Partir le matin dans l’inconnu de son environnement quotidien. © GETTY

Voyagez moins, et faites du microvoyage une habitude

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Le sociologue Rémy Oudghiri vante les vertus de la balade d’un jour dans l’environnement proche pour renouer avec la réalité et «la poésie au coin de la rue».

Parcourir le monde pour «cocher des cases» comme le font nombre de touristes amateurs de selfies sur des spots instagrammables ne satisfaisait pas le besoin de dépaysement de Rémy Oudghiri. Dès lors, le sociologue a exhumé les souvenirs, dans son enfance, d’escapades dans sa ville natale de Casablanca pour redécouvrir les vertus de l’excursion courte dans Paris et, surtout, sa banlieue, «réservoir immense de promesses pour le microvoyage». Il le raconte avec beaucoup de saveur dans Microvoyage (1).

Pour l’auteur, l’exemple type du microvoyage est de partir un matin à bord d’un bus sans savoir pour quelle destination, se perdre dans des lieux inconnus, et rentrer chez soi le soir venu. Outre le combat contre le surtourisme et le bénéfice écologique de la pratique, l’auteur trouve de nombreuses autres raisons pour promouvoir le microvoyage. «Je ne me suis jamais départi de cette croyance que ce qui est proche, banal, apparemment anodin, est digne d’intérêt, riche, multiple et passionnant», avance-t-il. Court, délivré des contraintes logistiques, bon marché, le microvoyage n’en est pas moins «une aventure» pour Rémy Oudghiri, notamment parce qu’il permet «un contact direct avec la réalité» et une expérience qui peut se révéler profonde et philosophique. «L’appel du microvoyage, c’est un besoin d’aller vers le paysage et de se laisser influencer par lui mais, également, d’influencer à son tour le paysage, de sorte que se crée peu à peu un nouvel imaginaire qui n’appartient qu’à nous et qui devient notre secret», détaille l’auteur.

«Ce qui est proche, banal, apparemment anodin, est digne d’intérêt, riche, multiple et passionnant.»

«Entrer par effraction dans la vie des gens dont je longe les habitations, découvrir des petits indices de leur quotidien qui suffisent à enflammer mes pensées […] est l’une des plus belles vertus du microvoyage: activer ma capacité à inventer à partir du réel, réveiller mon esprit vagabond et, ce faisant, élargir ma vision du monde», va jusqu’à soutenir Rémy Oudghiri. Ainsi, par un retour étonnant à la source de son intérêt, le sociologue rencontre à travers le microvoyage un objectif poursuivi, mais parfois de façon factice, par le voyageur au long cours. Avec, selon lui, des avantages supplémentaires dont celui, et non des moindres, que «la poésie est au coin de la rue» de chaque balade.

(1) Microvoyage. Le paradis à deux pas, par Rémy Oudghiri, PUF, 218 p.

© DR

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