réussit-on mieux dans les petites classes ? », les recherches sont convergentes. Mais elles le sont beaucoup moins lorsqu’il s’agit de savoir pourquoi on y réussit mieux. Est-ce lié aux méthodes pédagogiques ? A la gestion de classe ? Au comportement des élèves ? Une chose est sûre, pour Bruno Humbeeck : « Les élèves sont plus actifs, engagés dans leurs tâches. Ils osent poser des questions, même ceux qui habituellement se tiennent en retrait, et interagir entre eux ainsi qu’avec l’enseignant. C’est aussi plus de temps pour l’enseignement mutuel, c’est-à-dire que les élèves apprennent les uns des autres, collaborent entre eux. Enfin, c’est encore moins de temps, pour l’enseignant, à devoir gérer la classe. »

A ses yeux, maintenir une bulle de douze en classe n’exige pas plus de moyens, dès lors qu’on n’oblige pas les professeurs à répéter plusieurs fois la matière. Et ce, en travaillant autrement, en classe inversée, en s’appuyant sur le numérique et en réduisant le temps de présence à l’école.

A chaque mode de travail, sa configuration de classe adéquate. Pour favoriser le travail collaboratif et celui en petit groupe, d’aucuns préconisent la classe flexible. En résumé, il s’agit d’organiser la classe et les postes de travail pour que les élèves puissent travailler debout, assis, couchés, dans la position qui leur semble naturelle. Finies les classes « autobus », des bancs sur lesquels les élèves sont sagement assis. Mais, par exemple, des pupitres à roulettes pour pouvoir être disposés en îlots, en U, en cercle, poussés contre les murs. Ou, encore, des panneaux coulis- sants permettant d’aménager l’espace. « Une classe flexible permet l’individualisation, souligne Benoît Galand. Car les élèves ne travaillent plus tous sur la même matière au même moment. »

Nous tenons là l’occasion de restituer aux parents un rôle éducatif qui ne s’arrête pas à la porte de l’école, dans une collaboration bien pensée avec les enseignants et l’institution.

De nouvelles relations durables ?

Si la fermeture des écoles a souvent été éprouvante et déstabilisante, des élèves et des professeurs en retirent des éléments positifs, notamment dans l’amélioration de leurs relations. En quoi celles-ci se sont-elles modifiées ? « Plus de communication et de compréhension. Les profs sont plus attentionnés, humains, affirme Nathan, 16 ans. On est aussi devenus plus autonomes. » La grande majorité des enseignants ont gardé, vaille que vaille, le lien avec leurs élèves. Ils ont parfois endossé une casquette de « coach », pour éviter à un public fragile de sombrer. « Des élèves ne pouvaient pas travailler, car le matériel à la maison était obsolète ou inexistant, les parents eux-mêmes étaient en difficulté, certains élèves s’occupaient des frères et soeurs, car les parents travaillaient… » , détaille Nathalie Crahay, enseignante en 2e secondaire.

Repenser l'enseignement: ces leçons pour l'école qu'il ne faut pas oublier (analyse)
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Emotionnellement lourde, cette période de confinement a ainsi permis, dans certains cas, de créer des liens entre parents et enseignants. Avec la projection de l’école à la maison, tout change et la place des parents a émergé. On sait que les systèmes éducatifs ne leur attribuent la même place à tous et, qu’en Belgique, ils sont des partenaires latéraux de l’école. Un constat alors, et une fois encore partagé : seule l’alliance enseignants, parents et élèves est susceptible de garantir l’efficacité éducative. « Nous tenons là l’occasion de restituer aux parents un rôle éducatif qui ne s’arrête pas à la porte de l’école, dans une collaboration bien pensée avec les enseignants et l’institution », conclut Bruno Humbeeck.

École et pandémie

  • Selon une étude (toujours en cours) menée par l’UMons auprès de plus de 500 enseignants durant le confinement, 12 % déclarent être mal équipés et près de 60 % affirment qu’ils ont dû se former à utiliser certains outils numériques.
  • Plus de 60 % disent ressentir le besoin d’une formation spécifique.
  • 30,6 % ont cherché à contacter leurs élèves de manière individuelle plusieurs fois par semaine (33,3 % de manière collective).
  • Près de 30 % ont utilisé les réseaux sociaux (Facebook, Messenger, WhatsApp…) et les outils de téléconférence (Zoom, Skype…) pour communiquer avec leurs élèves.
  • 45 % ont abordé de nouvelles notions durant le confinement, sans respect des circulaires ministérielles qui interdisaient l’enseignement de nouveaux contenus.
  • 46,4 % comptent débuter l’année scolaire différemment des années précédentes (31,9 % ne savent pas encore comment).
  • 72,1 % continueront à utiliser les nouveaux moyens d’enseigner ou conserveront de nouvelles habitudes d’enseignement.
  • 98,9 % seront contents de retrouver le contact avec leurs élèves en présentiel dès la rentrée.

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