The feet of desperate people standing on a cliff at the bottom are rivers. And below that abyss is death.

Nouvelle étude sur le suicide en Wallonie: les grandes différences entre les hommes et les femmes

Stagiaire Le Vif

Partout en Europe, les hommes se suicident plus que les femmes. Y compris en Wallonie, comme vient de le révéler une étude. Est-ce pour autant un indicateur de leur santé mentale qui serait davantage à l’épreuve ? Pas tout à fait. Les femmes commettent en réalité plus de tentatives de suicide. Une analyse genrée du phénomène semble donc indispensable pour mieux le comprendre.

L’Institut wallon de l’évaluation de la prospective et de la statistique (IWEPS) a publié, ce 2 mai, un dossier sur la santé mentale en Wallonie analysée sous le prisme du genre en récoltant plusieurs statistiques et en les analysant. Pourquoi distinguer les hommes et les femmes est intéressant, lorsqu’il s’agit de suicide ? C’est avant tout pour mieux comprendre le mal-être qui touche les deux sexes, et surtout le prévenir. Mais selon le rapport, il faut dépasser la « simple lecture sexuée des chiffres » et analyser le genre afin d’impliquer les « comportements pouvant souffrir d’une série de stéréotypes ».

La Belgique a comptabilisé 1283 suicides chez les hommes et 509 chez les femmes en 2018 (Statbel). Les hommes se suicident donc davantage que les femmes, et ce n’est pas propre à la Belgique : c’est le cas dans tous les pays de l’Union Européenne. Mais si ces chiffres pourraient faire penser que les hommes ont davantage tendance à avoir des pensées suicidaires et à passer à l’acte, ce n’est pas aussi simple. Le taux de mortalité par suicide est en effet plus important chez les hommes mais lorsqu’il s’agit des tentatives de suicide, les chiffres s’inversent.

Ces données révèlent un comportement différent chez l’homme et la femme mais le Centre de Prévention du Suicide (CPS) insiste : « Le message est le même, il n’y a pas de différence au niveau de la crise suicidaire ». En effet, même s’il n’y a pas eu passage à l’acte, la tentative révèle un mal-être psychologique. Une explication concrète à la différence entre les tentatives et les suicides aboutis se trouve dans les moyens utilisés, qui sont plus létaux chez les hommes,  comme l’explique Déborah Deseck, porte-parole du CPS. « La méthode est plus radicale ». Il s’agit en effet principalement de pendaisons ou de suicides par arme à feu. La publication de l’IWEPS souligne que les femmes ont recours à des moyens moins violents, généralement la prise importante de médicaments, ce qui traduit « une expression du mal-être différente ».

Mais au-delà de l’acte suicidaire, le rapport de l’IWEPS souligne que le mal-être psychologique se traduit aussi différemment selon le sexe. Il est d’ailleurs plus important chez les femmes : en Wallonie, selon les chiffres de 2018 (Sciensano), plus de 43%  des femmes présentaient des signes de mal-être contre presque 30% des hommes. La tranche d’âge 25-34 ans est la plus touchée chez les femmes, mais elles sont pourtant moins à tenter de se suicider. La publication met en avant l’hypothèse que les responsabilités conjugales, familiales et professionnelles qui pèsent sur elles à cette période les « obligeraient » à moins passer à l’acte et à faire face.

Analyser le suicide de façon genrée est avant tout intéressant pour la prévention, selon la porte-parole du CPS. Les hommes ont en effet plus de difficultés à admettre un mal-être. Ce qui est directement lié aux stéréotypes qui régissent la société, notamment le mythe du « surhomme ». Cette hypothèse peut également expliquer leur passage à l’acte plus radical. Leur mal-être va davantage se traduire par une surconsommation d’alcool, de drogue ou de comportements dangereux, souligne le rapport. Comprendre cette problématique permet donc un meilleur ciblage et d’amener les hommes à demander de l’aide. Le Centre de Prévention du Suicide considère d’ailleurs que prendre conscience d’avoir une fragilité est une force. La prise en charge sera quant à elle la même pour les deux sexes, car « l’idée est d’aller au cœur de la souffrance ».

Sarah Duchêne

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