Régulation coach
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Coach, un métier qui nécessite une remise en ordre: «Il existe un risque d’emprise sectaire»

Le métier de coach a le vent en poupe, mais les risques de dérives, notamment sectaires, sont importants. Des députés socialistes ont déposé une proposition de résolution pour qu’un encadrement légal du métier soit mis en place le plus rapidement possible.

De vie, financier, émotionnel, professionnel, spirituel, de sport, de séduction… Aujourd’hui, tout le monde peut se prétendre coach, aucune formation n’est nécessaire. Cela explique certainement l’engouement grandissant pour le métier. Le site belge de l’International Coach Federation (ICF) recense 156 coachs sur l’ensemble du territoire, tandis que l’European Monitoring & Coaching Council (EMCC) Belgium en compte 140.

Mais leur nombre est sans doute plus élevé. Selon les données de l’INASTI, 98.287 travailleurs indépendants exerceraient un métier de coach où s’y apparentant, tel que conseiller ou consultant (NDLR: il n’existe aucune Nomenclature statistique des Activités économiques -NACE- spécifique au coaching), avancent les auteurs d’une proposition de résolution déposée auprès de la Chambre des représentants, le 17 septembre dernier.

«Il existe un risque d’emprise sectaire avec un isolement progressif des victimes vis-à-vis de leur famille et de leurs proches.»

Du coaching à la secte

Les socialistes Patrick Prévot, Sophie Thémont, Caroline Désir, Ludivine Dedonder et Khalil Aouasti regrettent que, malgré la popularité grandissante du métier, celui-ci ne soit pas réglementé. Une absence d’encadrement légal qui fait craindre aux députés fédéraux une possible multiplication des dérives. «Au-delà du fait que certains clients se font arnaquer financièrement, il existe un risque d’emprise sectaire avec un isolement progressif des victimes vis-à-vis de leur famille et de leurs proches», prévient Patrick Prévot.

Selon plusieurs rapports de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires, le nombre de saisines au sujet du coaching n’a cessé d’augmenter. La Médiluves en recensait 27 en 2017, contre 62 en 2020, puis 94 en 2021. En novembre 2024, dans Le Soir, le Centre d’information et d’avis sur les organisations sectaires nuisibles (CIAOSN) confirmait, en outre, «un nombre de demandes accrues relatives au coaching/développement personnel», sans communiquer de chiffres.

Le député socialiste se défend de «crier haro sur toute une profession»: «Je suis même intimement persuadé que recevoir l’aide d’un coach fait du bien à beaucoup de personne», commente Patrick Prévot, qui se fait, selon lui, la voix des professionnels du secteur: «Ils ont peur que les mauvaises pratiques de certains retombent sur le métier, qu’eux, qui ont été formés, pâtissent des agissements de ceux qui se lancent dans le coaching sans formation ni expérience.»

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Une qualité de formation inégale

Aucun diplôme n’est donc nécessaire pour exercer comme coach. Aucun diplôme n’est d’ailleurs reconnu par l’Etat belge comme condition d’accès à la profession. Toutefois, comme le souligne la proposition de résolution du PS, il existe de nombreuses formations sur le marché: académies, centres et instituts privés; l’IFAPME (105 heures de formation); et même l’université, notamment l’UCLouvain, qui «propose un certificat universitaire en Life coaching» de 22 crédits organisé par la faculté de psychologie, logopédie, sexologie et des sciences de la famille.

Bien que le titre de «coach certifié» puisse rassurer le client, la qualité de ces formations reste néanmoins très inégale, ne garantissant pas un service en adéquation avec la loi relative aux pratiques du marché et à la protection du consommateur.

«Les professionnels ont peur que les mauvaises pratiques de certains retombent sur le métier, qu’ils pâtissent de leurs agissements.»

Conditionner l’accès au métier

Selon les auteurs de cette proposition de résolution, pour faire face aux dérives, il n’existe que trois réponses possibles: interdire purement et simplement le coaching, poursuivre la politique de tolérance actuelle, ou encadrer la profession «via une réglementation régissant non seulement les conditions d’accès au port du titre de coach, mais aussi, et c’est fondamental, via une règlementation régissant la pratique elle-même du coaching». Les députés optent pour la dernière solution, et demandent «que les travaux préparatoires visant à introduire un encadrement légal de la profession de coach soient initiés dans les meilleurs délais».

Ils proposent qu’une formation préalable, la réalisation d’un stage, l’enregistrement sur une liste officielle, ainsi que le respect de règles de déontologie deviennent des conditions obligatoires de l’accès au métier de coach, y compris pour ceux exerçant en ligne. «Si ces conditions ne sont pas remplies, [ces personnes doivent] être interdites de porter le titre de coach et de pratiquer le coaching», insistent les députés, qui admettent qu’un tel processus de régulation prendra du temps. C’est pourquoi, ils souhaitent que d’autres mesures, telles que l’ouverture d’une enquête sur les pratiques commerciales dans le secteur du coaching bien-être, soient rapidement prises pour d’ores et déjà lutter contre les dérives.

Lors du dépôt de la proposition de résolution, une série d’avis écrits a été demandée. La liste des organismes qui seront interrogés devrait être connue ce vendredi, nous informe Patricke Prévot, qui poursuivra alors son travail pour une régulation du métier de coach.

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