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Le Standard, dernier combat de Louis Smal

« Les dirigeants passent, les supporters restent. » Avec la manifestation de ce jeudi pour le départ de Roland Duchâtelet, l’avenir du Standard de Liège est plus que jamais en suspens.

Ancien métallo de la CSC de Liège, sénateur CDH sous l’ère Milquet, homme aux multiples casquettes, dont la dernière – la SPRL Louis Smal Consulting – le ramène au monde des entreprises, Louis Smal, 74 ans, monte aujourd’hui au créneau pour sauver le Standard de Liège. Depuis la fin des années 1990, il est le patron de la Famille des Rouches, le club de supporters créé pour juguler le phénomène du hooliganisme. Il y a réussi au-delà de toute espérance. Si l’on compte aujourd’hui 22 000 abonnés, 14 ou 15 000 transitent via l’ASBL La Famille des Rouches qui agrée 63 clubs de supporters dans tout le pays (50 francophones et 13 néerlandophones). Mais après une série de rêve (les titres de champion de Belgique de 2008 et 2009) et le décès de son actionnaire majoritaire, l’homme d’affaires franco-suisse Robert Louis-Dreyfus, en 2009, le vent a commencé à tourner.

Le prix du Standard a été fixé à 33 millions d’euros par Margarita, la veuve de Louis-Dreyfus, à partager avec les actionnaires minoritaires. « Roland Duchâtelet a dû être approché par le directeur général, raconte Louis Smal. Il a envoyé une équipe de comptables et de fiscalistes sur les lieux et, au bout de quatre jours, sa décision était prise. » C’était en 2011. Une bonne affaire, en effet : 31 millions d’euros en caisse et quatre joueurs transférables (Steven Defour, Axel Witsel, Eliaquim Mangala et Mehdi Carcela), qui ont été « vendus » 26 millions. « Il a payé les actionnaires mais il n’a pas mis un centime dans le Standard SA, nous avons payé une quinzaine de millions pour des achats de joueurs et nous affichons une perte de 10 millions d’euros au résultat d’exploitation 2012-2013 », énumère Smal. Un mauvais bulletin.

L’ancien syndicaliste, qui connaît la valeur des réseaux et combien il faut se battre pour créer (ou préserver) l’emploi, ne peut pas rester indifférent lorsque, le 10 juin dernier, Roland Duchâtelet s’adjuge un dividende de 20 millions d’euros. Il démissionne alors avec fracas de son poste d’administrateur de la SA Standard de Liège après avoir dit à l’homme d’affaires limbourgeois ce qu’il pensait de son comportement: « Quand une société gagne de l’argent, on peut rémunérer le capital. Quand elle en perd, c’est exclu. Là, c’est immoral. »

Depuis, Louis Smal est sur pied de guerre. Les actions des supporters s’accumulent par petits groupes qui tagguent le stade de Sclessin, pénètrent bruyamment dans les bureaux du club, manifestent contre l’arrivée du nouvel entraîneur israélien, Guy Luzon, etc. Le moment de vérité ? La manifestation de ce jeudi 27 juin, pendant le Business Meeting (reprise des entraînements et match amical). Louis Smal a donné des consignes : « Je ne veux pas qu’on touche au Temple » (le stade de Sclessin), ni de débordements sur les personnes. » Les supporters devaient être suffisamment nombreux et déterminés pour faire avancer le projet « Duchâtelet, dégage ! ».

L’homme fait l’objet d’un véritable rejet. Les mauvais résultats, le renvoi de l’entraîneur Mircea Rednic après la victoire sur Gand, une communication baroque… La greffe n’a pas pris.

Des investisseurs liégeois prêts à reprendre le club Provocant ou sérieux, le Limbourgeois a déclaré qu’il abandonnerait le club si, dans un an, celui-ci ne s’est pas classé dans le trio de tête des clubs belges. Une palanquée d’investisseurs liégeois tenus secrets proposent de reprendre le club avec plus de quinze millions en mains. Sans parler des « socios » (un abonnement qui donne voix au chapitre), où se retrouvent les deux grands syndicats.

Samedi dernier, l’ancien syndicaliste avait invité à l’hôtel de police de Liège un échantillon des « forces vives » : le chef de cabinet du bourgmestre Willy Demeyer (PS), la cheffe de cabinet de Jean-Claude Marcourt (PS), la députée Christine Defraigne (MR), Gilles Foret (MR), un représentant de Melchior Wathelet (CDH), Jean-Michel Javaux (ex-co-président d’Ecolo) étant excusé, pour les sensibiliser à l’avenir du Standard. Louis Smal pourrait jouer sa dernière carte en se retirant de toutes les structures du club, y compris la Famille des Rouches, avec un risque de débandade à la base mais aussi de mouvements incontrôlés. L’alternative, c’est le dialogue.

Par Marie-Cécile Royen

L’article intégral dans Le Vif/L’Express de cette semaine

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