Euro 2016 : est-il justifiable de se passer de Benzema ?
Karim Benzema ne participera pas à l’Euro 2016 avec la France. Si 8 Français sur 10 sont favorables à cette décision, il s’agit là d’un véritable coup dur pour d’autres. En quoi est-il indispensable à l’équipe de France ? Et pourquoi peut/doit-elle s’en passer ?
Il est indispensable…
Benzema a des qualités intrinsèques. Nul ne peut en douter. Titulaire au Real Madrid, il a poussé Higuain vers la sortie en 2013. Et bien que les statistiques de l’Argentin soient impressionnantes et auraient pu amener les dirigeants de la Casa Blanca à s’en mordre les doigts, il n’en est rien. Cette saison, en 24 matchs de championnat, il a planté 23 roses pour un ratio d’un but inscrit toutes les 78 minutes. Un seul joueur fait mieux dans le top 5 des ligues européennes : Zlatan Ibrahimovic (un but toutes les 69 minutes). À titre de comparaison, Suarez marque toutes les 84 minutes, Cristiano Ronaldo marque toutes les 98 minutes. Une prolificité qui fait de Karim un élément clé de l’effectif de Zidane.
Un joueur au talent rare. Un buteur né. Certes, il est bien aidé par des flancs percutants (Cristiano Ronaldo et Bale), un milieu à la passe clé facile (Isco, James, Modric…), mais il n’en faut qu’une à un Benzé en confiance pour tromper le gardien. Puissant, il perce les défenses. Rapide, il les surpasse. Technique, il les met dans le vent. Lucide, il les met à bout. Tête, pieds, genou et dans n’importe quelle position, il les met au fond. Aucun autre attaquant français ne peut se targuer d’une telle efficacité.
Didier Deschamps, le sélectionneur français en est conscient : « Benzema ? Vous n’êtes pas attaquant au Real pendant cinq ans, avec Mourinho, Ancelotti, Benitez ou Zidane comme ça. Tous les pays nous l’envient » avait-il déclaré au journal l’Equipe le 12 mars dernier. Sportivement, il est certain que peu de pays peuvent se vanter de bénéficier d’un tel attaquant. Même si ses statistiques avec l’équipe nationale ne sont pas vraiment impressionnantes (27 goals en 81 rencontres), il n’en reste pas moins le meilleur buteur français en activité.
Selon des statistiques avancées par le journal l’Equipe, la France joue mieux et est plus efficace lorsque Benzema est sur le terrain. Ainsi, la moyenne de buts marqués par match par la France est supérieure lorsqu’il est présent (1,6 contre 1,4). Il en est de même pour le pourcentage de victoires (55,6 contre 50) ou le nombre de tirs par match (16,6 / 15,5). Même la statistique du nombre de goals encaissés lorsqu’il est sur le terrain est en sa faveur (0,7/1).
Sportivement, ne pas le sélectionner pour une compétition européenne c’est se tirer une balle dans le pied.
Un joueur, une mentalité dont on se passera…
Mais voilà, en dépit de ces statistiques, la Fédération française de football (FFF), représentée par son président Noël Le Graët et soutenue par le sélectionneur national Didier Deschamps, a décidé de priver le Franco-algérien d’Euro 2016. En cause, les nombreux soucis judiciaires de Karim Benzema. « Car si la performance sportive est un critère important, il n’est pas exclusif pour décider de la sélection au sein de l’Equipe de France de football », explique la FFF dans un communiqué.
Et c’est là que le bât blesse pour le buteur madrilène, trop souvent au coeur de déboires judiciaires.
En mars 2013, il a été condamné à une amende de 18.000 euros et un retrait de permis provisoire pour un excès de vitesse sur le périphérique de Madrid, limité à 80 km/h. Une enquête préliminaire avait également été ouverte en mai 2015 pour un excès de vitesse présumé alors qu’il roulait près de l’aéroport de la capitale espagnole.
Mais bien plus que des infractions routières, Benzema a été associé avec Franck Ribéry à « l’affaire Zahia ». Renvoyé devant le tribunal correctionnel pour « sollicitation de prostituée mineure », il est toutefois relaxé en janvier 2014.
Le 21 novembre 2015, la Marseillaise a retenti au stade Santiago Bernabeu en marge du Clasico, en hommage aux victimes des attentats de Paris. S’en est suivi un crachat de Karim Benzema qualifié de « symbolique » par certains observateurs.
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Un véritable tollé qui a grandement terni l’image de l’attaquant français. Image qui avait déjà été égratignée par son refus de chanter l’hymne national français.
C’est finalement sa mise en examen dans l’affaire d’un chantage à la sex-tape contre un autre Bleu, Mathieu Valbuena, qui a coûté à Karim Benzema son Euro 2016.
Une situation qui aurait fait tâche dans le vestiaire des Bleus et aurait pu amenuiser l’entente du groupe. Ce à quoi la FFF ne pouvait se risquer comme elle l’explique dans son communiqué : « La capacité des joueurs à oeuvrer dans le sens de l’unité, au sein et autour du groupe, l’exemplarité et la préservation du groupe sont également prises en compte (en plus du sport, NDLR) par l’ensemble des sélectionneurs de la Fédération ».
Et si l’absence du Franco-algérien paraît être une bonne chose de ce point de vue, il va sans dire qu’une décision autre aurait eu un impact non négligeable sur l’image de l’équipe de France, de l’Euro 2016 et du football. Une apologie du délit, d’un non-respect du maillot et des coéquipiers en quelques sortes. Ca, du moins, dans l’esprit d’une grande majorité des gens. En effet, selon un sondage Odoxa pour RTL, huit français sur dix approuvent la décision de la Fédération. Quatre-vingt-six sur cent avançant des raisons morales à son écartement.
Quentin Droussin
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