Olivier Mouton

La coalition miroir morte-née, le bruit des élections

Olivier Mouton Journaliste

Comment tuer une idée en un instant ! Proposée par le CD&V, la formule réunissant les majorités a déjà vécu. Elle nie Bruxelles avec des parfums de confédéralisme. Mais à force de tout refuser…

La coalition « miroir », proposée ce mercredi matin par le président du CD&V, Joachim Coens, semble avoir déjà vécu quelques heures à peine après avoir été annoncée. Elle viserait donc à réunir au sein du gouvernement fédéral les coalitions constituées en Flandre (la suédoise : N-VA, CD&V, Open VLD) et en Wallonie (l’arc-en-ciel : PS, MR, Ecolo). Le PS a déjà dit haut et fort tout le mal qu’il en pensait et la levée de boucliers de toutes parts montre que ce ballon d’essai a explosé en plein vol. Cela est révélateur de l’impasse actuelle. A force de refuser toutes les options, pour des raisons qui leur sont propres, les partis savent la direction qu’ils indiquent : des élections anticipées.

1 Quelle mouche a donc piqué Joachim Coens ? A peine déchargé de sa mission d’information, et après avoir recadré « son » missionnaire Koen Geens en lui intimant de se limiter à l’option du dialogue N-VA – PS, le président du CD&V lance sa petite idée dans les médias, ce qui est la meilleure façon de la tuer dans l’oeuf. Il voudrait faire échouer Geens – dont il a appris la mission en dernière minute – qu’il ne ferait pas autrement. La direction du CD&V a visiblement pour l’instant un seul agenda : sauver… la coalition suédoise du gouvernement flamand.

2 L’idée a des relents confédéralistes. La proposition d’une telle coalition miroir ressemble fort à l’idée que la N-VA se fait du confédéralisme : la conjugaison au fédéral des majorités régionales, avec un gouvernement et des pouvoirs réduits. De façon plus large, elle s’inscrit dans la vision flamande de notre fédéralisme, imbuvable pour les francophones : cette majorité potentielle nie en effet la Région bruxelloise (où DéFi gouverne avec PS et Ecolo), ainsi que celle de la Communauté germanophone, considérées toutes deux comme des « sous-entités ». En Flandre, on résume souvent la Belgique francophone à « la Wallonie ». La méconnaissance mutuelle nous tue à petit feu.

3 On tourne en rond. La façon qu’ont les responsables politiques actuels de créer un brouhaha constant est la meilleure manière de faire échouer toute sortie de crise. Chacun se positionne en permanence, tue l’idée de l’autre qui aurait une chance de réussite et mène en réalité une campagne électorale. Un parlementaire fédéral confiait ce matin : « Il y avait moyen de travailler au parlement, jusqu’ici, pour trouver des majorités alternatives en dépit de l’absence de majorité fédérale. Depuis quelques semaines, on sent que chacun campe sur ses positions. » Il y a un parfum d’élections. On l’a déjà dit ici: faut-il en permanence aller au bord du précipice pour se décider? Triste pays.

4 Arrêtez de dire « non ». A la longue, à force de repousser toute piste de solution, les principaux partis montrent la porte de l’isoloir à des citoyens de plus en plus consternés par le spectacle offert. Non seulement ils n’y comprennent plus rien aux différentes noms de coalitions proposées (Vivaldi, Bourguignonne, Arc-en-ciel, Suédoise, Andorre, Miroir, au secours…), mais ils se disent que nos responsables n’osent décidément pas avoir le courage de choisir. N’importe quoi, au fond, mais choisir! C’est une situation « lose/lose », faut-il encore le répéter. Laisser tomber ses exclusives, c’est voir aussi à plus long terme. Envisager un avenir pour ce pays, c’est ne pas faire l’autruche par rapport aux maux qui le minent. Combattre le populisme, c’est cesser de lui donner le bâton pour se faire battre.

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