Le toxicologue Alfred Bernard (UCLouvain)

Des PFAS dans les fruits et légumes belges: les conseils d’un expert pour s’en débarrasser

Nathan Scheirlinckx
Nathan Scheirlinckx Journaliste au Vif

Poivrons, aubergines, poires. D’après une récente étude, 1 fruit sur 3 et 1 légume sur 10 contiennent des PFAS en Belgique. La situation, moins grave que pour la contamination de l’eau potable, interpelle. Le toxicologue Alfred Bernard (UCLouvain) livre ses conseils.

Les chiffres révélés par l’étude de PAN Europe, un réseau d’ONG qui lutte contre l’usage des pesticides, font froid dans le dos. Entre 2011 et 2021, plus de trente PFAS différents ont été retrouvés dans les fruits et légumes européens, contaminés via des pesticides. En 10 ans, leur présence a triplé.

D’après les résultats de l’étude, les PFAS touchent davantage les fruits que les légumes. Ainsi, la présence de ces polluants éternels, toxiques tant pour l’être humain que pour la nature, a particulièrement augmenté dans les fraises (+534%), les pêches (+362%) et les abricots (+333%). En 2021, un fruit sur cinq produit au sein de l’Union européenne contenait des résidus d’au moins un pesticide PFAS.

Des PFAS dans les fruits et légumes belges

Les poivrons belges analysés présenteraient une quantité importante de PFAS

Zoom sur la Belgique : d’après PAN Europe, 27% des fruits et légumes contaminés avaient été cultivés sur le plat pays. Soit la première marche du podium des Etats-membres, à égalité avec les Pays-Bas. En 2021, les produits belges présentant le plus souvent au moins un PFAS dans l’échantillon étaient les poivrons (56%), les aubergines (39%) et les poires (15%). Au niveau des produits importés depuis l’étranger, les bananes (40%) et les melons (20%) présentaient également des traces de ces substances toxiques.

« Les chiffres concernant la Belgique sont à prendre avec des pincettes, car les données sont limitées », prévient Virginie Pissoort, chargée de plaidoyer et de campagnes chez Nature & Progrès, ONG belge qui a participé à l’étude.

« Les PFAS les plus dangereux se trouvent dans les produits d’origine animale »

Le toxicologue Alfred Bernard (UCLouvain)

Des effets limités sur la santé humaine…

Si l’étude révèle la présence de PFAS dans nos produits végétaux du quotidien, elle ne dit rien de leur concentration. Faut-il s’inquiéter ? Non, selon le toxicologue Alfred Bernard (UCLouvain). « Les PFAS les plus dangereux se trouvent dans les produits d’origine animale comme la viande, les œufs et le lait. Comme les fruits et légumes sont contaminés par des pesticides, les laver et les éplucher permet de se débarrasser d’une grande partie ».

Fruits et légumes possèdent un autre avantage. « On sait qu’ils réduisent de 30% les risques liés aux cancers et maladies cardiovasculaires », continue le toxicologue. Leurs effets bénéfiques permettraient quoiqu’il arrive de neutraliser les potentiels risques pour la santé humaine liés aux PFAS. Mieux, les légumes verts (haricots, épinards, petits pois) et fruits rouges, grâce à l’acide folique qu’ils contiennent permettraient selon Alfred Bernard de bloquer la réabsorption des PFAS par les reins et les intestins.

…mais toujours plus néfastes pour la nature

Les pesticides PFAS ne sont pas interdits

En aspergeant les fruits et légumes de pesticides pour les cultiver, ces substances finissent irrémédiablement par se déverser dans les sols. « Ils polluent les eaux superficielles et puis les nappes phréatiques, et donc finissent tôt ou tard dans l’eau potable », déplore Alfred Bernard. Le toxicologue estime donc qu’il faudrait bannir les pesticides PFAS.

L’ONG Nature & Progrès et le collectif PAN Europe sont du même avis. Et dénoncent que ces pesticides, malgré qu’ils contiennent des PFAS, ne sont pas encore interdits. « Ils bénéficient d’une exemption de la part de l’UE, qui s’est engagée à interdire tous les PFAS inutiles en 2020 », rappelle Virginie Pissoort.

Les auteurs de l’étude, qui ne porte pas sur les produits bio, estiment que les pesticides PFAS ne sont pas indispensables à la culture des fruits et légumes, et demandent au monde politique, en plus d’une interdiction, de favoriser les alternatives durables.

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