« Quand nous serons vieux, il n’y aura personne pour s’occuper de nous »

La plupart des jeunes ne rêvent pas d’un emploi dans une maison de repos. Bien au contraire. Il est grand temps de mieux rémunérer les soignants et surtout de leur montrer beaucoup plus de respect, sinon, il n’y aura bientôt plus personne pour s’occuper de nous.

« C’est le dernier endroit au monde où j’aimerais travailler », dit une jeune fille au premier rang de l’auditorium. Pour la troisième fois au cours des dernières semaines, je parle à un groupe d’étudiants de Grijsgedraaid, mon nouveau livre sur la façon dont nous traitons les personnes de plus de 80 ans. Chaque fois, les jeunes venus m’écouter se montrent très intéressés, posent des questions critiques et suggèrent des façons de mieux faire. Un jour, ils feront la différence, me dis-je. Mais quand je demande qui aimerait travailler avec des personnes âgées, la réponse est très décevante. Sur un total de près de cinq cents étudiants. C’est un problème. Un problème immense. Ce sont les jeunes qui vont à l’école aujourd’hui qui devront s’occuper de nous dans quelques décennies. Mais ils n’en ont pas envie.

De nombreux centres de soins ne trouvent déjà pas suffisamment de personnel qualifié. Très peu d’infirmières et d’aides-soignants se sentent appelés à y travailler. S’il n’y a pas assez de jeunes désireux d’embrasser une carrière d’infirmier ou d’aide-soignant, il y en a encore moins qui veulent s’occuper de personnes âgées. S’ils s’y retrouvent quand même, c’est bien trop souvent parce qu’ils n’ont pas le choix. Rares sont ceux qui entrent dans le secteur plein de conviction et d’idéalisme. Et ceux qui font ce choix se plaignent de plus en plus fort. Parce que le rythme de travail est si élevé qu’ils ont à peine le temps de vérifier comment vont vraiment les résidents, par exemple.

Le fait qu’un si grand nombre de personnes n’optent pour les soins aux personnes âgées qu’en dernier recours est dû en partie au fait que le travail est exigeant tant sur le plan physique que mental. Cependant, la mauvaise réputation du secteur les dissuade encore plus. Il ne se passe pas un mois sans qu’un nouveau scandale n’éclate dans les médias. Au sujet de soignants qui font des selfies humiliants avec les résidents atteints de démence, de résidents qu’on couche à quatre heures de l’après-midi pour la nuit, à qui l’on sert les repas les plus infâmes et qu’on gave de tranquillisants… Il n’est pas étonnant que les personnes âgées attendent longtemps avant de déménager dans une maison de repos. Ils ne le font que lorsqu’ils sont très dépendants. En moyenne un an et demi à deux ans avant leur mort. Financièrement, c’est tout bénéfice pour les centres de soins, car ce sont les profils de soins les plus lourds qui sont les mieux financés. Mais pour le personnel, le travail devient encore plus difficile. La plupart des résidents ne veulent pas être ici et la plupart de mes collègues non plus », me dit une infirmière gériatrique, qui envisage également de chercher un autre emploi.

Pourtant, il n’y a pas si longtemps, elle a choisi de s’occuper des personnes âgées avec conviction. Tout comme les autres infirmières et infirmiers et spécialistes en soins extrêmement intègres et motivés que j’ai rencontrés au cours des dernières années. Tous des gens qui ne voudraient pas travailler ailleurs et qui traitent les personnes âgées avec le plus grand respect. Il nous en faut plus. Beaucoup plus. Il est donc important d’attirer le bon personnel dans le secteur au lieu de le décourager, comme c’est le cas aujourd’hui.

Cela signifie avant tout qu’ils doivent être bien payés et que la charge de travail doit rester supportable. Le travail deviendra plus faisable s’il est réparti sur plus de personnel. À cette fin, il ne suffit pas de pourvoir les postes actuellement vacants, mais le gouvernement devra également dépenser plus d’argent en main-d’oeuvre supplémentaire. Il est au moins aussi important que le personnel chargé des soins aux personnes âgées reçoive plus de respect qu’aujourd’hui. Comme me le disait la coordonnatrice de soins d’un centre de soins pour bénéficiaires internes la semaine dernière : « Aujourd’hui, il n’y a peut-être pas assez de soignants pour nos résidents, mais ce n’est rien comparé à ce qui nous attend. Quand nous serons vieux, il n’y aura plus personne pour s’occuper de nous. »

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