Anne-Sophie Bailly

La méfiance, l’autre virus à terrasser

Anne-Sophie Bailly Rédactrice en chef

L’annonce d’un vaccin efficace donne une bouffée d’espoir à la population mondiale. Et pourtant, la réception par le public de cette vaccination à grande échelle apparaît en demi-teinte en Belgique avec seulement 70% de la population prêts à se faire vacciner. Le prochain défi sera donc de terrasser cet autre fléau qui contamine tout autant: la méfiance.

« On va mettre un terme à cette épidémie. » Ugur Sahin, le patron de BioNTech, a prononcé la phrase attendue depuis des mois, par tous. Depuis que Pfizer et la société biotech allemande, suivis de Moderna quelques jours plus tard, ont annoncé que l’efficacité de leur candidat vaccin contre la Covid dépassait les 90%, une bouffée d’espoir a envahi la population mondiale. Celui de renouer dans un futur plus ou moyen proche avec une vie qui ne serait plus régie par un virus. De retrouver des libertés si longtemps entravées, de fermer une parenthèse trop souvent douloureuse. L’espérance aussi que par leur parcours de vie, Ozlem Türeci et Ugur Sahin, le couple fondateur de BioNTech , apportent la preuve aux derniers sceptiques que de l’immigration, l’intégration et la diversité naissent de grandes choses. Qui bénéficient à tous.

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Le recours à une technologie innovante, dite de l’ARN messager, est également source d’optimisme pour toutes les biotechs – wallonnes notamment – qui cherchent, testent, creusent, doutent, cherchent encore et pour lesquelles la pertinence de l' »open innovation » vient de trouver une concrétisation. Ces notes d’espoir charrient dans leur sillage un lot d’incertitudes. Celles, techniques, liées plus spécifiquement à la production et à la distribution des fameux vaccins au nom de code BNT161b2 et mRNA-1273. Et, surtout, celle de la réception par le public de cette vaccination à grande échelle. Manque de recul sur la technologie utilisée, peur des effets secondaires, essais cliniques jugés trop rapides. Aujourd’hui, seuls 70% des Belges seraient prêts à se faire vacciner.

Le prochain défi sera donc de terrasser cet autre fléau qui contamine tout autant la population: la méfiance. Les autorités du pays ont posé de premiers jalons en ce sens. Echaudée par la saga des masques et l’émoi autour de l’éparpillement des compétences en matière de santé, l’équipe De Croo a choisi de dépasser le cadre communautaire et opté pour une vaccination gratuite et volontaire, gérée par une plateforme commune du nord au sud du pays. La création d’une cellule « débat sociétal » et « communication » a également été actée.

Un « débat sociétal » qui s’avérera indispensable car la méfiance de la population sera alimentée par les thèses des lobbys antivax et la propagande complotiste qui, plus que jamais, a le vent en poupe. Une « communication » qui sera tout autant essentielle pour construire des ponts et atteindre cette partie toujours plus large de la population qui cherche un bouc émissaire à une situation qui la dépasse. Pour qui la frontière entre la perception du vrai et du faux s’est estompée au fur et à mesure que l’écart entre le « eux » et le « nous » s’est creusé.

L’instauration de garde-fous est à ce titre impérieuse. Comme couper le discours en direct d’un président en flagrant délit de mensonge. Ou désactiver des liens véhiculant de fausses informations. La responsabilité des réseaux sociaux est immense. Leur travail encore à accomplir aussi. Le nôtre également en tant qu’adulte, citoyen ou média, pour éduquer et inviter au décodage les moins aguerris à cet exercice. Pour pouvoir dire là aussi: « On va mettre un terme à cette épidémie. »

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