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Coronavirus: « Les patients ont exactement le même profil clinique qu’en mars-avril »

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

Selon plusieurs scientifiques néerlandais, les formes graves de coronavirus, telles qu’elles ont été constatées au plus fort de l’épidémie, en mars et en avril, sont moins fréquentes depuis l’application de gestes barrière, telle que le port du masque. Une théorie qui ne repose sur aucun élément robuste, estime Pierre-François Laterre, chef des soins intensifs des cliniques universitaires Saint-Luc.

« Nous avons vraiment le sentiment qu’en général les gens sont moins malades. Et c’est ce qu’on entend aussi de collègues ailleurs dans le pays », déclare Pol Stuart, médecin urgentiste à Rotterdam au quotidien De Morgen. Il suggère que c’est peut-être parce que les gens sont plus en alerte et qu’ils se rendent plus tôt à l’hôpital. Mais aussi parce que les patients ont moins de charge virale et qu’ils se rencontrent plus souvent à l’extérieur. « C’est une discussion très actuelle », déclare le professeur de virologie clinique Louis Kroes (Centre médical de l’université de Leyde) à nos confrères du Morgen. « La dose d’infection moyenne plus faible est vraiment l’une des raisons pour lesquelles nous constatons une diminution de la gravité clinique de l’infection ». Rien n’indique que le virus lui-même soit devenu moins nocif, ajoute le virologue Bart Haagmans (centre hospitalier Érasme à Rotterdam).

Purement hypothétique

Pierre-François Laterre, chef des soins intensifs des cliniques universitaires Saint-Luc à Bruxelles, n’est pas du tout convaincu par cette théorie. « C’est purement hypothétique. Les patients ont exactement le même profil qu’au mois de mars et au mois d’avril, donc à partir du moment où une personne est contaminée ou infectée, ce n’est pas le port du masque qui va changer la charge virale. La transmission par le port du masque est moins importante parce que c’est le nombre contaminations qui va diminuer si l’on respecte les mesures barrière, mais pas la virulence actuelle du covid. Il n’y a aucun élément robuste pour soutenir l’idée que le port du masque modifie la charge virale. Une fois que vous êtes contaminé, c’est la réplication dans votre corps du virus qui va déterminer la charge virale », nous explique-t-il.

Au niveau des patients, il accueille toujours des patients âgés de 50 à 85 ans, soit la même tranche d’âge qu’en mars-avril. « Nous avons eu quelques malades qui sont restés moins longtemps, c’est possible que ce soit l’effet de la corticothérapie, de la cortisone, mais on a des gens qui ont des profils d’évolution exactement comme ceux qu’on a connus au mois de mars et d’avril. La proportion des gens qui doivent êtes placés sous respirateur est la même », constate-t-il.

Huit lits

Alors que plusieurs hôpitaux bruxellois lancent l’alerte et craignent d’être débordés, Laterre ne veut pas parler de saturation. « Il y a 25% des lits agréés en soins intensifs qui sont réservés aux patients atteints de covid. Pour notre hôpital, cela revient à huit lits, ce qui n’est pas beaucoup pour un hôpital comme le nôtre. C’est un petit nombre, donc automatiquement vous allez rapidement occuper 25% de ce nombre. Et donc quand on parle de saturation, ça n’a rien à voir avec le nombre de patients qu’on avait au mois de mars et au mois d’avril. Et même là, le nombre de lits théoriquement réservés au covid, était de 60%. Durant la période la plus difficile de mars-avril, le nombre de patients en soins intensifs était de 1285 pour toute la Belgique (pour 2000 lits disponibles). Ici il y a un bon 200 malades (NDLR : 213 le jeudi 8 octobre), donc on est au sixième du taux d’occupation au plus fort de l’épidémie. »

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