Laurent de Briey

Marches pour le climat : Oui, le monde politique peut entendre les jeunes

Laurent de Briey Professeur de philosophie politique à Namur, pilote de "Il fera beau demain - Mouvement positif"

Ce vendredi, 1000 jeunes ont à nouveau marché pour le climat avec le sentiment de ne pas avoir été entendus par le monde politique. Si, au niveau européen, le Green Deal annoncé est porteur d’espoir, le blocage fédéral nourrit un sentiment d’impuissance qui discrédite l’ensemble du monde politique. Pourtant, il reste un levier incontournable à toute transformation en profondeur de la société.

Prendre conscience de l’importance de l’enjeu climatique et définir avec les citoyens intéressés une action politique cohérente en réponse à celui-ci est un des objectifs du mouvement positif Il fera beau demain. Voici une ébauche de réponse qui pourrait être discutée dans ce cadre :

1. S’entendre sur une méthode : le grand mérite de la mobilisation des jeunes a été d’ouvrir le débat, d’inviter l’ensemble de la société à se questionner. Sur elle-même et sur ce qu’elle veut. Plutôt que de tourner en rond depuis huit mois, la première année de la législature aurait pu être consacrée à réfléchir à notre projet de société. Il n’est pas trop tard pour s’y mettre. En 2011, huit partis, de la majorité comme de l’opposition, ont discuté pendant des mois pour s’entendre sur une réforme de l’Etat. Pourquoi ne pourrait-on pas faire la même chose pour le climat ? Mais au-delà des partis, associons à la discussion les représentants des employeurs, ceux des travailleurs et le monde associatif. Faisons aussi participer les citoyens, que ce soit via des panels tirés au sort ou en multipliant les débats locaux, comme en France. C’est la méthode qui a permis de s’entendre sur la réforme de l’école. C’est elle aussi qui inspire Il fera beau demain. Il y a moyen de l’améliorer. Et de la généraliser. Cela permettrait de surmonter la division entre les différents niveaux de pouvoir, de favoriser l’adhésion de la population et de créer un consensus suffisamment large pour définir une action politique qui dépasserait le cadre d’une seule législature.

2. Initier le changement : Le premier levier qui devrait émerger de cette discussion serait un ensemble d’investissements ambitieux notamment en matière de mobilité (renforcer l’offre de transport en commun, adapter les infrastructures pour favoriser le covoiturage et la mobilité douce…) – et d’énergie (développer le renouvelable, améliorer l’efficience énergétique des bâtiments…). Les pouvoirs publics doivent donner l’impulsion nécessaire pour rendre possible une évolution de nos comportements. Ils doivent aussi donner l’exemple au travers des administrations et services publics. Enfin, il leur revient de fixer de nouvelles règles, comme l’interdiction des emballages plastiques individuels, en les annonçant suffisamment longtemps à l’avance pour permettre de s’adapter. La Région wallonne comme la Région bruxelloise ont pris des premières décisions en ce sens ces dernières années. Elles doivent maintenant être mises en oeuvre et renforcées, notamment dans le cadre du Green Deal européen et des assouplissements du cadre budgétaire européen qui devraient l’accompagner.

3. Modifier les prix : L’un des leviers les plus importants pour adapter les comportements est bien entendu le système des prix. Or, ceux-ci sont pour moitié déterminés par la fiscalité. En augmentant la fiscalité environnementale (taxes carbone et kérosène par exemple) en réduisant la fiscalité sur le travail (impôt sur le revenu et cotisations sociales), le prix des produits polluants augmentera tandis que les services aux personnes, comme les soins et l’éducation, et plus largement tous les domaines à forte intensité de travail, diminuera. Il y a ainsi moyen de construire une stratégie cohérente qui rencontre non seulement le défi climatique, mais apporte aussi une réponse aux enjeux du vieillissement et soit génératrice d’emplois et de cohésion sociale. A travers la fiscalité, ce sont ainsi de vrais choix de société que nous posons : préfère-t-on favoriser la consommation de masse ou la préservation de l’autonomie des personnes âgées ?

4. Accompagner la transition : Toute transformation profonde demande à chacun de s’adapter et de changer ses comportements. C’est évidemment plus facile pour certains que pour d’autres. Le politique doit dès lors accompagner la transition en s’assurant que les plus fragiles ne la subissent pas, mais au contraire y voient la promesse d’un avenir meilleur. La création d’emplois, la réduction des impôts sur le travail et le développement des services aux personnes peuvent y contribuer. Les politiques de formation professionnelle et d’éducation devraient aussi favoriser la réorientation vers les nouveaux secteurs d’activité. Au-delà de cela, une partie de la hausse de la fiscalité environnementale pourrait être restituée aux citoyens pour leur permettre de faire face à la hausse des prix des biens et des services.

Ce ne sont que quelques idées à approfondir et à débattre dans les prochaines semaines lors des débats qui seront organisés près de chez vous ou sur la plateforme de participation en ligne qui sera lancée début mars. Pour avoir des informations précises, n’hésitez pas à vous inscrire via le site ilferabeaudemain.team ou via la page facebook. Ensemble, essayons de rendre confiance dans l’avenir et dans l’action politique.

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