Carte blanche

Et si nous dépénalisions enfin le cannabis?

Le Conseil économique et social français a remis un rapport invitant notre voisin à revoir sa politique en matière de santé publique concernant le cannabis devant l’inefficacité de celle-ci. Selon le rapport du conseil, il s’agit du constat d’un échec cuisant des seules politiques répressives menées jusqu’à présent. Ce constat se pose également chez nous en Belgique.

Nous sommes dans une situation de désarroi face à la propagation des drogues en Belgique et ses grandes villes.

Des solutions existent pourtant pour pouvoir mieux gérer cette propagation et développer une meilleure gestion des drogues dures. Il est clair que nous devons mettre tous les efforts possibles (et efficaces) en œuvre afin de lutter contre toutes les drogues (même douces).

Pour DéFI Jeunes, c’est simple. En plus d’un renforcement des moyens des services compétents (douane, polices judiciaires fédérales et notre Justice), il faut dépénaliser le cannabis.

En effet, nous sommes favorables à la régulation et à la dépénalisation du cannabis à usage récréatif. Une avancée législative qui verrait alors le cannabis comme l’alcool ou le tabac (des produits également nocifs), c’est-à-dire un produit dont la vente serait encadrée par l’État. Par conséquent, nous réduirions à néant le marché noir de ce produit qui se pérennise dans le flou occasionné par une répression aveugle comme ce fut le cas par le passé pour l’alcool durant les célèbres années de la Prohibition. En régulant, nous pourrions ainsi contrôler les produits consommés par le public limitant ainsi les risques liés à la santé. En évitant la relâche qui existe autour de l’alcool et du tabac, nous aurons à effectuer un travail de prévention.

Évidemment, dépénaliser ne signifie pas oublier les dangers liés à la consommation du cannabis et c’est en le contrôlant que nous faciliterons la prévention des risques provoqués par la prise abusive. Ainsi, on pourra accompagner la consommation afin qu’elle soit responsable et ne devienne ni problématique ni banalisée tout en protégeant les jeunes et les publics fragilisés. Pour ce faire, nous aurions trois axes: l’information, la prévention et la réduction des risques en régularisant tant la production que la vente. Les produits consommés pourraient par exemple avoir un emballage où est inscrit de façon transparente : la teneur en THC, les effets négatifs, le type de produit, la composition, les effets secondaires et les contre-indications.

Un autre volet intéressant, c’est l’opportunité financière d’une telle avancée. Instaurer une taxation intelligente sur les ventes pour que l’argent nouvellement gagné par l’Etat puisse être investi dans la santé publique, dans la lutte contre la corruption, dans la lutte contre l’avènement de drogues dures et dans notre Justice. Les recettes pourraient donc servir à une société plus juste.

Enfin, la dépénalisation du cannabis peut s’avérer intéressante dans la lutte contre le crime organisé dans la mesure où cela nous permettrait de nous concentrer sur la répression des drogues dures. Hautement plus dangereuses et pour lesquelles, il faudrait durcir les mesures. Comme le rappelait le juge d’instruction Michel Claise, la répression doit aussi avoir lieu dans des milieux « huppés » d’affaires, pourvus d’une certaine puissance financière et où la consommation de cocaïne est forte.

Départi du problème de trafic des drogues douces, cela libérerait la Justice et les policiers d’un nombre conséquent de dossiers pour pouvoir se concentrer sur la répression de ces réseaux gangrenant de plus en plus notre pays.

Cependant, comme indiqué par le professeur néerlandais de droit pénal Cyrille Fijnaut, la seule libéralisation du cannabis menée à l’échelle d’un seul pays ne suffira pas. Dans l’idéal, c’est à l’échelle européenne que cela devrait être mené pour porter un coup fatal au crime organisé qui ne pourrait plus opportunément se déplacer d’une région à une autre. Une coopération internationale aussi de nos moyens de lutte contre la corruption et de nos polices spécialisées seraient des éléments salutaires.

C’est donc dans un tout cohérent incluant la lutte contre la corruption, la coopération internationale, un réinvestissement dans nos moyens policiers et enfin le levier de la dépénalisation du cannabis que nous voyons une réponse à la hauteur du problème.

En conclusion, quand nous parlons de légalisation du cannabis, c’est dans la démarche d’une politique véritablement pragmatique qui aurait pour but la réduction des risques. En se concentrant sur la protection du consommateur, nous pourrions désormais limiter et amortir les effets de la consommation, dans la population, en régulant. Notre combat doit être celui d’empêcher intelligemment la consommation précoce qui est facteur de conséquences néfastes sur les plans scolaires et psychologiques. Mais se contenter de la seule prohibition, c’est laisser nos enfants aux trafics dans une forme de facilité politique et un genre d’abandon face au constat de notre échec.

Jean Kitenge, président de DéFI Jeunes

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