Westerlo, emmené par l'expérience de Nacer Chadli et la fraîcheur de jeunes talents, épate les suiveurs cette saison. © BELGA

Westerlo, décryptage tactique d’une bonne surprise

Guillaume Gautier
Guillaume Gautier Journaliste

Une fois de plus, le promu marque les esprits en Jupiler Pro League. Cette fois, c’est le Westerlo de Jonas De Roeck qui s’y colle. Explications d’une saison canon.

Les buts pleuvent comme un ciel belge en automne. Au-dessus du Kuipje, les nuages sont pourtant assez rares. De retour au sein de l’élite, le club campinois de Westerlo s’invite d’emblée dans la course au top 4 grâce à son secteur offensif spectaculaire, le troisième le plus prolifique du championnat. En l’espace de quelques mois, la nouvelle hype jaune et bleue a transformé Jonas De Roeck en coming-man des bancs belges, Maxim De Cuyper en Diable rouge potentiel et Lyle Foster en transfert à huit chiffres. Le tout avec les compliments des suiveurs, charmés par un jeu plein d’énergie et de mouvements incontrôlables.

Les débuts réussis avaient pourtant rapidement laissé place au doute, quand le retour du Bosuil le 4 septembre dernier se fait avec une cinquième défaite en Pro League dans la soute, malgré sept matches seulement dans le rétroviseur. Dans les vingt rencontres suivantes, par contre, Westerlo ne perdra que quatre fois, dont deux défaites contre l’autoritaire leader genkois. Même la méfiance accrue des adversaires, avertis par le danger de laisser de l’espace aux Campinois pour activer leurs reconversions en mode avion, n’a pas entravé la douce folie d’un Kuipje qui commence à rêver haut et fort. Pas plus que le mercato hivernal, qui a envoyé leur meilleur buteur de l’autre côté de la Manche. Le 4-4-2 installé par Jonas De Roeck, dont certaines variations rappellent que le coach a côtoyé les premiers pas belges de Vincent Kompany sur le banc de touche, semble taillé pour résister à tous les aléas d’une saison.

Contrairement au Prince des Mauves, attaché aux positions strictes chères à son mentor Pep Guardiola, De Roeck prône pourtant un chaos structuré une fois son équipe balle aux pieds. Sans faire de la possession un incontournable (Westerlo affiche une moyenne de 50,4%, la onzième du championnat), les Campinois aiment enchainer les passes, souvent en combinaisons courtes (416 passes par match, cinquième moyenne de l’élite) en rassemblant énormément de joueurs autour du ballon pour générer un surnombre et, quitte à ne pas en profiter, attirer suffisamment d’adversaires pour créer de l’espace à l’opposé. Avec l’illusion que le jeu penche à gauche, aimanté par la chevelure télégénique de Maxime De Cuyper, mais une répartition des offensives pourtant presque parfaitement symétrique : 34% à gauche, 34% dans l’axe et 32% sur la droite. Dans ses déplacements comme dans ses offensives, le club du Kuipje n’a pas de religion, seulement la croyance de plus en plus persistante de pouvoir faire souffrir l’adversaire depuis tous les endroits du terrain.

Comment Westerlo s’est adapté

Principalement axée sur les contre-attaques éclair en début de saison, un domaine dans lequel elle domine toujours le championnat (dix buts marqués en contre, trois de mieux que n’importe quel adversaire), l’équipe de Jonas De Roeck s’est diversifiée quand ses rivaux ont commencé à se méfier de l’espace offert. Certes, les Campinois savent toujours s’offrir des plongées dans la grande profondeur, grâce à un bloc majoritairement bas : Westerlo est l’une des quatre équipes à récupérer plus de la moitié de ses ballons dans son tiers défensif, et celle qui (mis à part Seraing) laisse le plus de passes à son adversaire avant de tenter une action défensive de l’autre côté du rond central.

Face à la prudence nouvelle de ses opposants, cependant, l’équipe s’aventure vers des automatismes offensifs différents. À gauche, elle multiplie les passes, permet à De Cuyper de s’aventurer vers l’axe entre les lignes et recherche généralement la passe dans le dos de la défense pour conclure. À droite, par contre, Westerlo centre, de plus loin et plus précisément : sept des huit buts inscrits sur un centre « lointain » sont venus de ce flanc, notamment grâce au pied précis de Bryan Reynolds et aux infiltrations pleines de flair de De Cuyper ou Chadli, toujours décisif malgré un âge avançant et un corps fragilisé (cinq buts et une passe décisive en moins de mille minutes jouées).

Moins médiatisé que De Cuyper côté gauche, Bryan Reynolds est pourtant une valeur sûre sur la droite campinoise (BELGA)

D’un côté comme de l’autre, et même dans l’axe grâce à l’énergie et aux percussions balle au pied de Madsen, Westerlo produit beaucoup : leurs 46,7 expected goals en font la troisième équipe la plus active offensivement de Pro League. Le départ de Foster, incontournable sur les reconversions offensives et généralement remplacé par un Kyan Vaesen moins véloce, a incité le coach à intégrer Fixelles, plus apte à gratter des ballons dans le camp adverse pour raccourcir la distance entre la récupération et le fond des filets. Pour continuer à marquer, le Campinois sait s’adapter.

Les limites défensives de Westerlo

Il faut dire que le but fréquent est indispensable. Parce qu’un peu comme le Beerschot d’Hernan Losada, mais avec une recette moins limitée dans le temps, Westerlo encaisse beaucoup. Notamment sur ce côté gauche où le sens de l’aventure de Maxim De Cuyper peut devenir une faiblesse une fois le ballon dans les pieds adverses. Dans le bloc bas que Jonas De Roeck aime installer en perte de balle, une possession rapide permet rapidement de créer de l’espace sur les côtés, et l’énergie du jeune latéral gauche prêté par Bruges ouvre trop facilement son dos, qui semble ciblé par les adversaires. 20 des 45 buts encaissés par Westerlo viennent d’un centre, qu’il soit au cordeau, en retrait ou plus lointain, et quatorze des vingt centres sont partis depuis le côté gauche défensif. Finalement, ce Westerlo a les défauts de ces vertus. Les Campinois racontent l’histoire d’une équipe capable d’étirer le terrain et les lignes adverses pour faire briller Maxim De Cuyper, Nicolas Madsen ou le spectaculaire Dorgeles Nene dans les espaces, mais peine à les refermer assez rapidement pour protéger suffisamment les buts du chevronné Sinan Bolat. De quoi garantir des matches riches en buts et en rebondissements. Avec une pièce qui, depuis la fin de l’été, finit très souvent par tomber du côté jaune et bleu.

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