Laurence Van Ruymbeke

Harcèlement contre Myriam Leroy : le Web n’autorise donc pas tout

Laurence Van Ruymbeke Journaliste au Vif

Je n’est pas un autre. Je n’est pas « les autres » non plus. Je, c’est moi. Quoiqu’il advienne dans le dossier judiciaire qui oppose l’écrivaine et journaliste Myriam Leroy à cet homme qu’elle accuse de harcèlement, et que la Chambre du Conseil a renvoyé ce 15 octobre devant le tribunal correctionnel, cette évidence-là subsistera : chacun est responsable de ses actes.

Même sur la toile qui fait perfidement accroire qu’elle permet tout. Considérer que l’anonymat confortable du web ou le repli dans la chaude et lâche couverture du plus grand nombre constituent un abri équivaut à se fourvoyer. Ou à se mentir. Pareil si l’on se persuade que l’on n’est pas en tort dès lors que d’autres ont fait pareil, ou pire. Je n’est pas « les autres ». Je, c’est moi.

Le rappel de cette simple vérité devrait idéalement s’inscrire pour longtemps dans l’esprit de tous ceux qui seraient tentés de sévir encore ou à leur tour sur les réseaux sociaux. Le ministère public, en réclamant le renvoi de ce dossier de plainte pour harcèlement devant le tribunal correctionnel, n’espère sans doute pas autre chose.

Je n’est pas un autre. « Je » doit donc assumer la responsabilité d’écrits insultants, sexistes, racistes relatifs à Myriam Leroy, qui ne constituent aucunement une forme d’opinion. Si tel avait été le cas, ces propos, aussi abusifs soient-ils, auraient éventuellement pu être couverts par le délit de presse, comme le demandait la défense. Et ainsi, l’affaire aurait été renvoyée devant la cour d’assises… pour un enterrement de première classe : la cour d’assises ne s’est réunie qu’une seule fois depuis 1945 pour un délit de presse. Elle a bien d’autres chats à fouetter.

Après le ministère public, la Chambre du Conseil a donc à son tour estimé que les faits reprochés n’entrent pas dans la qualification du délit de presse. Certes, l’homme contre lequel plainte a été déposée n’est pas toujours lui-même l’auteur des messages insultants. Mais dans ce cas, il en a à tout le moins été le relayeur. Aux yeux du juge, arguer que Myriam Leroy n’était pas forcée d’aller voir sur les réseaux sociaux ce que l’on y disait d’elle quand les tweets ne lui étaient pas directement adressés ne tient pas la route. C’est méconnaître la manière dont le monde tourne aujourd’hui et la rapidité de la circulation de l’information. Il se peut aussi dans ce dossier que le harcèlement – un comportement irritant et répétitif dont on peut se douter qu’il portera gravement atteinte à la tranquillité de la personne visée – soit le fait de tiers, a précisé la Chambre du Conseil, pourvu que ces attaques répétées aient été désirées par l’homme en question et qu’il les ait rendu possibles par son comportement.

On ne peut mieux dire. « Je » n’est pas « les autres ».

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