Fin des moteurs thermiques en 2035: les obstacles à l’avènement de la voiture électrique

Stagiaire Le Vif

Le Parlement européen a voté la fin des ventes de véhicules thermiques neufs en 2035, hybrides inclus. Cela implique une généralisation de la voiture électrique. Mais la route menant à cet objectif est encore longue et semée d’obstacles…

C’est une des mesures phares de la politique européenne visant la neutralité carbone en 2050. Mercredi 8 juin, une majorité de 339 (contre 249) parlementaires ont approuvé la fin de la vente des voitures neuves à moteur à combustion interne à partir de 2035. Sont visés les moteurs à essence, au diesel et les moteurs hybrides. Seules les voitures qui n’émettent pas de gaz à effet de serre (à l’usage) pourront être commercialisées.

Le gouvernement belge n’a pas attendu de directive européenne pour commencer à prendre des mesures allant dans ce sens : dès le 1er janvier 2026, seules les voitures de société « zéro émission » pourront bénéficier d’un régime fiscal favorable. D’ailleurs, les Belges non plus n’ont pas attendu que les parlementaires européens se mettent d’accord. Depuis cinq ans, les immatriculations de voitures électriques augmentent de 170% en moyenne chaque année. Entre 2019 et 2021, leur part de marché a presque quadruplé.

Car s’il existe des véhicules qui fonctionnent à l’hydrogène et aux biocarburants, c’est à priori la voiture électrique qui sera la première bénéficiaire de ces régulations. Une motorisation qui est loin, très loin de faire l’unanimité. La voiture électrique arrivera-t-elle a se rendre indispensable et omniprésente, comme les voitures essence et diesel l’ont été ?

Premier obstacle : les bornes de recharge

La nécessité de recharger un véhicule électrique sur une borne est parfois un frein à l’achat. Partout, cependant, les réseaux s’étoffent. Cette cartographie en témoigne. En Wallonie, il y a 1500 bornes, dit-on au cabinet du ministre wallon de la Mobilité Philippe Henry (Ecolo). Un chiffre qui devrait être porté à 12 000 d’ici 2025. A Bruxelles, plus de 1300 bornes sont accessibles. La Région a pour objectif d’en installer 11 000, de sorte qu’il y en ait une « à proximité de tout domicile bruxellois » avant 2035. La Flandre dispose d’une bien meilleure couverture avec déjà plusieurs milliers de bornes installées.

Toutes les voitures électriques ne sont cependant pas concernées par ces bornes. La marque Tesla, par exemple, dispose de son propre réseau de « superchargeurs ». Il est également possible pour la plupart des modèles sur le marché de les brancher sur une prise de courant classique grâce à un connecteur fourni par le vendeur. Une recharge depuis le domicile coûte moins cher, mais demande nettement plus de temps.

Deuxième obstacle : le prix

Les prix des voitures électriques, aujourd’hui bien plus élevés que ceux des thermiques, pourraient baisser assez vite à mesure qu’elles sont produites en masse. En effet, de nombreux constructeurs ont déjà annoncé qu’ils ne vendraient bientôt plus de modèles diesel et à essence : Audi, Ford, Opel, Renault et bien d’autres.

La production de batteries va suivre cette tendance. Frans Timmermans, Vice-président de la Commission européenne et chargé du Pacte Vert, a rappelé que l’Europe ne produisait « aucune batterie il y a cinq ans » mais qu’en 2025, « elle sera le deuxième producteur mondial, à la faveur de l’installation de gigafactories dans plusieurs pays européens. » Reste à voir comment les Européens comptent y parvenir en respectant l’objectif de la neutralité carbone. Car le principal reproche adressé aux véhicules électrique est bien celui de la pollution générée par leur fabrication, en particulier les batteries.

Troisième obstacle : la fabrication

Parmi les matériaux indispensables à la confection de batteries, on retrouve le lithium et le cobalt. Ces métaux sont très limités en quantité. Leur exploitation minière présente un risque considérable pour la biodiversité, la qualité de l’eau et pour les droits sociaux et humains. Les Belges sont d’ailleurs dans les starting-blocks pour commencer l’exploitation minière de fonds marins, riches en métaux rares. Ce travail d’extraction, même s’il permettait aux automobilistes de rouler sans émettre de CO₂, serait un désastre environnemental.

Pour faire état des impacts et des besoins de l’électrification de la mobilité, le Conseil Fédéral du Développement durable a sollicité l’entreprise Climact. Dans leur rapport, les experts ont abordé la question des métaux rares : « Il est urgent de développer des normes, des infrastructures, des incitants et des innovations technologiques pour réduire les besoins de matières premières, tout en facilitant la collecte et le recyclage des matières tirées des batteries (…) En réduisant l’utilisation des ressources rares dans les batteries et en améliorant le recyclage, on peut réduire la demande en ressources de 55 % en 2035 et de trois quarts par l’amélioration du recyclage ».

Les institutions européennes semblent d’accord avec Climact. La Commission a d’ailleurs proposé d’augmenter l’obligation de recyclage des batteries, en la passant de 50% actuellement à 70% en 2030, avec des taux spécifiques pour les matériaux rares. Mais le groupe d’experts ne s’arrête pas là ; pour parvenir à l’objectif de décarbonation de la mobilité, leur rapport a identifié trois leviers d’action majeurs : réduire la demande de mobilité, favoriser les transports durables (vélo, transports en commun) et partager davantage les voitures. Bref, tout faire pour réduire les déplacements individuels.

Victor Broisson

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