Charlotte Flechet

Climat : négociations avant Paris, le point sur les enjeux

Charlotte Flechet Jeune professionnelle dans le domaine des politiques environnementales.

La dernière session de négociations climatiques avant la très attendue Conférence de Paris a débuté ce lundi à Bonn. Avec seulement cinq journées de négociations officielles avant Paris, il reste encore beaucoup de pain sur la planche pour les négociateurs qui doivent s’accorder sur un texte contraignant en décembre prochain.

Les discussions se sont ouvertes sur l’expression de la frustration d’une grande partie des représentants des pays en développement, mécontents de l’ébauche d’accord préparée par les deux coprésidents du Groupe de Travail Spécial de la Plateforme de Durban pour une Action Renforcée (ADP), en charge de la négociation de l’accord devant être adopté à Paris.

Pour rappel, Ahmed Djoghlaf (Algérie) et Daniel Reifsnyder (USA) ont présenté ce document le 5 octobre dernier en tant que base potentielle des futures discussions suite au résultat des négociations précédentes. En réduisant ce texte de 80 à 20 pages, les coprésidents ont laissé toute une série de questions – chères aux yeux des pays en développement, mais pas seulement – en dehors du document.

Le groupe « G77+Chine », qui représente 134 nations émergentes et en développement a déclaré que l’accord était déséquilibré, pointant du doigt un biais en faveur des pays dit développés.

Selon Harjeet Singh d’ActionAid, cité par Climate Home, « La plupart des options avancées par le G77 ne sont pas reflétées dans le document… Adaptation, pertes et dommages, finance – on ne voit pas ces options. »

En particulier, une de leurs principales revendications proposant un mécanisme qui permettrait de traiter les pertes et dommages liées au changement climatique a été largement ignorée dans l’ébauche qui se limite à reconnaitre le problème.

Le document ne fait également plus référence ni au concept d’équité, central depuis la Conférence de Rio de 1992, ni aux subventions en faveur des énergies fossiles. L’arrêt de ces subsides est pourtant essentiel à la décarbonisation de l’économie mondiale soutenue par de nombreux chefs d’Etat lors du Sommet de l’Assemblée Générale des Nations Unies et du dernier G7.

La société civile, quant à elle, déplore la suppression de la référence à l’objectif de zéro émission ainsi que le retrait de la référence aux besoins d’objectifs de réduction globaux pour les secteurs de l’aviation et du transport maritime.

En terme de finance climatique, la mention de 200 milliards $ par an d’ici à 2030 pour soutenir les plans d’adaptation et d’atténuation a également été retirée du texte des coprésidents, tandis que la référence à l’objectif actuel de 100 milliards $ par an de financement pour l’après 2020 a été mise entre parenthèses. Or, la question des finances est cruciale pour assurer la prédictibilité des rentrées financières et la planification adéquates des plans d’atténuation et d’adaptation.

L’Union Européenne, à travers son commissaire au climat et à l’énergie, Miguel Arias Cañete a également exprimé son mécontentement, affirmant que l’UE et d’autres travailleraient d’arrache-pied pour améliorer le document.

Ces éléments clés, nécessaires pour que l’accord de Paris soit effectif devraient être largement discutés dans les jours qui viennent.

L’un de ces éléments – qui a survécu à la coupe des coprésidents, mais devant être clarifié – est la mise en place d’un mécanisme qui permette de régulièrement revoir les engagements de réduction d’émissions de gaz à effet de serre des états parties. A ce jour, près de 150 nations, représentant environ 90% des émissions mondiales ont soumis leurs contributions de réduction d’émissions auprès du Secrétariat du CCNUCC. Selon une analyse de Climate Action Tracker, un collectif regroupant quatre instituts de recherche, si ces engagements étaient appliqués, le réchauffement climatique pourrait être limité à 2.7°C contre 3.6° dans un scénario de statu quo. S’il s’agit évidemment d’une amélioration, ces engagements sont insuffisants pour rester dans la limite des 2°C préconisée par les scientifiques. C’est pourquoi un mécanisme permettant de régulièrement évaluer et augmenter les contributions nationales est essentiel pour assurer l’efficacité du futur accord.

A la fin de la première journée de négociations, plusieurs insertions ont été autorisées dans le document par les coprésidents afin de pouvoir avancer sur le contenu. Celles-ci couvrent des propositions liées aux droits de l’homme, aux questions de genre et au droit des peuples indigènes.

Climat : les discussions en cours à Bonn sont cruciales pour s’assurer qu’un accord soit à portée de main à Paris

En particulier, il est essentiel que les coprésidents obtiennent la confiance des pays du G77, mise à rude épreuve au cours des dernières semaines.

S’il est vrai qu’il ne reste que très peu de jours officiels de négociation avant le feu d’artifice final, d’autres événements seront à suivre de très près tels que le G20 à Antalya et la réunion des chefs d’Etat des pays du Commonwealth à Malte en novembre prochain.

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